Un plan national de lutte contre la maladie de Lyme a été lancé, en 2016, par le Ministère de la santé. Cette maladie est une maladie infectieuse transmise par une morsure de tique, qui peut entraîner des pathologies graves, surtout si elle n’est pas traitée rapidement. La complexité de cette maladie, ses manifestations sporadiques et changeantes, et la grande diversité des infections qui l’accompagnent, ne facilitent pas le diagnostic et le consensus entre médecins… En effet, la maladie de Lyme est aujourd’hui au coeur d’une vaste controverse de santé publique en France. Le point sur le sujet en 5 chapitres.
Le plan d’action 2016 du ministère de la santé contre la maladie de Lyme
La ministre des affaires sociales et de la santé, Marisol Touraine a lancé, le 29 septembre 2016, un Plan national de lutte contre la maladie de Lyme et les maladies transmises par les tiques. Ce plan prévoit d’informer le public, améliorer la prise en charge des patients et mieux connaître ces pathologies, avec quelques mesures phares :
Elaboration d’une cartographie du risque et de la répartition des tiques en France et recherche de mesures contre leur prolifération ;
Information des promeneurs (mise en place de panneaux d’information à l’orée des forêts) et développement de la communication à destination du public (affiches, dépliants…) ;
Formation des professionnels de santé et mise en place d’un protocole national de diagnostic et de soins ;
Ouverture, en 2017, de centres de prise en charge spécialisés ;
Développement de la recherche afin d’améliorer les tests diagnostiques et les soins.
Le plan du ministère ne prend pas position dans la controverse sur la détection de la maladie et l’efficacité des soins, mais souligne les enjeux importants de santé publique, notamment en évoquant “le sentiment d’abandon et l’errance thérapeutique auxquels sont confrontés des malades de Lyme”. Autre fait nouveau : L’admission envisagée de la maladie de Lyme dans les affections de longue durée. Un comité de pilotage accueillant les acteurs institutionnels, mais aussi les associations de soutien aux patients doit permettre de concrétiser les actions à mener.
Le nom de “maladie de Lyme” provient de la ville d’Old Lyme aux USA, où elle est apparue en 1977. L’affection est causée par des “borrelia”, bactéries en forme de spirale, transmises lors de la morsure de tique. Dans ce cas, on la nomme également “borreliose de Lyme”. Or, il existe plusieurs formes de “borrelia” et plusieurs types de bactéries qui se manifestent de diverses façons… En outre, la tique peut transmettre plusieurs microbes à la fois, provoquant d’autres maladies telles que la “babesiose” (qui ressemble à la malaria) ou “l’encéphalite à tiques”… Pour compliquer le tout, la maladie peut rester dormante pendant des mois, voire des années et se manifester à intervalles irréguliers… Ainsi, la liste des symptômes est quasiment sans fin : cela va de la fatigue chronique, avec fièvre et maux de tête, jusqu’à des manifestations beaucoup plus invalidantes, comme des douleurs articulaires ou des paralysies, en passant par des difficultés de mémoire ou des troubles du sommeil… C’est pourquoi certaines études parlent plus généralement de “maladies vectorielles à tiques” ou de “syndrome global de Lyme”. On appelle souvent la maladie de Lyme, la “grande imitatrice”, ou la “maladie caméléon” car ses manifestations peuvent être confondues avec d’autres pathologies. Il existe cependant un signe clinique objectif de la maladie de Lyme : Il s’agit d’une affection cutanée apparaissant de 3 à 30 jours après la morsure de tique, l’érythème migrant (tâche rouge en forme d’anneau) mais qui, malheureusement n’est pas systématique.
La maladie de Lyme n’est pas une maladie émergente. Elle avait déjà été décrite au XIXe siècle. Mais elle semble se développer de manière inédite. En France, le réseau “Sentinelles” (créé en 1984 et regroupant 1300 médecins généralistes), estime le nombre de cas à 33 202 en 2015, soit 51 personnes sur 100 000. Il n’existe pas encore de cartographie détaillée des populations de tiques. Celles-ci sont présentes sur tout le territoire, avec quelques zones plus touchées, comme le centre et l’est de la France. Elles sont plus rares sur le pourtour méditerranéen et au-delà de 1 500 mètres d’altitude.
Prévenir la maladie de Lyme
Que faire pour éviter les piqûres de tiques ?
Connaître les périodes et les endroits “à tiques” : les tiques préfèrent les espaces humides, boisés, les talus, les hautes herbes des prairies et tous les endroits où circulent en grand nombre des animaux (animaux sauvages ou d’élevage). Les tiques sont surtout actives au printemps et en automne.
Porter des vêtements couvrants, même l’été (bras et jambes protégés, chemises à manches longues, chaussures hautes, chaussettes couvrant les bas de pantalon)
Rester sur les chemins (éviter les hautes herbes et les zones broussailleuses)
Inspecter soigneusement son corps après chaque sortie et se doucher.
Utiliser des répulsifs, en particulier pour certaines professions (agriculteurs, forestiers…).
Que faire après avoir été piqué par une tique ?
Pour décrocher la tique, éviter d’appliquer un produit (alcool, éther) mais la retirer avec un tire-tique (disponible en pharmacie), en tournant légèrement par un mouvement de dévissage.
Une fois la tique retirée, désinfecter soigneusement la plaie. Toutes les tiques ne sont pas infectées et toute piqûre ne veut pas dire maladie. Il est conseillé cependant de conserver la tique au congélateur, dans un petit pilulier. Ceci permettra d’identifier les germes qu’elle contient si, d’aventure, la maladie se déclarait.
