Ce 12 juillet 2017, nous célébrons le bicentenaire de la naissance d’Henry David Thoreau, le célèbre auteur de Walden ou la vie dans les bois. Du nature writing américain à certains romans d’anticipation, c’est toute la littérature occidentale qui porte aujourd’hui encore la marque de ce penseur naturaliste, partisan d’une vie faite de simplicité et de solitude, et théoricien d’une désobéissance civile parfois nécessaire pour libérer l’individu face à une société industrielle et à ses institutions jugées aliénantes.
Cette sélection invite à un parcours dans les bois — que ceux-ci soient nourriciers, menaçants, sauvages ou domestiqués — dans un imaginaire libertaire dominé par la figure de Thoreau.
Sélection de références
L'Amant de Lady Chatterley
D. H. Lawrence
Le Livre de Poche, 2008
Au lendemain de la Grande Guerre, Constance Chatterley s’ennuie. Son mari, riche propriétaire terrien revenu paralytique et impuissant, n’est que l’ombre de lui-même. C’est loin des salons monotones, au plus profond des bois, que Lady Chatterley va renaître. Dans les bras de Mellors, le garde-chasse au charme sauvage et viril, elle découvre irrésistiblement la sensualité et le plaisir au gré d’une passion foudroyante.
En faisant de la forêt le lieu vibrant de la transgression conjugale et sociale, L’Amant de Lady Chatterley fit voler en éclat les tabous de l’époque. Jugé pornographique et obscène, le roman fut censuré à sa sortie et il fallut attendre le début des années 1960 (soit trente ans après la mort de D. H. Lawrence !) pour pouvoir le lire dans son intégralité.
A la Bpi, niveau 3, 820″19″ LAWR 1
Un balcon en forêt
Julien Gracq
José Corti, 1958
A l’automne 1939, l’aspirant Grange rejoint son lieu d’affectation, dans une maison forte située au cœur de la forêt ardennaise. C’est dans cet îlot suspendu et brumeux qu’il va vivre la drôle de guerre, en compagnie d’une poignée d’hommes isolés. Véritable écrin de verdure hors du temps, la forêt se mue alors en un espace irréel et inquiétant, hanté par la vie intérieure des soldats. Sublime et mystérieux, Un balcon en forêt développe une rare poétique de la marge, à la lisière du sacré et de l’immémoriel.
A la Bpi, niveau 3, 840″19″ GRAC 4 BA
Le mur invisible
Marlen Haushofer
Actes Sud, 1985
En une nuit, la narratrice du Mur invisible se retrouve coupée du monde, dans le pavillon de chasse des amis chez qui elle passait quelques vacances. A peine a-t-elle le temps de s’interroger sur la mystérieuse paroi transparente apparue soudainement tout autour de la forêt ou sur la raison pour laquelle toute vie semble figée derrière celle-ci : il faut commencer à s’organiser pour survivre.
Entre la robinsonnade et le récit post-apocalyptique, le roman de Marlen Haushofer s’offre d’abord comme une chronique austère de la vie dans les bois, qui implique chaque jour de chasser, cueillir ou cultiver sa subsistance. Au-delà, le rapport de la narratrice à sa solitude contrainte esquisse un éloge de la vie en retrait de la société des hommes, et peut même se lire comme une ode à l’émancipation féminine.
A la Bpi, niveau 3, 831 HAUS.M 4 WA
Le livre de Yaak : chronique du Montana
Rick Bass
Gallmeister, 2007
La vallée de la rivière Yaak, dans le nord du Montana, est un des espaces les plus sauvages des Etats-Unis. Essentiellement peuplée par des coyotes et des grizzlys, elle abrite tout de même une centaine d’habitants, parmi lesquels l’écrivain Rick Bass qui lui a consacré une grande partie de son oeuvre. Le livre de Yaak, chronique d’un quotidien fait d’austérité et de patience, d’ennui parfois, retrace le lent passage des saisons et les nombreux instants d’émerveillement de l’homme face à la nature.
