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Les mini-séries

Les mini-séries ont le vent en poupe. Ce format de série court (quelques épisodes compilés en une seule saison) rencontre un succès grandissant et tend à concurrencer les formats de séries  traditionnels.

Les succès critiques des mini-séries True Detective et de Top of the Lake, et les consécrations successives en 2012 et 2013 par le festival Séries Mania de deux mini-séries montrent que ce format a su séduire les amateurs de séries télé pourtant biberonnés aux grandes sagas. La mode de la mini-série dépasse le cadre des critiques et des sélections de festivals. C’est d’ailleurs  sous ce format court que certaines séries mythiques pourraient prochainement revoir le jour. Ainsi, la chaîne ABC annonce la commande de Lost : the untold, mini-série qui prendrait place dans l’univers de la série culte. De son côté, NBC annonce la résurrection de la série Heroes pour 2015 en une unique saison de 13 épisodes, Heroes : Reborn.

Qu’est-ce qu’une mini-série ?

La mini-série est un feuilleton comportant un nombre fini et limité d’épisodes, 3 à 10 épisodes, diffusé en une saison. Elle s’apparente à un long téléfilm découpé en plusieurs épisodes. Pour les plus courtes, la diffusion peut être programmée sur une ou plusieurs soirées consécutives. Elles peuvent être des oeuvres originales mais sont souvent adaptées d’oeuvres littéraires actuelles (La gifle) ou classiques (Au siècle de Maupassant). Elles puisent aussi leur inspiration dans le patrimoine cinématographique (Bonnie and Clyde). La fresque historique, le biopic ou encore le polar sont des genres particulièrement adaptés pour ce format.

Bonnie and Clyde, 2013

La mini-série n’est pas une nouveauté. L’un des premiers grands succès du genre date de 1977, Racines qui raconte la saga d’une famille noire américaine du temps de l’esclavage jusqu’aux luttes contre la ségrégation raciale. Le format court présente l’avantage d’un temps de tournage plus réduit qu’une série classique, et les stars du grand écran ont d’abord tenté l’aventure télévisuelle sur des mini-séries, Al Pacino et Meryl Streep dans Angels in America (2003), Steven Spielberg dans la flamboyante série historique Band of brothers, (2001).

Band of brothers, 2011

La durée de la mini-série permet d’obtenir de plus gros budgets sur l’ensemble de la production, ce qui a un impact sur le casting mais aussi sur les choix de mise en scène et les choix narratifs. Pour la mise en scène, les reconstitutions historiques sont souvent plus flamboyantes dans les mini-séries. Concernant la narration, imaginons un exemple d’utilisation du flashback comme procédé narratif. Dans le premier épisode le flashback apparaît et son sens caché ne nous serait révélé que dans le dernier épisode de la saison. Il sera plus simple à intégrer dans la mini-série en 6 épisodes que dans la série en 24 épisodes, qui laisse le temps au téléspectateur d’oublier les éléments du début ou de se perdre dans les détails de l’ensemble.

Quels types de mini-séries aujourd’hui ?

Au delà du standard, une seule saison et un nombre d’épisodes limité, d’autres formats proches de la mini-série existent.

Des épisodes très courts : la Shortcom

La shortcom, d’une durée de 3 à 10 minutes environ par épisode, est diffusée entre deux programmes de grandes écoutes, souvent avant ou après le journal télévisé. La télévision française a produit des séries comme Un gars une filleBref, ou encore Caméra café qui ont connu un succès populaire immédiat. Le téléspectateur n’a pas besoin de voir tous les épisodes pour comprendre. Ces séries décrivent des situations du quotidien auxquelles il peut s’identifier, où les travers de tout un chacun sont mis en scène. La série Kaamelot, qui s’inscrit dans ce courant, est un peu différente, parodie des légendes arthuriennes, dans l’esprit des Monthy Python, elle possède néanmoins un ton bien français. Si Alexandre Astier a eu du mal à convaincre les chaînes de la diffuser (voir la lettre de refus d’un responsable de programme que vous pouvez lire dans l’ouvrage de Nils Ahl et Benjamin Fau)*, le succès qu’on lui connaît atteste de l’efficacité de ce format pour le genre de la comédie : rapide, rythmé, et percutant.

Une saison très courte

Une tendance courante en Europe est de produire des séries sur plusieurs saisons mais avec peu d’épisodes par saison. En Grande-Bretagne notamment, on peut citer la série feuilleton à succès Luther, série policière qui compte quatre épisodes par saison. Dans un tout autre genre, la série In the flesh, seulement trois épisodes pour la première saison, surfe sur la vague zombie. Elle est renouvelée pour une deuxième saison (diffusion en France prévue en décembre sur Canal +).

