Interview

Appartient au dossier : Press Start 2022 : paroles et musique

La musique en jeu(x)
entretien avec Christophe Héral

Culture numérique - Musique

Rayman Legends © Ubisoft

Compositeur de musique et de son, comme il se définit, Christophe Héral a créé la musique de nombreux films d’animation et de… Rayman Legends. Rencontre avec un homme orchestre et un compositeur (extra) ordinaire.

Comment devient-on compositeur de musique de jeux vidéo ?

On devient d’abord compositeur, ensuite compositeur de musique de cinéma, de jeux vidéo. On le devient par son réseau et par son travail, des chemins qui croisent d’autres chemins.

Existe-t-il des différences entre la musique des jeux vidéo et celle des films d’animation ?

La musique de jeux vidéo ne se pense pas pareil. On est obligé de penser en sections musicales liées au gameplay (jouabilité), et celles-ci peuvent être de très longues boucles. On ne sait jamais combien de temps un joueur va rester dans une situation. Tant qu’il n’aura pas progressé, on risque d’avoir cette musique en fond sonore. À nous de pas l’ennuyer avec une musique répétitive et agaçante.

On peut donc parler de composition musicale de jeux ?

La musique de jeux est assez particulière, elle doit être « éditable » à n’importe quel endroit. On retrouve les menuets de Mozart, ce qu’on appelle la musique de dés. à l’époque, on avait une grille avec plein d’introductions, un premier groupe de 16 mesures, un deuxième groupe, et puis une coda. On jetait les dés et on disait : «  on va jouer l’intro 16 avec le premier groupe 48 etc… ». On faisait exactement ce que l’on fait aujourd’hui avec la musique de jeu.

Musicien, bidouilleur, bruiteur, quels sont les adjectifs qui vous caractérisent ?

Ce qui m’intéresse c’est de réfléchir à la totalité de la bande son. La musique en fait partie, mais pas exclusivement. Enregistrer du son, c’est faire un cadre comme un photographe. Chez lui, c’est un point de vue ; chez moi, c’est un point d’ouïe. Dans les deux cas, c’est un choix. J’aime faire ce choix.

Vous avez été nominé aux GANG Awards de San Francisco, récompensé pour la meilleure musique de jeux aux Games Paris Awards 2013. La musique de jeux vidéo trouverait-elle une légitimité ?

La reconnaissance vient du public. Un joueur passe des heures sur un jeu. La relation entre le joueur et la musique de jeux vidéo est bien différente de celle qui existe entre un spectateur et la musique d’un film. La reconnaissance, c’est de voir des salles remplies pour des concerts de musique de jeux vidéo. Mes compositions ont été interprétées par le Los Angeles Philharmonic, un des orchestres les plus prestigieux au monde, devant onze mille spectateurs. J’ai compris à ce moment-là qu’il y avait des personnes qui avaient vraiment envie d’écouter de la musique de jeux vidéo.

Propos recueillis par Philippe Berger, Bpi

Article publié initialement dans le numéro 14 du magazine de ligne en ligne

Publié le 23/04/2018 - CC BY-SA 4.0

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