A cette vie toute de lenteur s’oppose l’urgence qui préside à l’écriture du livre, plaidoyer pour la préservation de la vie sauvage. Dans la lignée des grands noms du nature writing, de John Muir à Edward Abbey, Rick Bass nous alerte aussi sur les dangers qui pèsent sur sa vallée… Et livre un beau témoignage élégiaque de ce monde sur le point de disparaître.
A la Bpi, niveau 3, 821 BASS 4 BO
Promenons-nous dans les bois
Bill Bryson
Payot & Rivages, 2013
Se retirer dans la forêt comme Henry David Thoreau est déjà une chose… Mais entreprendre une randonnée de plus de 3500 km au long des Appalaches, sur la côte Est des Etats-Unis en est encore une autre ! Surtout quand on sait à peine planter une tente et qu’on a une peur bleue de tomber nez à nez avec un ours…
Embarquant avec lui un vieil ami plus porté sur les donuts et les séries télé que sur les baies sauvages et les couchers de soleil, Bill Bryson se lance à corps perdu dans cette drôle d’aventure. Il en tire une chronique de voyage qui, sous sa grande drôlerie, rappelle à quel point l’homme peut se sentir humble face à la nature… Et invite à aller se confronter – avec un minimum de préparation – à ses manifestations les plus exceptionnelles.
A la Bpi, niveau 3, 795.0(73) BRY
La face cachée de la Lune
Martin Suter
C. Bourgois, 2000
Urs Blank est de ces hommes à qui tout réussit : avocat, huppé, mondain, il est en pleine ascension sociale dans la haute société genevoise. Mais il suffit d’une rencontre pour que son quotidien bascule. En l’initiant aux champignons hallucinogènes, la jeune Lucile va révéler en lui un autre homme, déshumanisé, à l’instinct sombre et animal. Perdant peu à peu le contrôle de sa vie, Urs trouve refuge dans la forêt, dont il apprend progressivement à maîtriser la nature hostile et sauvage.
Fable psychédélique et pastorale, La face cachée de la Lune porte parfaitement son titre, en référence au célèbre album des Pink Floyd. Martin Suter nous fait découvrir avec habileté la face cachée d’une société au capitalisme triomphant, dont la véritable nature s’avère aussi inquiétante qu’incontrôlable. Ouvrons les yeux : l’homme des bois guette inlassablement l’homme civilisé.
A la Bpi, niveau 3, 832 SUTE 4 DU
Soudain dans la forêt profonde
Amos Oz
Gallimard, 2006
La forêt est-elle un enfer vert ou un paradis perdu ? La question se pose inévitablement au cours de l’aventure de Maya et Matti, les deux jeunes héros de Soudain dans la forêt profonde. Alors que tous les animaux ont disparu de leur village et de ses environs, emmenés par un esprit de la forêt, les deux enfants vont braver tous les interdits et découvrir l’origine de cette curieuse malédiction…
En s’appuyant sur l’imaginaire collectif qui entoure la forêt des contes, de celle du Petit Poucet à celle de Robin des bois, Amos Oz signe une superbe fable poétique aux airs de légende immémorielle et aux multiples niveaux de lecture, qui parle aussi bien de préservation de la nature que du devoir d’entretenir le souvenir de ceux qui ont disparu.
A la Bpi, niveau 3, 892.4 OZ. 4 PI
Une forêt profonde et bleue
Marc Graciano
José Corti, 2015
Dans les romans de Marc Graciano, la forêt est un lieu véritablement hors du monde obéissant à ses propres règles, à sa propre logique qui mêle la cruauté des lois de la nature à un réalisme magique puissamment onirique. Dans Une forêt profonde et bleue, c’est une forêt médiévale, peuplée de bandits de grand chemin et de barbares qui sert de décor à la rencontre entre une femme victime de ceux-ci et d’un mage qui va l’aider à se reconstruire. Nimbée de mystères, profondément menaçante car inexplorée, la forêt devient aussi, paradoxalement, un refuge loin de la fureur des hommes, sublimé par le style méticuleux et ciselé de Graciano.
A la Bpi, niveau 3, 840″20″ GRAC 4 FO
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