Jeanne d’Arc est une star de fiction dès les débuts du cinéma. Héroïne de fresques historiques qui glorifient la mémoire nationale, filmée comme une sainte, elle est aussi dépeinte dans toute son humaine condition. Jeanne d’Arc est l’un des personnages historiques les plus cités en arts et en politique dans l’histoire contemporaine. Balises vous donne un aperçu de la multiplicité de regards portés sur elle pour accompagner la rencontre « L’histoire est-elle une religion comme les autres ? » proposée par la Bpi en janvier 2023.
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Jeanne d’Arc est représentée dès 1895 par Thomas Edison, et en 1898 chez les frères Lumière. Depuis les débuts du cinéma, elle est apparue dans une centaine de films. Figure pop, politique et poétique, elle inspire des cinéastes très différents – mais presque tous masculins. Certains font d’elle une courageuse héroïne au service d’un histoire de France mythifiée, d’autres une icône religieuse qui donne à penser la notion de sacrifice, d’autres encore une jeune femme profondément humaine.
Une icône du roman national
L’imagerie populaire
Après la défaite militaire de 1870, Jeanne d’Arc est convoquée pour redonner une identité à une France privée de l’Alsace et de la Lorraine. En 1899, la société Lumière tourne une série de vues dans les régions de France, pour exalter la beauté et l’histoire du pays lors de l’Exposition universelle de 1900. Parmi la cinquantaine de lieux filmés se trouve, à Domrémy, la maison natale de Jeanne d’Arc. C’est dire si, dès les débuts du cinéma, Jeanne d’Arc est liée aux lieux qui ont fait l’histoire et à l’identité française.
Cette attention aux lieux est manifeste en fiction dans le Jeanne d’Arc de Georges Méliès, tourné en 1900. L’épopée et la chute de Jeanne d’Arc y sont résumées en douze plans, chacun se déroulant dans un lieu iconique : Domrémy, Orléans, Rouen… L’entrée à Orléans s’inspire du tableau de Jean-Jacques Scherrer (1887), reproduit dans de nombreux manuels scolaires. Déjà, en 1898, George Hatot filme L’Exécution de Jeanne d’Arc pour Lumière en insistant sur les décors grandioses, et en s’inspirant explicitement de la fresque de Jules-Étienne Lenepveu au Panthéon (1886-1890). Le film qu’Albert Capellani tourne pour Pathé en 1909 focalise le récit sur la foi de Jeanne, montrant en particulier des apparitions divines dans le décor pastoral où elle se sent appelée, et dans la prison où elle est tenue captive. Néanmoins, le chercheur François Amy de la Bretèque note que l’iconographie s’inspire là aussi de l’illustration scolaire.
La mise en scène des premiers films retraçant la vie de Jeanne d’Arc renvoie donc les spectateur·rices à l’histoire telle qu’iels l’ont apprise sur les bancs de l’école. Elle rappelle aussi l’iconographie sulpicienne, une imagerie religieuse alors à la mode. Outre une imagerie populaire, ces films adoptent des structures récurrentes, permettant aux spectateur·rices de reconnaître l’histoire d’un film à l’autre. L’enjeu n’est pas de poser un regard nouveau sur Jeanne d’Arc, mais d’entretenir une légende française.
Une icône
La condensation en tableaux de la vie de Jeanne d’Arc, caractéristique des films des premiers temps, est aussi symptomatique des hagiographies, remarque François Amy de la Bretèque. En effet, la vie des saint·es est le plus souvent racontée de manière discontinue, autour de quelques temps forts. Filmées sur le bûcher, Jeanne d’Arc devient une sainte, après avoir été martyre lors de sa captivité. D’ailleurs, Méliès ajoute une scène d’apothéose au paradis à la fin de son film. Jeanne d’Arc n’est pourtant canonisée par l’Église catholique qu’en 1920.
