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John Zorn: Radical culture à la Philharmonie

John Zorn (1953-), saxophoniste, compositeur, théoricien, agitateur et producteur (sous le label Tzadik), est sans doute l’un des musiciens les plus actifs, sur la scène internationale, de notre temps. Il est mis à l’honneur par la Philharmonie et le Musée du Louvre du 31 mars au 2 avril 2017.

portrait photographique de John Zorn
By Concertparis (Own work) [Public domain], via Wikimedia Commons

Les formes les plus contemporaines (hardcore, noise, free jazz), comme les plus éprouvées (easy listening, klezmer, pop) de l’art sonore se sont données rendez-vous chez ce boulimique amateur de cartoons et de magie — noire, le plus souvent.

Le catalogue de son œuvre dessine une constellation de références et d’hommages en perpétuel mouvement : au cinéma et à la photographie (Pabst, Godard, Weegee), à la littérature (Artaud, Daumal, Duras, Rimbaud, Genet, Celan), à l’art (Duchamp), mais aussi à la culture afro-américaine, à la tradition juive, à la Chine et au Japon.

Du compositeur médiéval Guillaume de Machaut (14ème siècle) à Serge Gainsbourg, en passant par Stravinsky, Ennio Morriconne et feu son ami Lou Reed (un « privilège » assez rare…), la liste des musiciens que prolonge l’œuvre de John Zorn est une histoire de la musique qui, à défaut d’être humainement assimilable, présente l’avantage d’être accessible par n’importe quelle porte, ou presque !

Après le carton plein des concerts-marathons donnés à Jazz à la Villette en 2013 à l’occasion de son jubilé, John Zorn revient cette année à la Philharmonie et au Louvre : seul aux grandes orgues de la salle Pierre-Boulez, compositeur d’une sorte d’oratorio autour de Freud (« The interpretation of dreams »), en déambulation au Louvre, filmé par Mathieu Amalric…

Nous en profitons à la Bpi pour exposer (dans l’Espace Musique, en mars 2017) le conséquent fonds de disques de John Zorn, du label Tzadik qu’il a fondé avec ses amis de la scène Downtown new-yorkaise, ainsi que la collection d’écrits de musiciens « créatifs », tous genres confondus, qu’il a réunis au sein de la collection Arcana : musicians on music. Voici un aperçu en quelques titres.

Publié le 23/03/2017 - CC BY-SA 3.0 FR

Sélection de références

John Zorn, News for Lulu

News For Lulu

John Zorn, George Lewis, Bill Frisell
Hat, 1988

L’hommage croisé à Louise Brooks et aux maîtres du hard-bop, avec la figure de la Great Black Music George Lewis et le guitariste Bill Frisell

À la Bpi, niveau 3, 780.61 ZORN 4
Naked City, John Zorn

Naked City

Naked City
Tzadik, 1990

Le quatuor de choc composé de Fred Frith (à la basse), Bill Frisell (guitare), Joey Baron (batterie) et John Zorn (saxophone) est aussi connu pour ses apparitions provocantes sur la scène new-yorkaise de la fin des années quatre-vingt et ses pochettes controversées (les mutilations de Leng Tch’e, la photo de Weegee illustrant le premier album du groupe) que son cocktail explosif de no wave hardcore, de jazz free et d’easy listening.

Painkiller (avec Bill Laswell) est le nom d’une autre opération-commando montée ultérieurement par Zorn sur un terrain analogue.

À la Bpi, niveau 3, 780.61 NAKE 4
John Zorn, Kristallnacht

Kristallnacht

John Zorn
Tzadik, 1993

Le monument de Zorn en mémoire du pogrom de 1933 perpétré par les nazis. Une composition combinant dodécaphonisme, klezmer, noise et improvisation.

« Je voulais à la fois remonter bien plus avant, aux fondements de notre identité, et embrasser aussi les années qui ont suivi l’holocauste et la colère qui nous a envahis. » (John Zorn)

Avec Anthony Coleman (claviers), Marc Ribot (guitares), David Krakauer (clarinette), William Winant (percussion)

À la Bpi, niveau 3, 780.61 ZORN
John Zorn, Masada

Masada

John Zorn
Tzadik, 1994

Les années quatre-vingt dix voient l’inspiration de John Zorn se tourner de plus en plus explicitement vers la tradition juive. Avec Masada, Zorn s’astreint à écrire 100 compositions par an dans ce style, qu’il joue ensuite avec ses différents groupes.

Les Masada Books feront ensuite l’objet de multiples réappropriations, notamment le duo composé de la pianiste Sylvie Courvoisier et du violoniste Mark Feldman qui en donneront une version mémorable au Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme en 2010.

À la Bpi, niveau 3, 780.61 ZORN 4

John Zorn, Duras / Duchamp

Duras / Duchamp

John Zorn
Tzadik, 1997

John Zorn compositeur de musique classique à son plus haut niveau, et dans un registre inattendu.

