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Appartient au dossier : Le féminisme a de l’avenir

PROTÉGEZ VOS FILLES ÉDUQUEZ VOS FILS

Comment faire évoluer l’éducation des garçons pour que l’identité masculine ne soit plus synonyme de virilité dominante ? Autrement dit, comment accompagner les jeunes garçons dans la construction d’une masculinité qui les épanouisse sans les inscrire dans une logique de domination genrée ? Balises esquisse quelques pistes pour accompagner le cycle « Le féminisme n’a jamais tué personne » organisé début 2021 par la Bpi.

Des enfants se déguisent en guerrier, viking et licorne
Illustration : © Florène Vaxelaire

Les jeux pour garçons n’existent pas

Contrairement à ce que tente de faire croire le marketing genré, les jouets n’ont pas de sexe. Filles et garçons, si on leur en laisse la possibilité, se saisiront d’une poupée, d’une petite voiture, d’une robe de princesse ou d’un costume de superhéros sans que cela influe sur leur identité genrée. 

Pour déjouer les clichés ludiques, on peut amener les garçons vers des jeux symboliques (jouer au marchand, s’occuper d’un poupon…) souvent proposés aux filles, ou organiser des activités sportives mixtes qui encouragent une occupation égalitaire des aires de jeux et des cours de récréation. Afin d’éviter l’ancrage des stéréotypes, parler avec son enfant des représentations de genre dans les livres et dessins animés qu’il regarde est également possible. Pour cela, rien de mieux que de ne pas le laisser seul devant un écran.

Que d’émotions !

Les émotions masculines n’ont pas à être limitées au courage, à l’ambition et à l’agressivité viriles. Autoriser l’expression de toutes les émotions et les nommer avec son enfant est une belle manière de montrer à un garçon qu’il existe autant d’expressions de la masculinité que d’individus. Amener vers l’écoute, l’empathie et le partage peut être fait par exemple en proposant des activités ludiques qui encouragent l’expression, la communication et la collaboration plutôt que la rivalité et la conquête. De nombreux jeux de société sont fondés sur des règles collaboratives. Les jeux symboliques mobilisent eux aussi souvent ce type de sociabilité.

De l’amour aux désirs

L’amour lui-même peut être autant ressenti par les garçons que par les filles. Expliquer à son enfant que l’amour n’a pas de sexe, c’est aussi rappeler la banalité d’une attirance pour une personne du même sexe, autant que du sexe opposé. C’est également souligner que les femmes, comme les hommes, sont en droit d’exprimer leurs désirs et de disposer de leur corps. Pour lutter contre l’hétéronormativité on peut, par ailleurs, rappeler qu’une amitié entre personnes de sexe opposé est tout à fait normale : un garçon et une fille qui aiment jouer ensemble dans la cour de récréation ne sont pas forcément amoureux. À l’inverse, un sentiment amoureux entre deux garçons peut exister à tout âge.

Mon corps m’appartient

La sexualité n’est pas une compétition et il est important de dégager les garçons de l’impératif de performance qui pèse sur les relations intimes. Dans une recherche de plaisir partagé, une interaction est nécessaire entre les partenaires. Pour favoriser cet échange, le consentement de son ou sa partenaire est indispensable afin de prévenir toute violence sexiste, y compris le harcèlement sexuel. Cet apprentissage débute très tôt, en écoutant ce que disent les enfants et en évitant de les contraindre à des contacts physiques : les enfants ne sont pas des machines à bisous ! C’est aussi connaître et faire connaître l’anatomie et le fonctionnement du corps, masculin comme féminin, ainsi que le principe de la contraception, pour les garçons comme pour les filles.

À chaque âge ses questions

Le genre est une construction sociale et culturelle qui s’apprend, se vit, s’expose et se modifie au quotidien. Alors que la petite enfance autorise une fluidité des genres, entre cinq et sept ans les enfants sont souvent attachés aux rôles genrés parce qu’ils pensent que leur identité sexuelle dépend de leur adhésion à ces conventions sociales. Vers douze ans, la pression du regard des autres devient telle qu’un retour aux normes de genre peut être à nouveau observé. Le dialogue avec l’enfant sur ces questions varie donc en fonction de son âge. 

Ce dialogue nécessite d’interroger ses propres biais genrés : s’adresse-t-on différemment à un garçon et à une fille ? comment sont distribués les rôles à la maison et comment chacun s’adresse-t-il aux autres ? La première voie pour élever un garçon de manière féministe, c’est aussi que chacun des membres de la famille s’empare de ce sujet.

Faire confiance 

Osciller entre la liberté que l’on souhaite offrir à son enfant et la crainte de le voir socialement exclu dans un monde souvent façonné par les stéréotypes de genre peut être compliqué. Des ressources sur les formations en petite enfance et à l’école existent pour comprendre ce que l’enfant peut apprendre dans ce milieu. De plus, il est possible de lui proposer quelques clés pour répondre à d’éventuelles remarques, comme les dépliants disponibles sur le blog Maman, rodarde !.

Mais il faut surtout faire confiance aux enfants, qui disposent d’une grande intelligence sociale : ils savent s’adapter aux normes en fonction des milieux qu’ils fréquentent et comprennent qu’on ne valorise pas les mêmes aspects de sa personnalité partout. 

Publié le 11/01/2021 - CC BY-NC-SA 4.0

Pour aller plus loin

Tu seras un homme (féministe) mon fils !

Aurélia Blanc
Marabout, 2018

Ce manuel d’éducation non-sexiste à l’usage des parents interroge la masculinité pour déconstruire les stéréotypes de genre. Il s’appuie sur des analyses d’experts, des témoignages et des informations pratiques pour proposer les meilleures manières de donner aux jeunes garçons une éducation épanouissante et respectueuse de tous.

Fille-garçon : même éducation

Pihla Hintikka, Elisa Rigoulet
Marabout, 2020

Les différences d’éducation entre les filles et les garçons s’installent dès le berceau, sans qu’on en ait toujours conscience. Ce guide propose une réflexion sur l’influence des constructions de genre et aborde, avec franchise et humour, tous les sujets qui taraudent les parents.

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