L’historien du cinéma Vincent Amiel envisage l’ensemble des films dont Jeanne d’Arc est le sujet, et souligne : « C’est sans doute l’un des éléments marquants qui rapproche les interprétations les plus diverses : le choix de poses, de gestes arrêtés, hiératiques, chez presque toutes les interprètes. Il est rare que Jeanne soit dans la bataille : elle est plus volontiers, par le biais du montage, détachée du mouvement, figure iconique plus que participante. »
Arrangements avec l’histoire
La construction d’une figure d’héroïne nationale suppose quelques arrangements avec l’histoire, malgré la volonté d’authenticité affichée par la plupart des cinéastes. Les réalisateurs mettent parfois en scène des thèses discutées et mises en doute par les historien·nes. Cecil B. DeMille en 1916, Marco de Gastyne en 1929 et Victor Fleming en 1948 décident ainsi que Jeanne d’Arc est victime d’une conspiration politique. Dans la version de Luc Besson en 1999, c’est plus précisément la belle-mère de Charles VII qui instrumentalise la mission de la Pucelle à son avantage. Dans Das Mädchen Johanna, de l’Allemand Gustav Ucicky (1935), l’héroïne se soumet totalement aux volontés de Charles VII, au travers duquel la figure d’Adolf Hitler transparaît. Joseph Goebbels, ministre de l’Éducation et de la Propagande du Troisième Reich, aurait suivi de près l’élaboration du scénario de ce film, sorti dans l’Allemagne nazie.
D’autres scénarios introduisent sciemment des événements fictifs. C’est le cas chez Ucicky, qui ajoute une épidémie de peste à l’histoire. Dans Joan the Woman, Cecil B. DeMille, quant à lui, fait apparaître le personnage d’un soldat anglais proche de Jeanne. Luc Besson, de son côté, met en scène le viol et le meurtre de sa sœur. Ces éléments imaginaires servent de moteurs au récit et à la vision politique que chaque film donne de la vie de Jeanne d’Arc.
Selon la chercheuse Évelyne Jardonnet, la Jeanne de Luc Besson est mue par un désir de vengeance après la mort de sa sœur, ce qui confère à son parcours une dimension intemporelle. À l’inverse, le film de DeMille, sorti pendant la Première Guerre mondiale, est une instrumentalisation patriotique assumée : Jeanne d’Arc apparaît à un soldat anglais et lui enjoint de se sacrifier pour sa patrie en accomplissant une mission suicide dans les tranchées adverses, comme elle l’a fait en son temps en allant combattre. « Il s’agissait de convaincre le public américain du bien-fondé d’une intervention des États-Unis dans le conflit européen », rappelle Évelyne Jardonnet. En 1929, le film de Marco de Gastyne consiste, lui, en la « glorification des soldats morts en sauvant la nation, au lendemain de la canonisation » de Jeanne d’Arc, explique Françoise Michaud-Fréjaville, directrice du Centre Jeanne d’Arc à Orléans.
Alors qu’il écrit le scénario de sa Passion de Jeanne d’Arc, Carl T. Dreyer change de collaborateur. Lui qui travaillait jusqu’à présent avec Joseph Delteil, auteur d’une biographie de la Pucelle, contacte Pierre Champion, qui vient de traduire en français le Procès de condamnation (1920). Revendiquant s’appuyer scrupuleusement sur les minutes du procès pour bâtir son récit, Dreyer choisit de filmer principalement des visages en gros plan, pour s’en tenir à ce qui fut prononcé et retranscrit. Le film est finalement muet, mais les bouches prononcent les mots tels qu’ils ont été traduits par Pierre Champion, et les intertitres restituent ces dialogues.
En 1962, Robert Bresson adopte la même précision documentaire pour raconter Le Procès de Jeanne d’Arc. Il s’appuie sur les minutes du procès pour tenter de faire table rase de l’imagerie johannique ayant préexisté à son film. Bresson opte pour des arrière-plans statiques qui permettent de se concentrer sur les échanges entre les personnages, et n’élimine pas les redites dans les dialogues. En outre, il choisit une actrice inconnue et non professionnelle, Florence Delay, afin que l’apparence et la persona de l’actrice n’orientent pas notre perception de Jeanne. L’attention documentaire de Bresson permet un nouveau regard sur Jeanne d’Arc, en soulignant notamment l’habileté avec laquelle elle manie la langue. Évelyne Jardonnet explique : « Le procédé rompt avec le cliché de la bergère gauche écrasée par l’habileté rhétorique de ses juges pour faire surgir l’image d’une résistante qui se meut avec une extraordinaire simplicité dans l’ineffable. »
La figure de sainteté
Contrairement à Bresson, Dreyer cherche à mettre en avant la souffrance de Jeanne et la dimension spirituelle de son parcours. Il opère des sélections en ce sens dans les minutes du procès : « L’interrogatoire a été recentré sur les questions de foi. Tout le registre anecdotique […] a été éliminé, de même que la dimension politique du destin de la Pucelle », remarque François Amy de la Bretèque. Une figure tragique de sainte se constitue par le biais de ces coupes, mais aussi grâce aux gros plans frontaux sur les visages, qui opposent l’expression éplorée et fragile de Jeanne aux masques ridicules et dominants des juges. Jeanne d’Arc est ici une martyre, une victime, là où elle se transforme, chez Bresson, en résistante.