Tandis qu' »Etant Donnés (69 paroxysms for Marcel Duchamp) » évoque les pièces aléatoires de John Cage, l’élégiaque « Duras« , ici interprétée avec Anthony Coleman au piano et Mark Feldman au violon, présente une palette sonore proche d’un autre grand aîné de John Zorn : Morton Feldman.

À la Bpi, niveau 3, 780.61 ZORN 4

John Zorn, Six Litanies for Heliogabalus

Six Litanies for Heliogabalus

John Zorn
Tzadik, 2007

Accompagné de Trevor Dunn (basse), Joey Baron (batterie), Ikue Mori (électroniques), Mike Patton (voix), d’un orgue et d’un quatuor vocal, Six Litanies for Heliogabalus, inspiré de l’oeuvre éponyme d’Antonin Artaud, est un tour de force remarquable de la manière zornienne des années deux mille – conciliant la fureur d’improvisations massacrantes, la densité d’un son grindcore et la rigueur d’une écriture implacablement expressive.

À la Bpi, niveau 3, 780.61 ZORN 4

John Brackett, John Zorn

John Zorn : Tradition and Transgression

John Brackett
Indiana University Press, 2008

Le musicologue John Brackett (Université de Caroline du Nord) est le spécialiste incontournable de la musique et de l’esthétique de John Zorn.

Cette monographie du compositeur, sous-titrée « tradition & transgression« , en saisit l’importance à la fois vis-à-vis du temps présent et des musiques populaires (jazz, rock, hardcore, musiques de film, easy listening) et sur le temps long : recherche formelle dans le droit fil de ses illustres prédécesseurs, de Stravinsky à John Cage ; gnose dans l’esprit d’une certaine tradition médiévale, etc.)

À la Bpi, niveau 3, 780.61 ZORN 4
Arcana : musicians on music

Arcana : Musicians on Music

John Zorn
Tzadik,

Depuis 2001, John Zorn édite d’importants volumes dans la collection Arcana (Tzadik Books) qui donnent la parole à la « communauté » de musiciens protéiforme à laquelle il se rattache.

On y retrouve les signatures habituelles du premier cercle de la scène Downtown (Marc Ribot, Bill Laswell, Bill Frisell), mais aussi celles de cercles plus éloignés comme le jazz (Yusef Lateef, Brad Meldhau, Steve Coleman, Vijay Iyer), la musique contemporaine (Meredith Monk, Pauline Oliveiros, Irvine Arditti) ou le rock indépendant (Sean Lennon, Thurston Moore, Jim O’Rourke, Genesis P-Orridge)

À la Bpi, niveau 3, 780.61 ARC
Circuit 25 : Tzadik

Tzadik : l'esthétique discographique selon John Zorn

François Xavier Féron, Karen Brunel-Lafargue, David Unger
Presses de l'université de Montreal, 2015

Un numéro exceptionnel de la revue québecoise de musique contemporaine Circuit : des articles du fond sur le projet de John Zorn à travers Tzadik ; le graphisme de Heung Heung Chin (Chippy) ; la « radical jewsish culture »; des entretiens avec sept artistes français produits par John Zorn ; une discographie (commentée par le compositeur Pierre-Yves Macé).

« À l’image de son directeur artistique, Tzadik se distingue par son éclectisme et son goût prononcé pour l’hybridation des genres musicaux. […] la maison de disques soutient avant tout les musiques qui, de par leur nature avant-gardiste, peinent à être diffusées à travers les canaux conventionnels; croyant en l’intégrité des artistes qu’il décide de produire, Zorn souhaite que chaque album soit le pur reflet de leur pensée musicale. Est-ce ce qui fait la force de Tzadik? Quelles sont les autres particularités de cette maison de disques? »
— François-Xavier Féron

« Pour qui n’aurait jamais entendu parler de Radical Jewish Culture, clarifions d’emblée : il s’agit d’une scène musicale née à New York au début des années 1990, ainsi que d’une collection d’enregistrements produits par John Zorn et sa maison de disques Tzadik. Contrairement à ce que l’association des termes pourrait évoquer, la Radical Jewish Culture ne se soucie guère d’idéologie politique ou religieuse. Elle est affaire de musiques et, in extenso, de toutes les formes d’arts produites par des artistes juifs ou non, traitant de thèmes juifs. »
— David Unger

À la Bpi, niveau 3, 78(0) CIR
John Zorn : portrait et biographie sur France Musique

John Zorn : portrait et biographie (France Musique)

John Zorn : Grand portrait, par Alex Dutilh (Open Jazz)

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Zorn by Zorn

Week-end Zorn by Zorn à la Philharmonie

Toujours inattendu, John Zorn se retrouve tour à tour à l’orgue de la Philharmonie, en train de déambuler au Louvre ou au centre d’un marathon musical.

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