Questions/Réponses

Pouvez-vous me conseiller des études ainsi que des romans récents sur les dystopies ?

« Avant toute chose, il importe de définir le genre dystopique parmi une série de genres narratifs similaires et superposables : catastrophisme apocalyptique, uchronie, science-fiction, antiutopie, etc. Essayons la configuration suivante : la dystopie est un lieu imaginaire, un ailleurs dans l’espace, mais plus souvent dans le temps, situé dans un futur relativement proche, où la situation a empiré par rapport au présent, où les maux du monde se sont aggravés, où la condition des hommes est parvenue à un point extrême. Il s’agit donc du contraire de l’utopie, représentation idéale du meilleur des mondes, tandis que la dystopie tient du côté noir et plus négatif du fantastique. »

couverture du roman Le pouvoir de Naomi Alderman

​Cette définition est une citation de l’article  « Postface   Fins du monde. Configurations et perspectives du genre dystopique » par Francesco Muzzioli, de l’indispensable volume collectif suivant :

(Bé)vues du futur : Les imaginaires visuels de la dystopie (1840-1940).
Clément Dessy,  (dir.), Valérie Stiénon (dir.), Presses universitaires du Septentrion, 2015. 
Disponible à la Bpi via Open edition.
Aujourd’hui inscrite au cœur des cultures télévisuelle et adolescente, la dystopie possède une histoire riche pourtant méconnue. Cette forme d’expression qui mêle projection dans le futur et vision critique d’une société révèle les enjeux majeurs des époques qu’elle a traversées. Explorer ses caractéristiques visuelles sur un siècle, de 1840 à la Seconde Guerre mondiale, permet d’observer les lignes de forces d’un imaginaire central dans la littérature et les arts. L’imaginaire dystopique ne touche pas seulement à l’iconographie. Il concerne aussi les ressources textuelles de la description, la circulation transmédiatique des fictions et la définition même d’un univers souvent improprement qualifié par les étiquettes de fantastique et de science-fiction.
Ce volume collectif abondamment illustré offre un aperçu chronologique empruntant ses approches à l’analyse de texte, à l’étude de l’image fixe ou animée, à la sociologie des auteurs et de l’édition, ainsi qu’à l’histoire des représentations. Il se centre sur les aires d’expression française, qui ont leurs propres spécificités, distinctes des réalisations anglo-saxonnes. Envisageant tant les œuvres paralittéraires que celles d’avant-garde, il met à l’honneur une production foisonnante, encore peu étudiée : de Souvestre à Bartosch, sans oublier Henriot et Robida, de l’eschatologie biblique à la poétique des ruines de la ville moderne, en passant par l’archéologie rétrofuturiste et l’imaginaire des fourmis.
Pour accéder à la table des matières

Lire Margaret Atwood : The Handmaid’s Tale.
Presses universitaires de Rennes, 1999  
Disponible à la Bpi via Open edition.
Ce recueil bilingue consacré à l’écrivain canadien Margaret Atwood, reconnue comme l’une des figures dominantes de la littérature d’expression anglaise, contient l’intervention qu’elle a prononcée à Rennes en novembre 1998 sur son roman The Handmaid’s Tale (La Servante écarlate) et sur le genre auquel il appartient. Le roman, inscrit aux programmes 1999 du CAPES et de l’agrégation d’anglais, a été l’un des plus grands succès littéraires des années 80 aux États-Unis, au Canada et en Grande-Bretagne. Utopie, dystopie, satire, ou fiction spéculative, ce texte au scénario terrifiant s’inscrit à l’intérieur du courant postmoderne. Cet ouvrage rassemble des études du roman qui ont été présentées en décembre 1998 au colloque Margaret Atwood organisé par le Centre d’études canadiennes de Rennes. Les auteurs analysent le texte sous différents éclairages : ils explorent les rapports entre littérature et société, politique et poétique, langage et organisation de la cité, et examinent les stratégies de détournement mises en œuvre.
Voir  « Amours et désamours en dystopie : The Handmaid’s Tale » Taïna Tuhkunen-Couzic, p. 89-99

Apocalypses ! une brève histoire de la fin des temps
Alex Nikolavitch Racunica, Les moutons électriques, 2012
Essai sur les récits de fin du monde contemporains et leurs sources historiques et scientifiques. L’auteur revient sur les résurgences et variations du mythe et ses significations dans les époques et cultures, ses relations avec les religions, les discours qui lui sont liés. Godzilla, l’Antéchrist, la crise financière, le calendrier maya, les super-héros sont notamment évoqués.
À la Bpi, niveau 1, GE LIT N

Les Nouvelles formes de la science-fiction [actes du colloque de Cerisy, 2003]
Roger Bozzetto,  Gilles Menegaldo, Stephan Martinière, ed. Braguelonne, 2006
Réunissant universitaires, écrivains, éditeurs et critiques de SF fantasy, ce colloque a montré que la science-fiction se distancie des utopies, des idéologies et des mythes de l’ancien âge d’or en revisitant les univers archaïques, les mythes et les légendes, comme le démontre l’essor de la fantasy.
Ces questions sont abordées à travers la littérature, le cinéma et le film d’animation.
À la Bpi, niveau 3, 81-61 NOU

Apocalypses sans royaume : politique des fictions de la fin du monde, XXe-XXIe siècle
Jean-Paul Engelibert,  Garnier, 2013
Cet ouvrage traite des fictions ayant pour thématique la fin du monde et réfléchit sur ces représentations de l’histoire achevée, qui inventent des tragédies où l’humanité est placée sous son propre regard critique.
À la Bpi, niveau 3, 840(091) »19″ ENG