Mythologie et humanité de Jeanne
Un idéal vain ?
Certains cinéastes n’opèrent que peu de choix dans ce qu’ils valorisent de la trajectoire et de la personnalité supposée de Jeanne d’Arc. Ce faisant, le personnage finit par s’absenter de lui-même, ne laissant place qu’aux projections des spectateur·rices. Ainsi : « La Jeanne de Fleming est l’exemple parfait d’une surface de projection sur laquelle sont plaqués tous les idéaux : féminin et masculin, militaire et religieux, humain et messianique. » Du personnage historique, il ne reste plus rien : dans le Joan of Arc de Victor Fleming (1948), Jeanne devient muse pour le cinéaste, pure star de cinéma pour les spectateur·rices, à l’image de celle qui l’incarne, Ingrid Bergman.
Le film de Luc Besson souligne à l’opposé (peut-être malgré lui) la vacuité de la figure de Jeanne d’Arc à la fin du 20e siècle : « Chez Besson en 1999, toutes les qualités prêtées jusque-là à Jeanne sont évacuées. Que reste-t-il à dire en effet d’une figure si souvent réutilisée pour servir des discours divers, voire opposés ? Après un ultime réemploi par le FN, Besson ne peut plus que témoigner de la vacuité de cette figure historique, distordue pour servir les propos d’un parti extrémiste. » Puisque l’on fait dire à Jeanne d’Arc tout et son contraire sur l’histoire et l’identité françaises, il ne reste qu’à l’extraire du contexte historique pour en faire un personnage perdu, sans volonté propre. Là encore, le regard d’un homme cinéaste sur l’héroïne se pose simultanément : Luc Besson filme Milla Jovovich, sa compagne de l’époque, comme un pur corps en mouvement, et fait incarner sa conscience, qui lui apparaît en captivité, par… un homme.
Une héroïne moderne
Si Jacques Rivette singularise lui aussi le personnage de Jeanne d’Arc, c’est plutôt pour lui rendre son humanité. Il la dépeint comme une figure moderne, qui s’interroge sur sa trajectoire. Évelyne Jardonnet souligne à ce propos les gestes répétitifs et parfois vides de sens effectués par Sandrine Bonnaire en Jeanne la Pucelle (1993), ainsi que la narration lâche qui sous-tend l’histoire. Jeanne, dans le film en deux parties de Rivette, sur plus de 5h30, n’est pas une héroïne : elle partage l’image à égalité avec d’autres personnages. Cette chronique met à plat le temps de l’histoire en entremêlant indifféremment les temps forts et le quotidien. Jacques Rivette donne de la chair à Jeanne d’Arc et de la complexité au réel dans lequel elle a évolué, lui ôtant toute aura épique.
Questionner la représentation
« Comment Jeanne d’Arc devient Jeanne d’Arc » : c’est ce que Bruno Dumont souhaite mettre en scène dans Jeannette, l’enfance de Jeanne (2017) et Jeanne (2019). La question concerne autant la trajectoire historique de la Pucelle d’Orléans que la manière dont son mythe s’est construit. En choisissant une Jeanne très jeune (l’actrice, Lise Leplat Prudhomme, a dix ans), en filmant la guerre comme un ballet, en mettant en musique les mots du Mystère de la charité de Jeanne d’Arc de Charles Péguy (1895), Bruno Dumont restitue le caractère incantatoire du poème dont il s’inspire : il montre comment le mythe intemporel de Jeanne d’Arc peut s’élever devant nos yeux.
