Dans la bulle de Pauline de Tarragon
Le premier roman graphique de Pauline de Tarragon dresse le portrait de la jeune artiste au parcours déjà foisonnant, et qui assume un certain bouillonnement intérieur. Les quelques références artistiques et littéraires qu’elle commente pour Balises, complètent ce portrait intime. Pauline de Tarragon est l’invitée du Jeudi de la BD du 2 octobre 2025 à la Bpi.
Pauline de Tarragon est partagée depuis toujours entre ses passions principales : le dessin et la musique. Lycéenne, elle finit troisième du concours télévisuel La Nouvelle Star 2014. La jeune avignonnaise emménage ensuite à Paris pour suivre des études d’illustration en DMA à l’école Estienne de Paris. Elle mène en parallèle une carrière musicale au sein du groupe Pi Ja Ma, avec Alex Concato. Devenue illustratrice, elle publie des albums jeunesse : Le Cri de Zabo (2017), Minimichel (2019), Sous les paupières (2022, avec Claire Pommet) tout en enchaînant les sorties d’albums musicaux. Par ailleurs, elle fait de la céramique, envisage de réaliser des films…
Pauline de Tarragon assume un côté asocial tout en affichant la richesse de son réseau relationnel. Elle se qualifie d’« ours contrarié ». Jeune, elle se dit rassurée par le mode de vie vieille dame qu’elle s’applique… Bref, c’est un peu le bazar dans la tête de Pauline et son premier roman graphique Minuscule folle sauvage nous invite justement à explorer cette agitation de l’intérieur. Avec cette autobiographie sincère et fantaisiste, l’autrice tend un miroir à quiconque partage cette complexité. Si les sujets sont graves et sérieux, le ton est léger, le trait expressif et créatif.
Dans sa BD, Pauline de Tarragon dresse une liste d’œuvres « doudous » qui, dit-elle, « me font instantanément du bien et qui m’accompagnent tout au long de ma vie. Ces œuvres ont en commun une intimité extrême. Elles évoquent toutes des personnes seules qui travaillent en étroite collaboration avec leurs sensibilités respectives et mettent leur passion au centre de leur vie. Elles me font penser à plein de petites maisons chaleureuses qui cohabitent sur mes étagères. » Pour Balises, elle détaille les références qui résonnent avec les thématiques qu’elle explore.
Publié le 23/09/2025 - CC BY-SA 4.0
La Cloche de détresse
Sylvia Plath
Editions Denoël, 2023
La Cloche de détresse de Sylvia Plath a été un petit électrochoc pour moi. C’est la première fois que je lisais des mots aussi vrais sur la dépression et les idées suicidaires. J’ai trouvé le ton à la fois amusant et effrayant. Je pense que le fait que ce récit appartienne à une femme m’a d’autant plus touchée.
À la Bpi, Littérature, 821 PLAT 4 BE
Miss Islande
Auður Ava Ólafsdóttir
Zulma, 2019
J’ai retrouvé dans cet ouvrage, le même besoin de « chambre à soi », d’espace de travail intime et indispensable, que dans La Cloche de détresse de Sylvia Plath (1963).
Une femme se marie et se retrouve à l’étroit dans les codes de sa nouvelle vie. Tout ce qu’elle veut, c’est écrire et vivre sa vie à travers ses livres. Mais ce n’est pas compatible avec la vie d’une jeune femme de 21 ans en 1963. Les relations amicales racontées dans ce roman sont touchantes et précieuses. Elles permettent à Hekla, l’héroïne qui déborde du cadre, de se sentir comprise et soutenue.
À la Bpi, Littérature, 839.5 OLAF 4 UN
Journal
Julie Delporte
Agrume (2014), Éditions Pow Pow (2020),
Dans le roman graphique Journal, de Julie Delporte, j’ai découvert une nouvelle façon de faire de la BD. Pas de cases, pas de début ni de fin, un journal très intime raconté avec des couleurs et des traits qui nous font sentir invité·es dans l’univers de l’artiste.
Les femmes qui font de la BD m’inspirent beaucoup, car j’ai l’impression qu’elles cassent les codes préétablis par des hommes pour faire des œuvres bien plus touchantes, et graphiquement originales. Elles ouvrent la voie pour les artistes des générations suivantes. Parmi elles, je citerai Catherine Ocelot, Elizabeth Pich, Mirion Malle…
Colour Green, par Sibylle Baier | Orange twin
J’aime beaucoup l’album Colour Green, de Sybille Baier. C’est son premier disque. Enregistré de 1970 à 1973, il n’est sorti qu’en 2006 ! Pourquoi ? Parce que cette femme enregistrait sa musique dans son coin et son fils a retrouvé les bandes du magnétophone à bobines 30 ans plus tard. C’est aujourd’hui une référence dans la folk et je ne me lasse pas de ces chansons mélancoliques portées par cette voix, si pure et si sincère.
Sorry, Baby
Eva Victor
, 2025
Dernièrement, le film Sorry Baby, d’Eva Victor m’a beaucoup touchée. La réalisatrice est aussi le personnage principal de son film. On suit le parcours d’une jeune personne, brillante, drôle et attachante, qui vit une agression sexuelle et dont la vie est détruite par la suite. Les relations amicales y sont dépeintes très justement et on comprend très bien comment une rencontre avec un agresseur peut ruiner notre confiance en nous et notre rapport aux autres.
Comme dans toutes les œuvres citées dans cette liste, j’aime l’association douce-amère de ces thèmes violents avec de belles images et toujours un peu d’humour.
Pour aller plus loin
Minuscule folle sauvage
Pauline de Tarragon
La ville brûle, 2024
« C’est avec humour et poésie que l’autrice nous livre un monologue intime qui touchera en plein cœur les introverti·es, les inadapté·es, les phobiques aussi bien du vide que du trop-plein, et les tristes de naissance. Ce petit bijou minimaliste, plein d’humour et de sensibilité, vous fera passer du rire aux larmes ». (Extrait de la présentation de l’éditeur)
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