In the flesh, 2013

L’anthologie

Un autre type de série appelée anthologie, est une série construite avec une histoire indépendante par épisode, et un casting différent pour chacun : la conceptuelle et très contemporaine Black mirror, série britannique de science-fiction, est une satire du rapport de l’être humain à la technologie et aux écrans. (Bientôt sur France 4)

Black Mirror, 2013

Egalement à voir, une série inspirée du phénomène contemporain de speed dating , intitulée Dates, elle propose en 9 épisodes de 30 min d’explorer les rapports amoureux aujourd’hui, en filmant des séquences de rendez-vous dans un restaurant entre deux protagonistes différents à chaque fois.

Dates, 2013

Une anthologie horrifique : une saison, une histoire

Aux Etats-Unis, la série American horror stories revisite les archétypes horrifiques américains issus de la littérature, du cinéma et de la télévision. Chaque saison est une histoire à part entière. Le casting est en partie reconduit. La première saison abordait le thème de la maison hantée, la deuxième celui de l’hôpital psychiatrique tenu par des médecins plus fous que leurs patients, et la troisième s’inspirait des légendaires sorcières de Salem et des rites vaudou à la Nouvelle Orléans. La quatrième saison, annoncée pour l’année prochaine, exploitera le thème du carnaval et du cirque.

Mini-série de genre : le thriller

Chosen est une série américaine de 6 épisodes de 20 minutes par saison, savamment découpées sur le modèle de 24. C’est un thriller qui n’est pas sans rappeler le film de David Fincher, The game. Ian Mitchell, un avocat, époux et père de famille, trouve un matin une étrange boîte devant sa maison de Los Angeles. Dedans : un pistolet chargé, la photo d’un inconnu, et un mot lui annonçant qu’il a trois jours pour le tuer… Le dilemme est le suivant : tuer pour ne pas être tué. Peut-il se sauver, lui et les siens, à la fois moralement et physiquement ? Le téléspectateur est proche de ce personnage en perpétuelle situation d’urgence, et impatient de le retrouver dans l’épisode suivant.

La mini-série sur le web : la web-série

Conçue pour le web, la web-série adopte un format court. C’est au départ un genre amateur, ou semi-professionnel. On trouve des parodies faites par des fans de séries à succès, ou des pastiches inspirés des genres populaires de la série (Soap, sitcom, teen). 

Parodie de la série bref

Mais c’est le genre « journal intime » qui est le plus répandu. Notre héros filme son entourage et dresse un portrait drôle et sans concession de ses contemporains. Comique, voire loufoque, la liberté de ton est totale, les moyens très limités.

Les textapes d’Alice, 2014

La première web-série française intitulé Potes7 : les potes du 7ème est diffusée en 2003. Le succès des web-séries n’est pas immédiat, mais le nombre de créations et les audiences ne cessent d’augmenter.

La web-série se regarde sur des plateformes spécialisées (les-series.com), des plateformes vidéo (YouTube, Dailymotion), des sites consacrés à certaines séries (Allociné), ou des web-télévisions (nolife-TV, anyfilm.TV). Les chaînes de télévisions s’inspirent de ce phénomène pour créer de vraies fausses web-séries, citons l’une des premières du genre, Web therapy avec Lisa Kudrow, l’ex-interprète de Phoebe dans la cultissime série Friends.

Webtherapy, 2011

Noob, web-série créée en 2008, et diffusée sur la chaîne Nolife, met en scène une jeune femme qui participe à un jeu en réseau multijoueurs, et qui rejoint la guilde Noob, la pire du jeu Horizon 1.0. Lors de la cinquième saison en mai 2013, cette web-série, assure son financement par une opération de crowdfunding en une journée seulement. La web-série amateur ou professionnelle diffusée sur le web comme son nom l’indique, est un phénomène qui s’amplifie et rencontre aujourd’hui un succès grandissant. Le visiteur du futur, une des web-séries françaises qui a connu le plus gros succès sur Dailymotion est aujourd’hui éditée en vidéo. La web-série fait son entrée dans la compétition lors de la 5ᵉ édition du festival international Séries Mania qui aura lieu du 22 au 30 avril au Forum des Images à Paris, avec la création d’une catégorie « web-série » parmi les prix décernés.

Publié le 19/04/2014

Sélection de références

Bref.

Kyan Khojandi et Bruno Muschio
Hachette, 2012

BPI,  Niveau 1, cultures geeks : GE TEL K

Les 101 meilleures séries télévisées

Nils Ahl et Benjamin Fau, P. Rey
, 2012

BPI,  Niveau 1, cultures geeks : GE TEL A

Petit éloge des séries télé

Martin Winckler
Gallimard (Folio), 2011

BPI,  Niveau 1, cultures geeks : GE TEL W

Pratiques créatives numériques

Brigitte Chapelain
Le Crosnier, Hervé C&F Editions, 2013

In Culturenum : jeunesse, culture & éducation dans la vague numérique

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