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Georges Colomb, dit Christophe, dans le domaine public en 2016

Un artiste entré dans le domaine public en janvier 2016 vous est présenté chaque semaine de janvier à travers une de ses œuvres. Cet artiste est sélectionné dans la liste du Calendrier de l’avent du domaine public.

la famille Fenouillard à la queue leu leu, le père , la mère et les deux filles
La Famille Fenouillard, Christophe (Public Domain)

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Georges Colomb, dit Christophe (1856-1945)

Georges Colomb, qui a choisi le pseudonyme de Christophe (en référence à son nom de famille !), est un homme étonnant.
Son passage par l’École normale supérieure et son emploi de professeur en sciences naturelles ne l’empêchent pas de débuter en 1887 une carrière de dessinateur pour Mon Journal puis pour Le Journal de la jeunesse.
En tant qu’enseignant, il  publiera une quarantaine d’ouvrages pédagogiques dans le domaine des sciences, ouvrages dans lesquels il défend une pédagogie active basée sur l’illustration.
Son parcours l’amènera à croiser le chemin de Marcel Proust à qui il enseignera les sciences naturelles au lycée Condorcet à Paris. Il sera également le professeur particulier des enfants Dreyfus qui, durant « l’Affaire », ne parvenaient pas à être scolarisés.
Après avoir été maître de conférences à la Sorbonne, Georges Colomb terminera sa carrière comme sous-directeur de laboratoire au Muséum d’histoire naturelle de Paris.

Précurseur de la bande dessinée

Christophe est considéré comme le précurseur de la bande dessinée en France. Ses personnages : la Famille Fenouillard, le sapeur Camember, le savant Cosinus, ou encore les lutins Plick et Plock, ont marqué leur époque.
Leurs aventures sont publiées dans un premier temps en feuilleton, puis réunies en albums. Elles rencontrèrent un grand succès et font référence encore aujourd’hui.

Christophe invente de nouvelles formes graphiques et de nouveaux procédés narratifs qui vont préfigurer le langage de la bande dessinée.

Les puristes du 9e art remarqueront que les bulles sont absentes, chaque vignette est en effet accompagnée d’un paragraphe de texte plutôt dense. C’est souvent le décalage entre ce texte plein d’allusions cultivées utilisant un vocabulaire recherché et un dessin au trait simple détaillant précisément des situations souvent ridicules qui déclenche l’hilarité.

Il est l’un des premiers à comprendre l’importance de l’enchaînement des images dont il s’amuse à varier les cadrages.

Un détail est remarquable et va à l’encontre des codes de la bande dessinée actuelle : les personnages des aventures de la Famille Fenouillard traversent le cadre des vignettes de droite à gauche dans le sens inverse de la lecture. Ce procédé est à l’image de leur périple qui s’effectue toujours à contre-courant et provoque ainsi de multiples catastrophes.

La Famille Fenouillard

Parue de 1889 à 1893 dans le Petit français illustré, la Famille Fenouillard raconte les aventures d’une famille de commerçants de province, entraînée malgré elle dans un tour du monde effréné.
Le père, Agenor, est un bonnetier retiré des affaires. Il se déplace toujours avec son épouse Léocadie et ses deux filles Artémise et Cunégonde.
Christophe se moque gentiment de ses personnages. Son humour satirique, toujours bon enfant, révèle néanmoins un sens aigu de l’observation de ses contemporains.

Serions-nous tous des Fenouillard ?

Une lecture originale des aventures de la Famille Fenouillard est proposée par Jean-Michel Hoerner dans la revue Herodote. Ce dernier considère l’album de Christophe comme annonciateur du tourisme actuel.
Dans son article « La Famille Fenouillard: une œuvre prémonitoire ? », il explique que : 
 

« Christophe, en bon observateur, perçoit ce que peuvent devenir les activités touristiques. […] On peut même dire qu’en choisissant cette famille provinciale de bonnetiers et le thème nouveau du tourisme, il nous offre une satire redoutable.
Nous serions donc des Fenouillard car, en grande majorité, nous appartenons aux classes moyennes et nous pratiquons le tourisme comme s’il s’agissait d’une seconde nature… [Christophe] pressent le tourisme comme l’un des futurs phénomènes de société, outil de promotion sociale à son époque, moyen de partager l’univers des plus riches aujourd’hui. »

Jean-Michel Hoerner

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Publié le 20/01/2016 - CC BY-SA 4.0

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