Surveiller l’endroit de la piqûre : L’agence régionale de santé Alsace recommande de surveiller la piqûre jusqu’à 8 semaines et d’aller consulter son médecin traitant en cas de signes d’infection (le plus souvent : érythème migrant ou certains symptômes proches de la grippe : fièvre, migraine, grande fatigue…).
Détecter et soigner la maladie de Lyme : les éléments du débat
En France, le protocole officiel de détection et de soins pour la borréliose de Lyme, a été défini en 2006 par une conférence de consensus.
Cette conférence a suscité de nombreuses critiques portant essentiellement sur le diagnostic clinique et l’existence de symptômes persistants – ou non – après le traitement.
En ce qui concerne le dépistage : la sérologie imposée par la conférence de consensus a été critiquée pour plusieurs raisons : le premier test a été mal calibré ; il est parfois réalisé beaucoup trop tôt ; il ne détecte pas toutes les espèces de borrélia et néglige les infections croisées avec d’autres bactéries ou virus apportés par les tiques… La sérologie permet uniquement de mesurer les anticorps que l’organisme a créés pour combattre la maladie. Or, certains malades, déjà immunodéprimés, ne développent pas d’anticorps… En outre, les borrélia développent des capacités de camouflage dans l’organisme qui les rendent parfois quasiment indétectable… Selon Muriel Vayssier-Taussat ; microbiologiste à l’INRA, les tests réglementaires sont peu fiables. Il existe, certes, d’autres tests, mais non suffisamment évalués et il faudra sans doute plusieurs années avant de voir arriver sur le marché des tests plus efficaces En ce qui concerne les méthodes de soins, les principales critiques de la conférence de consensus portent sur la complexité de la maladie et la non-reconnaissance des formes chroniques de Lyme. La ligne officielle recommande, en effet, une antibiothérapie courte, de 2 à 3 semaines. Or, s’il est vrai que de nombreux patients peuvent être efficacement soignés par antibiothérapie en traitement précoce, que faire lorsque la maladie perdure ? lorsque des patients, non détectés par les tests officiels, se retrouvent exclus du traitement ? Ces critiques émanent de médecins, de chercheurs, mais aussi de patients et de leur famille, qui se sont regroupés au sein d’associations, comme “France Lyme” ou “Lyme sans frontières”.
On l’a vu, la maladie de lyme est complexe et soulève de nombreuses questions, d’où la nécessité de développer la recherche. Outre les incertitudes sur les raisons de la prolifération des tiques, le recensement des malades et la recherche de tests plus performants, de nombreuses questions restent en suspens : existe-t-il d’autres modes de transmission de la maladie ? est-il vrai, comme l’avancent certains experts, qu’elle peut être transmise parfois par des moustiques, puces, punaises ou aoûtats ? existe-t-il des dangers de transmission par le don du sang ? et qu’en est-il des risques de transmission de la mère à l’enfant in utero ? Deux projets de recherche semblent particulièrement prometteurs : le projet OH Ticks, porté par l’INRA, qui a pour but de découvrir les agents pathogènes transmis par les tiques afin de proposer des tests adaptés, mener des recherches sur un éventuel vaccin anti-tiques, et le projet “One Health” qui souligne le lien entre santé animale, santé humaine et santé environnementale. Cette recherche transversale et interdisciplinaire, porte sur les vecteurs de maladies comme les tiques, les microbes transmis à la fois aux humains et aux animaux, et l’effet des pollutions environnementales sur la santé globale.
La Vérité sur la maladie de Lyme : infections cachées, vies brisées, vers une nouvelle médecine
Christian Perronne
Odile Jacob, 2017
Médecin et infectiologue, le Pr Christian Perronne relate son parcours de praticien confronté à la souffrance des patients atteints de Lyme ou d’autres maladies transmises par les tiques. Il explique, de manière claire et détaillée, les recherches actuelles sur la maladie et les traitements disponibles.
À la Bpi, niveau 2, en catalogage
L'Affaire de la maladie de Lyme : une enquête
Roger Lenglet et Chantal Perrin
Actes Sud, 2016
Tour d’horizon sur la maladie de Lyme, en expansion dans le monde. Une enquête documentée, fruit de plusieurs années d’investigation.
À la Bpi, niveau 2, 616.94 PER
Le Syndrome de Lyme : le comprendre pour le vaincre : une approche et des réponses nouvelles à cette maladie émergente et pandémique
Christophe Girardin-Andréani
Dauphin, 2015
Christophe Girardin-Andréani explore d’autres sources possibles de contamination de la maladie de Lyme : transmission par voie sexuelle, par transfusion sanguine ou de la mère à l’enfant. Aux multiples symptômes de la maladie, s’ajoutent les intoxications et déficiences immunitaires liées aux pollutions environnementales.
À la Bpi, niveau 2, 616.94 GIR
Soigner Lyme & les maladies chroniques inexpliquées; Why can't I get better ?
Richard Horowitz
T. Souccar, 2014
Le Dr Richard Horowitz, soigne depuis près de 30 ans aux Etats-Unis des personnes souffrant de maladies vectorielles à tiques et se définit lui-même comme un “détective médical”. À partir de l’examen attentif du patient, il pratique un “diagnostic différentiel” permettant d’étudier chaque symptôme un à un pour trouver le chemin de la guérison. Ce livre est la synthèse de son expérience.
Site collaboratif constitué de malades, soignants et aidants pour la recherche et le partage de connaissance sur la maladie de Lyme en France, ainsi que les co-infections et les maladies vectorielles à tiques.
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