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Appartient au dossier : Des plantes intelligentes ?

Des plantes intelligentes ? La sensitive

Le Mimosa pudica ou sensitive replie ses feuilles en réaction à un contact. Ce mouvement spectaculaire résulte-t-il d’une forme d’intelligence végétale ? Parler d’intelligence pour une plante, qui ne dispose ni d’un cerveau ni d’un réseau de neurones, est probablement un abus de langage. Cela permet cependant d’attirer l’attention sur les formidables capacités des plantes à réagir et à collaborer. Cela contribue également à changer notre point de vue sur ces formes qui représentent 99 % du vivant de la planète. 
Balises vous présente les étonnantes propriétés de quelques végétaux.

doigt touchant les feuilles du mimosa qui se referment au contact
Mimosa pudica, par KrishnenduPramanick, via Pixabay [CC0]

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Au contact d’un insecte ou de notre doigt, la sensitive referme ses folioles. Ce phénomène est observé de longue date. En 1876, l’entomologiste et botaniste Jean-Henri Fabre le décrit. Il est expliqué par la présence de cellules réceptives sur les folioles, qui captent le contact et déclenchent un signal électrique qui se propage de cellule en cellule jusqu’à la base du pétiole, le pulvinius. Celui-ci se contracte, provoquant la fermeture des feuilles les unes sur les autres en suivant le parcours de la tige. Cette réaction a pour but d’éloigner les prédateurs en les chassant par un mouvement. En 2016, une équipe de scientifiques de la New York University (NYU) découvre que la sensitive présente ce même réflexe défensif au niveau de ses racines. Des protubérances minuscules fixées aux racines libèrent un gaz au contact de prédateurs ou de racines de plantes concurrentes.

Mais ces réactions ne sont obtenues qu’en présence d’un danger. La plante ne réagit pas au contact de la pluie, ni du vent et finit par ne plus réagir si le danger n’est pas avéré. En 2014, la scientifique Monica Gagliano reproduit et teste scientifiquement une observation d’un botaniste suisse en 1832, Augustin Pyrame de Candolle. Celui-ci, ayant constaté qu’une sensitive embarquée sur une calèche refermait ses feuilles à plusieurs reprises puis finissait par ne plus les refermer, en avait conclu que la sensitive pouvait s’habituer au mouvement. Monica Gagliano soumet des sensitives a un même choc : une chute de 15 cm de haut, amortie à l’arrivée par un matelas de mousse. Dès quatre ou six chutes, la plante ne referme plus ses feuilles, mais soumise à un autre stimulus, elle réagit de nouveau, preuve qu’elle garde sa capacité physique de réaction. De plus, soumis une nouvelle fois à la chute initiale, elle ne se referme plus, et ce, jusqu’à un mois après la dernière chute. 

Ces réflexes compromettent la survie de la plante en utilisant son énergie et en réduisant ses capacités à photosynthétiser, d’où la nécessité de conditionner ce réflexe à la réalité des menaces. Ainsi, sans cerveau et sans neurones, la plante paraît présenter des similitudes de comportement avec les animaux : elle estime le danger et montre des capacités d’apprentissage et de mémoire. Ce sont, du moins, les conclusions des scientifiques de la très controversée neurobiologie des plantes. D’autres spécialistes en botanique estiment que cette analyse est le fruit d’une surinterprétation et que les réactions des plantes sont propres à leur constitution végétale.

Publié le 06/01/2020 - CC BY-SA 3.0 FR