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Appartient au dossier : Psychiatrie, psychanalyse et malaise social

Quand l’enfant n’a pas les mots

Les démarches psychanalytique et psychothérapeutique passent souvent par la prise de parole du patient. Mais comment faire lorsque celui-ci n’est pas en âge de maîtriser les mots ou qu’il a des difficultés à les manier ?
En écho au cycle « Psychiatrie, psychanalyse et malaise social » organisé par la Bpi en 2019, tour d’horizon de quelques alternatives pour accompagner nourrissons, enfants et adolescents dans la (re)construction d’une relation à soi et aux autres.

Il existe en France des structures d’accueil psychologique dédiées aux enfants et aux adolescents. Certaines proposent un accueil de jour, comme les Maisons vertes, les Centres d’accueil médico-sociaux précoces (CAMSP) ou les Services d’éducation spéciale et de soin à domicile (SESSAD). D’autres institutions proposent des soins en court, moyen ou long séjour, par exemple les instituts médico-éducatifs (IME).

Au sein de ces structures, des approches alternatives à l’échange verbal sont proposées pour entrer en contact avec l’enfant : musique, travaux manuels, sport… Ce pas de côté permet de contourner les difficultés d’expression pour accompagner autrement les enfants dans une démarche d’écoute et de soin. Les places sont malheureusement trop rares dans ces institutions et ne permettent pas d’accueillir toutes les familles en demande.

Parler pour les bébés

Un accueil psychologique des nourrissons est exercé notamment dans les Maisons vertes. Ces structures d’accueil sont ouvertes par Françoise Dolto et ses collaborateurs en 1979 à l’intention des enfants jusqu’à quatre ans et de leurs parents. Les thérapeutes accueillent les familles de manière anonyme et gratuite, échangent avec les accompagnants et établissent avec l’enfant un lien qui passe par un échange oral, le jeu et, parfois, un contact physique.

Leur postulat est d’affirmer que, si le bébé n’est pas en mesure de verbaliser, il comprend en revanche lorsqu’on s’adresse à lui. L’enjeu est donc de lui parler. Lui raconter sa propre histoire, lui décrire son environnement, les émotions qui l’assaillent et circulent dans son entourage lui permet de s’apaiser et de structurer son identité. Ce moment d’échange entre le tout-petit et la personne qui l’accueille peut constituer, pour le parent, un temps de repos salvateur.

Une main d'enfant brosse un cheval, guidée par une main d'adulte.
Travail de la préhension et de la coordination en équithérapie lors d’une séquence de soin au cheval.
© Institut de formation en équithérapie, tous droits réservés.

Les enfants au contact du cheval

L’équithérapie est un soin médiatisé par les chevaux, qui agit sur les facultés mentales, sensorielles et physiques mais n’a pas pour ambition de rééduquer ou de soigner physiologiquement le patient. Elle est proposée aux enfants dès trois ans avec des troubles du développement psychologique, des polyhandicaps, ou des troubles comme la dysphasie et la dyspraxie.

Les séances sont construites de manière individualisée par l’équithérapeute, en concertation avec les parents et l’équipe médico-sociale qui suit l’enfant. Pendant une séance, l’enfant se situe à côté du cheval ou sur son dos. Il entre en interaction avec l’animal en le caressant ou en le promenant. Cette approche favorise la mise en place de situations relationnelles : contacts, éloignements, imitations, interactions, etc. La posture de l’enfant, ses gestes ou encore les vocalises constituent le socle de la communication.
Les activités montées mobilisent le corps différemment. Par exemple, lors d’une séance de relaxation, l’enfant s’allonge sur le cheval, ressent sa chaleur et découvre des sensations nouvelles.

L’équithérapie permet le développement des compétences en communication non-verbale. Par ailleurs, cette activité demande de la concentration et est utile aux enfants présentant des troubles de l’attention. Elle favorise également les relations sociales en développant l’empathie. Dans la relation avec le cheval, l’enfant n’est pas en situation de handicap. Il n’a pas besoin de mots ni d’un corps « valide ». Seule sa présence auprès de l’animal est nécessaire.

Adolescents musiciens

Les ateliers d’éveil musical à destination d’adolescents en situation de handicap mental ou psychique se déroulent dans les lieux dédiés à la pratique de la musique et à la création (conservatoire, salles de spectacle, etc.) et sont assurés par des éducateurs musicaux. Les professionnels de la santé mentale participent aux séances comme les jeunes mais ne conduisent pas les ateliers. Ils apportent un regard complémentaire qui aide l’éducateur musical à adapter ses conditions d’accueil.

Pendant une séance, les participants sont le plus souvent assis par terre en cercle. Ils manipulent les instruments, expriment leur ressenti – par des gestes, des mimiques, des réactions – et jouent de la musique avec les autres. L’éducateur musical accompagne les jeunes dans leurs gestes pour les amener à orchestrer ensemble.

L’effet thérapeutique n’est pas recherché a priori : la finalité est d’abord la création musicale en groupe. Toutefois, les bénéfices de la pratique sont remarquables : écoute, concentration, attention aux autres et, dans certains cas, développement du langage. L’enjeu est d’offrir aux jeunes les conditions qui leur permettent de s’épanouir seul et en groupe au moyen de l’instrument.

Publié le 10/09/2019 - CC BY-NC-SA 4.0

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