Simultanément, en filmant en décors naturels, en mettant en scène des acteur·rices non professionnel·les, en captant un son direct et imparfait, il incarne et vivifie le mythe, lui donnant un caractère actuel, loin de toute dimension éthérée. Bruno Dumont utilise en outre du rock ou des chansons de Christophe dans sa narration, rendant l’histoire accessible et donnant au récit une puissance émotionnelle immédiate. Ce formalisme incarné et sensuel, qui oscille entre le présent et l’intemporel, revient à l’essence des mystères médiévaux, écrits pour capter l’attention du public et susciter son adhésion aux récits religieux relatés. Avec Jeannette et Jeanne, Bruno Dumont questionne notre foi en le récit et la puissance des histoires.
« Guérillero, patriote ou sainte, républicaine ou royaliste, laïque ou catholique, agent secret, martyre, victime d’imposture ou d’hallucinations, Jeanne d’Arc demeure une énigme sujette à diverses interprétations. A l’occasion du 600e anniversaire de sa naissance, ce livre apporte un regard nouveau sur la récupération du mythe qui a été faite depuis des décennies, dans le septième art et à la télévision.
De Jean Seberg, qui a failli brûler pendant le tournage du film d’Otto Preminger et ne s’est jamais totalement remise de ce rôle culte tourné à 19 ans, à la superproduction de Luc Besson, en passant par les adaptations les plus diverses réinterprétant notamment l’époque de l’occupation allemande, l’histoire de la Pucelle d’Orléans a toujours fasciné les réalisateurs. Qui sait que la vaillante Lorraine a été incarnée pas moins de 92 fois sur le grand et le petit écran ? Parmi ses interprètes, on découvre Alida Valli, Hedy Lamarr, Michèle Morgan, Julie Harris, Liselotte Pulver, Geneviève Bujold, Marthe Keller.
Cet ouvrage étudie pour la première fois, en plus des longs métrages de cinéma, les quelque 70 téléfilms que la télévision a consacrés à Jeanne dans le monde entier. Le petit écran véhicule notamment des images de Jeanne provenant des adaptations théâtrales (Shaw, Anouilh, Schiller, Brecht, Péguy, Anderson), des opéras (Verdi, Tchaikovski), du musical, du cinéma expérimental et même du dessin animé ! C’est cette galerie polychrome que ce livre déchiffre en étudiant la genèse, les motivations, le tournage et l’accueil des films, sans oublier le contexte politique ou artistique qui les a vus naître et qui a présidé à leur réalisation. »
Cette fiche pédagogique à destination des enseignant·es vise à aborder, par le biais de la figure johannique, la question de la place des femmes dans l’histoire, ainsi que les types de représentations et discours que cette place génère. Pour ce faire, le document propose l’analyse de plusieurs séquences clés tirées de célèbres films centrés sur Jeanne d’Arc : Joan the Woman de Cecil B. De Mille (1916), La Passion de Jeanne d’Arc de Carl T. Dreyer (1927), Joan of Arc de Victor Fleming (1946) et Jeanne d’Arc de Luc Besson (1999).
Pour les enseignant·es, les séquences peuvent être obtenues gratuitement auprès du service de médiation scientifique du CEC (mediation-cinema at unil.ch).
François Neveux (dir.)
Presses universitaires de Caen, 2012
L’historien du cinéma Vincent Amiel consacre un chapitre remarquable de l’ouvrage aux représentations de Jeanne d’Arc au cinéma, plus particulièrement aux films et aux séquences centrés sur son procès. Il commence par contextualiser les époques et les pays dans lesquels la figure de Jeanne d’Arc apparaît au cinéma. Il analyse ensuite la manière dont le choix des actrices qui interprètent Jeanne d’Arc influe sur ce qui ressort du personnage :
« leur type de jeu, leur aspect physique, au-delà des dialogues et situations écrites pour elles, éclairent ou révèlent les courants historiographiques. Nationalisme, féminisme, mysticisme s’y relaient avec la même fausse évidence que donne le cinéma aux choix les plus différenciés. »
L’ouvrage analyse les films de fiction et les documentaires qui ont véhiculé une image et une idée du Moyen Âge. Il propose une abondante filmographie commentée.