 « De 1984 à 2084. Mutations de la peur totalitaire dans la dystopie européenne »
Régis-Pierre Fieu, Carnets, 11 | 2017, en ligne
Autres temps, autres peurs. Lors de la rédaction de 1984, Georges Orwell voyait se profiler le spectre des totalitarismes après la Seconde Guerre Mondiale. Un futur sombre pour un monde cauchemardesque, dans lequel l’individu est dissout dans la communauté, l’amour est absent, l’obéissance un devoir et la surveillance totale. Si les dystopies qui se sont développées à la suite d’Orwell se sont chacune intéressées à une particularité de l’idéal sociétal (le bonheur, la famille par exemple), 2084 est certainement celle qui se réclame le plus de 1984. Pourtant le monde décrit par Boualem Sansal est en apparence bien différent car théocratique et sans technologie forte. Mon propos sera pourtant de montrer que le roman dystopique de Boualem Sansal est une suite directe de 1984 et que cette mutation de l’univers dystopique de Georges Orwell est un signal d’alarme lancé par Sansal à une Europe en déclin.

« Les dystopies, cauchemars éclairés »Le Magazine Littéraire, 2012/7 (N° 521), p. 10-10. consulter l’article


Un dernier livre repéré dans le catalogue collectif Sudoc :
Pourquoi des dystopies ?
Nathalie Labrousse, Éditions M. Editer. 2010
Notice complète

Sur internet

Vous trouverez également des ressources internet susceptibles de répondre à vos interrogations en suivant les liens suivants : Pearltrees d’A. Neng sur les genres en science-fiction (un pearltree est un outil web qui permet d’organiser, d’explorer et de partager des contenus numériques)

ReS Futurae : site de la Revue d’études sur la science-fiction
Ce site est en ligne sur la plateforme OpenEdition qui recense environ 350 revues universitaires en texte intégral (revues.org), des collections de livres en sciences humaines et sociales, des carnets de recherche (hypotheses.org), un agenda scientifique. Sans abonnement, la consultation est libre en format HTML.
Res Futurae propose également via hypotheses.org son carnet de recherche, pour accompagner la revue d’études. 
Voir par exemple le résultat de recherche pour le terme dystopie

Romans récents

Pour compléter ces références, voici une sélection de romans parus ces dernières années :

Le Pouvoir
Naomi Alderan, Editions Calmann-Lévy, 2018
À quoi ressemblerait le monde si les hommes craignaient dorénavant les femmes ? Naomi Alderan imagine dans Le pouvoir que les femmes découvrent un jour qu’elles peuvent blesser voire tuer par une simple pression du doigt. Les effets sont retentissants : les femmes ne se laissent plus intimider, des violeurs sont punis, des régimes politiques rétrogrades sont renversés. Si les premiers effets de ce changement profond sont positifs, rapidement, ce nouveau pouvoir entraîne des excès…

Zones de divergence
John Feffer, EditionsInculte, 2017
Il y a trente ans, en 2020, l’universitaire Julian West a publié un best-seller visionnaire, Zones de divergence, qui anticipait les  catastrophes survenues depuis : le réchauffement climatique, la montée des nationalismes, la propagation du terrorisme islamiste, la fin de l’État-nation. Désormais, l’Europe saturée de réfugiés s’est effondrée ; le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine se sont disloqués ; Washington a été détruit par l’ouragan « Donald » en 2022… Au crépuscule de sa vie, le vieil homme qui veut saluer une dernière fois sa femme et ses trois enfants entame un tour du monde pour les retrouver. Depuis le fond de son lit, West traverse les cinq continents sous la forme d’un avatar numérique et ne peut que constater la triste réalité de ses prédictions les plus noires et dystopiques…
 

The Only Ones
Carola Dibbell, Le Nouvel Attila, 2017
Dans une Amérique ravagée par les pandémies, Moïra est « the only one », immunisée contre toutes les maladies mortelles. Pauvre, analphabète, elle survit sur les docks du Queens en vendant des bouts de son corps à ceux assez riches pour payer, qui espèrent ainsi se protéger des épidémies à leur tour. Un jour, elle donne naissance à un clone : terrifiée, n’ayant jamais vu d’enfant de sa vie, tout juste capable de s’occuper d’elle-même, elle va devoir protéger sa fille des dangers de ce monde. Après une vie entière passée seule, sans famille, sur les quais froids et humides du Queens, Moïra a beaucoup vécu mais ignore beaucoup…

Les Mandible : une famille, 2029-2047
Lionel Shriver, Editions Belfond, 2017
Autrefois superpuissance, les Êtats-Unis est devenu en 2029 un état paria – dévasté par la crise écologique et la dette nationale – au grand bonheur de Vladimir Poutine. Comme toutes les familles américaines, Mandible vivent au jour le jour, mais lorsque le président déclare le pays en faillite, la survie remplace la débrouillardise. Combien de temps avant que la solidarité ne laisse place à la colère et à la haine ? Combien de temps avant que la famille Mandible ne s’écroule ?

Pour une liste de romans plus anciens, voir une précédente réponse, sur le site Eurêkoi.org

Eurêkoi – Bibliothèque publique d’information

Publié le 29/01/2018 - CC BY-SA 3.0 FR

Rédiger un commentaire

Les champs signalés avec une étoile (*) sont obligatoires

Réagissez sur le sujet