Chronique

Appartient au dossier : Survivre au NaNoWriMo 2015

Survivre au NaNoWriMo : Carnet de bord #2

Chaque année, des milliers d’aspirants écrivains se lancent un défi : écrire un roman de 50 000 mots en l’espace de trente jours, du 1er au 30 novembre. Véritable marathon d’écriture, le NaNoWriMo nécessite une bonne préparation et une grande endurance. Parmi les conseils les plus souvent donnés aux « nanoteurs » : prévenir leurs proches qu’ils ne seront pas disponibles au mois de novembre et se forcer à écrire, même un tout petit peu, chaque jour. Même si elle est émaillée de rencontres conviviales entre auteurs et de moments d’intense satisfaction, cette aventure peut être un vrai parcours du combattant. Julien Morgan, pour sa huitième participation, vous donne tout au long du mois les clés d’un NaNo réussi. 

gros plan sur ordinateur, tasse à café et peluche
​© Emilie Barbier, http://www.facebook.com/transluceo/

Mercredi 11 novembre
Compteur
22 531 / 50 000 mots

Playlist
Martha & The Muffins / Metro Music
Ilan Eshkeri / Stardust : Music From The Motion Picture
Finntroll / Nifelvind

À presque mi-course, le PUFF (Projet d’Urban Fantasy Foutraque) se porte à merveille. Des personnages inattendus tirent la couverture à eux au détriment des héros, mais rien que de très normal dans un premier jet. À ce propos, la deuxième semaine du Nano est en général celle durant laquelle on commence à entendre l’inénarrable « les personnages n’en font qu’à leur tête » ; personnellement, je n’ai jamais eu ce problème, parce que les personnages sont les miens et que je planifie trop pour les laisser partir dans des directions qui ne me conviennent pas. Attention : je ne suis pas en train de prétendre que tout se passe exactement tel que je l’avais prévu. En l’occurrence, j’ai dû modifier complètement la partie de synopsis concernant la scène finale parce que je n’arriverait pas au dénouement que je souhaite de la manière dont ça se profile entre les deux protagonistes. Mais je garde la main sur mon histoire – au prix d’avoir dû, dans la nuit de dimanche à lundi, vaincre un gros blocage (et quoi de mieux qu’une nuit blanche à alterner de longues heures à regarder son écran vide pour quinze minutes d’écriture).

Je ne sais pas comment les autres wrimos gèrent les blocages, mais ma technique personnelle est de choisir un personnage secondaire et d’écrire une scène ou deux de son point de vue. Non seulement, ce sont des mots supplémentaires faciles (et rappelons que le but est d’en écrire beaucoup !), mais en outre il n’est pas nécessaire d’y consacrer beaucoup de temps avant de se rendre compte de ce qui ne colle pas. Dans mon cas, ça m’a permis de prendre conscience que mon antagoniste (le démon du folklore indien, souvenez-vous) n’avait pas du tout d’intérêts en contradiction avec ceux du héros – et du coup de comprendre pourquoi leur premier affrontement ne fonctionnait pas très bien et était plus difficile à écrire que prévu.

D’expérience, une autre cause fréquente de blocage est le manque d’enjeux ou de dilemmes. J’essaie de construire chaque scène comme un contrat : une amitié se créée, une inimitié se déclare, un accord est passé – littéralement ou métaphoriquement. Quand je ne perçois aucun deal dans un échange, dans quatre-vingt-dix-neuf pour cent des cas, c’est que la scène est mauvaise, chiante, ou n’a simplement pas lieu d’être. Intégrer un enjeu imprévu ou un dilemme moral permet de s’en tirer en réinstituant une dynamique narrative (tension, pression, etc.). Et si vous êtes en manque de solutions concrètes, je ne peux que trop vous recommander de faire exactement ce que j’ai fait dimanche : regarder Autant en emporte le vent (en écrivant, ça va de soi, parce qu’on ne reste pas quatre heures à rien foutre pendant le Nano, faut pas déconner). Si vous n’y avez jamais fait attention, ou si vous n’avez jamais vu ce film (honte sur vous !), la plupart des scènes sont très courtes, efficaces, et vont droit au but : intro – contrat – fin. Il n’y a pas le moindre morceau de dialogue qui n’ait pas son utilité dans la narration, la dynamique de l’histoire est à couper le souffle… (Bon, et puis Rhett Butler est quand même l’un des personnages les plus géniaux jamais écrits.)

Dernière astuce pour vaincre les blocages : s’entourer ! Comme je l’ai dit dans un autre billet, d’entre tous, ce sont les autres nanoteurs qui sont susceptibles d’avoir l’opinion la plus pertinente sur les problèmes que vous pouvez rencontrer. Demandez-leur comment ils abordent telle ou telle scène, tel ou tel personnage, tel ou tel dialogue ; partagez vos conseils et retours d’expérience. Avant de retourner à mon PUFF – qui a entretemps reçu un titre provisoire, Sphinx –, j’insiste lourdement sur ce point : gardez la main sur votre histoire. Vous êtes le maître, vous avez le contrôle : ne laissez pas vos personnages transformer votre Nano en spring break. Ce sont peut-être eux qui dansent, mais c’est encore vous qui chantez.

Publié le 11/11/2015 - CC BY-SA 4.0

Rédiger un commentaire

Les champs signalés avec une étoile (*) sont obligatoires

Réagissez sur le sujet