François Amy de la Bretèque, professeur en études cinématographiques, spécialiste du Moyen Âge au cinéma, consacre un chapitre entier à Jeanne d’Arc, « De l’idée de nation à l’idée de sainteté. L’âme et la conscience dans le contexte médiéval ». Il y détaille quatre formes de récits pour retracer l’itinéraire de Jeanne : la narration en tableaux, la fresque épique, la chronique et le modèle tragique.
Une étude sur la place du Moyen Âge dans les œuvres cinématographiques et sur les films qui ont pris cette période pour cadre, de 1895 à 2015. Analysant l’évolution de la représentation du Moyen Âge, cet essai démontre que ces films, outre leur caractère didactique, témoignent également des conditions sociales, économiques et politiques dans lesquelles le tournage s’est déroulé.
L’historien du cinéma François Amy de la Bretèque s’arrête en particulier sur le Jeanne d’Arc de Georges Méliès (1900) et sur La Passion de Jeanne d’Arc de Carl T. Dreyer (1928).
Martin Barnier et Rémi Fontanel (dir.)
Aléas, 2010
Cette ouvrage étudie les biographies filmées de personnages historiques tels que Alexandre le Grand, Cléopâtre, Jeanne d’Arc, Louis XIV ou Napoléon.
Évelyne Jardonnet, docteure en études cinématographique, y rédige le chapitre « Un vertige de représentations : Jeanne d’Arc ». Elle analyse notamment comment le contexte politique contemporain et l’imagerie populaire influent sur les films consacrés à ce personnage historique.
Dans cet ouvrage dirigé par Dominique Goy-Blanquet, professeure émérite de littérature élisabéthaine, spécialistes et critiques prononcent la mise en examen de l’histoire de Jeanne d’Arc par les arts.
Dans le chapitre « Épreuve par la Passion : philologie, film et idéologie dans la représentation de Jeanne d’Arc (1900-1930) », l’historienne du Moyen Âge Nadia Margolis établit les liens méthodologiques et thématiques entre l’histoire de Jeanne d’Arc rédigée par Jules Michelet en 1853, les minutes du procès de condamnation retranscrites par Pierre Champion (1920), les biographies écrites Anatole France (1908) et Joseph Delteil (1925), et le film de Carl T. Dreyer (1928).
La professeure en études cinématographiques Robin Blaetz rédige le chapitre « La vedette de l’écran : Jeanne d’Arc au cinéma ». Elle analyse les raisons pour lesquelles Jeanne d’Arc est la figure historique la plus représentée au cinéma, évoque la manière dont les cinéastes ont travaillé les reconstitutions historiques, et explique comment la production de chaque film s’est mise en place, de L’Exécution de Jeanne d’Arc par Georges Hatot en 1898 jusqu’à Jeanne la Pucelle de Jacques Rivette en 1993.
Frédéric Bas, professeur d’histoire et critique de cinéma, propose une traversée en images des films représentant Jeanne d’Arc, « femme la plus représentée de l’histoire, héroïne la plus malmenée du 20e siècle, et femme qui a le plus inspiré les cinéastes », de Georges Méliès à Bruno Dumont en passant par Hubert Viel.
Cet article en ligne a également été publié en 2001 au sein de l’ouvrage Le Moyen Âge vu par le cinéma européen, qui constitue les actes du colloques organisé par le Centre européen d’art et de civilisation médiévale et la Société des lettres, sciences et arts de l’Aveyron, à Conques le 22 et 23 avril 1994.
Françoise Michaud-Fréjaville, directrice du Centre Jeanne d’Arc à Orléans, y porte un regard d’historienne sur les faits johanniques représentés dans les fictions. Elle montre par exemple comment les modes et les coutumes filmées sont avant tout celles des époques des tournages. Les représentations du Moyen Âge se conforment également à des clichés. Il s’agit parfois de servir un point de vue politique. Françoise Michaud-Fréjaville montre ainsi les liens entre récits johanniques et Première Guerre mondiale, du patriotisme à la consolation. D’autres fois, les représentations font écho à d’autres œuvres. Le sacre de Charles VII, par exemple, est filmé comme celui de Napoléon peint par David. Les visages des juges, eux, sont filmés par Dreyer d’après les représentations produites dans le nord de l’Europe au 15e siècle.
Si ces parallèles historiques sont intéressants, l’analyse filmique reste relativement manichéenne, confinant parfois au contresens narratif et esthétique.
À la Bpi, niveau 3, 791.044 CAH
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