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Appartient au dossier : Dans la bulle des auteurs et autrices de BD

Dans la bulle de Clara Lodewick

Après ses études de BD à l’école Saint-Luc de Bruxelles, Clara Lodewick, vingt-cinq ans, rencontre déjà le succès avec Merel . Premier album de la jeune autrice, Merel entraîne le lecteur dans un village de la campagne flamande, soudain fracturé par un malentendu qui tourne au cauchemar. Clara Lodewick présente à Balises les œuvres qui inspirent son album, à l’occasion de sa venue à la Bpi en octobre 2022.

Publié le 10/10/2022 - CC BY-SA 4.0

Ladybird, Ladybird, un film de Ken Loach | Film4 Production, 1994, 1 heure 42 minutes

Ladybird, Ladybird est le premier film qui m’a marquée profondément. Le personnage de Maggie, à qui les enfants sont retirés tour à tour par les services sociaux, était tellement crédible que, petite, je ne comprenais pas s’il s’agissait d’un documentaire ou d’une fiction.

Maggie est une femme, avec ses travers et ses qualités. Elle n’est pas romancée, mais elle n’est pas réduite à une figure misérabiliste. Grâce à ce film, j’ai découvert d’autres histoires de Ken Loach. Son travail est une boussole pour moi. Si Ladybird, Ladybird est mon film préféré, c’est sans doute parce qu’il a été scénarisé par une femme, Rona Munro.

« Het Dagelijks Brood » (Le Pain Quotidien) Constant Permeke - Mu.ZEE, Kunstmuseum aan zee

Het Dagelijks Brood (Le Pain quotidien), de Constant Permeke, peinture à l'huile, 148,5 x 175 cm, 1950 | Collection du Mu.ZEE - Kunstmuseum aan zee, Ostende, Belgique

Pendant la création de Merel, je suis allée puiser l’inspiration dans l’expressionnisme flamand (courant artistique dont fait partie Constant Permeke), aussi bien pour les sujets abordés et le dessin des corps et des perspectives que pour la mise en couleurs des scènes.

J’ai choisi ce tableau en particulier parce que, lorsque je l’ai vu en vrai, ça m’a fait un choc. Il est très grand et d’une puissance écrasante. Sa composition est très forte, le vide et le silence prennent autant de place que les géants qui mangent à table. On mange et on se tait.

Les chansons d'Arno | Tympan (à écouter à la Bpi)

Lors de mes études de BD, j’écoutais beaucoup le chanteur belge Arno et ses textes m’ont influencée. Il a fait des chansons incroyablement denses sur de simples présentations de personnages. Mais ce sont des personnages qui tiennent la route, qu’on connaît ou reconnaît. Il ne faut pas toujours chercher loin et une anecdote peut en dire beaucoup sur quelqu’un. Il a également une façon décomplexée de raconter les choses qui me parle énormément.

La Bâtarde

Violette Leduc
Gallimard, [1964]

J’ai commencé à vraiment lire la romancière Violette Leduc en dessinant Merel. Elle a une façon d’écrire extrêmement libre, comme si elle sortait tout ce qu’elle a à l’intérieur, tout en nous offrant des bijoux de poésie. Elle a été ma camarade lors de mes pauses ; c’est comme si je reprenais une conversation avec une vieille amie que j’aime écouter. Résumer La Bâtarde serait difficile, mais c’est un livre autobiographique d’une force et d’une passion brûlantes.

À la Bpi, niveau 3, 840″19″ LEDU 4 BA

Les Raisins de la colère

John Steinbeck
Gallimard, [1939]

Pour moi, Les Raisins de la colère est le mélange parfait entre une écriture riche et gourmande et des personnages solides, très crédibles et touchants. Entre une critique intelligente du système capitaliste et une aventure, à laquelle on croit. C’est un récit qui souffle tout sur son passage et qui est resté ancré en moi.

À la Bpi, niveau 3, 821 STEI 4 GR

Krokodile Comix

Mattt Konture
L'association, 1988-2018

Ce sont des bandes dessinées courtes (en 4 tomes) dans lesquelles Mattt Konture fait le bilan de sa vie, tous les cinq ans. Avec un dessin libre, underground, et beaucoup d’humour, il nous raconte des histoires tristes mais pleines d’amour.

Ce qui me bouleverse dans son travail, c’est la sincérité avec laquelle il tente de nous faire comprendre ce qu’il vit et ressent. À chaque fois que je relis un de ses livres, c’est pour le plaisir de retrouver ce personnage et de prendre de ses nouvelles.

 

Pour aller plus loin

Merel

Clara Lodewick
Dupuis, 2022

Femme libre et indépendante, Merel vit de l’élevage de canards et de quelques articles dans la presse locale. Dans le village, elle connaît tout le monde et chacun l’apprécie : du club de foot au bar du coin, elle promène sa bonne humeur sans encombre. Mais le climat dégénère lorsque Merel ose une mauvaise plaisanterie sur la nudité imaginaire du mari d’une voisine. La rumeur se répand : elle couche avec tous les hommes du village, elle n’a aucune moralité. Les adultes se méfient, se montrent agressifs ou s’éloignent. Les enfants, influencés par leurs parents, lui jouent de mauvais tours… Petit à petit, Merel devient la proie de toutes les aigreurs.

Merel décrit parfaitement la vie d’une petite communauté rurale et de ses habitants qui mènent une vie paisible entre travaux du quotidien et retrouvailles entre amis. Clara Lodewick saisit avec finesse la manière dont les commérages font basculer ses personnages, la rumeur qui s’étend et avec elle le soupçon et la méchanceté. Devenue leur bouc émissaire, Merel est montrée avec ses doutes et ses craintes et affronte comme elle peut les regards en biais et les coups bas. Cette chronique psychologique et sociale est servie par un dessin à l’encre et à l’aquarelle qui décrit parfaitement les fragilités de ses personnages, traversés de sentiments contradictoires.

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