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Appartient au dossier : La Chine, sur la voie de la puissance

Quand la Chine soigne son image

Pour renforcer son influence à l’international et servir sa stratégie politique et économique, la Chine présente son propre récit qu’elle fait évoluer. Barthélémy Courmont, directeur de recherche à l’IRIS sur l’Asie-Pacifique, a sélectionné trois images, reflets d’une ambition chinoise, pour accompagner le cycle « Quelle diplomatie chinoise au XXIe siècle ? » à l’automne 2022 à la Bpi.

Dès octobre 1949, les dirigeants de la République populaire de Chine ont compris l’importance de la représentation de ce pays à l’international et ont fait évoluer son image en parallèle des développements économiques et politiques. Ainsi, l’image fut toujours au cœur des préoccupations du régime, mais elle s’est adaptée aux réalités du moment.

Les trois photos sélectionnées illustrent les grandes phases de la stratégie de communication de la Chine, des années Mao Zedong à la glorification de son histoire plurimillénaire et son patrimoine exceptionnel, en passant par l’image d’un pays moderne et dynamique. Mettant en avant des discours et des représentations très différents, ces trois phases n’en sont pas moins complémentaires et se superposent tandis que la Chine est engagée dans une stratégie de soft power officialisée dès 2007.

Le maoïsme mondialisé

Portrait de Mao
L’imagerie maoïste – @Barthélémy Courmont

Dès les années cinquante, la Chine cherche sa place et prend ses distances avec la bipolarité de la Guerre froide en initiant le mouvement des non-alignés au sommet de Bandung en 1955. Mais c’est surtout avec la Révolution culturelle (1965-1975) et le culte de la personnalité de Mao Zedong que la Chine cherche à mettre en avant son idéologie. Les images des gardes rouges brandissant fièrement le Petit Livre rouge, recueil de pensées du « Grand timonier » traduit dans de nombreuses langues, sont diffusées dans le monde entier en misant sur une iconographie célébrant la gloire du maoïsme.

Cette stratégie de communication très politique vise à unir les Chinois autour de leur dirigeant, mais elle se diffuse également très largement à l’international dans un contexte favorable de contestations politiques dans le monde occidental, et Mao Zedong incarne la Chine dans le monde jusqu’à sa mort en 1976.

Un pays moderne et dynamique

Panorama de la ville de Shangai
Les tours du quartier de Pudong, Shanghai © Chungking, via DepositPhotos

Les modernisations entreprises par Deng Xiaoping dès 1978 marquent le point de départ de l’irrésistible montée en puissance économique de la Chine, mais aussi un changement dans l’image que Pékin souhaite mettre en avant. Accédant d’abord au statut d’« usine du monde » puis de puissance économique de premier plan, la Chine attire les investisseurs du monde entier et, sans renier la nature de son régime, offre le spectacle de sa modernité. Les Jeux olympiques de Pékin de 2008 et l’Exposition universelle de Shanghai de 2010 furent autant de vitrines de cette dynamique et de la puissance de l’économie chinoise.

Le quartier de Pudong, à Shanghai, est l’un des symboles de ce renouveau, avec sa forte concentration de gratte-ciels à l’architecture futuriste et audacieuse. À l’instar de la ville de Shenzhen à proximité de Hong Kong et de nombreuses autres agglomérations, Pudong a connu des mutations inouïes en trois décennies et son paysage urbain est devenu l’une des plus célèbres images de la Chine contemporaine, générant de multiples superlatifs.

Le patrimoine et les traditions à l’honneur

Longtemps identifiées comme des « vieilleries » par l’idéologie maoïste, les traditions et le patrimoine chinois font depuis le début des années deux-mille l’objet d’une immense campagne de réhabilitation et de restauration. L’objectif est de rendre leur fierté aux Chinois et de faire rayonner la culture chinoise à l’international.

Au programme : inscriptions en série au patrimoine mondial de l’Unesco, rénovations de vieux quartiers et de bâtiments historiques longtemps restés à l’abandon, mais aussi remise à l’honneur de l’histoire de la Chine impériale, du bouddhisme et du confucianisme. Le concept de Tianxia (tout sous un même ciel), vieux de trois mille ans, est de son côté exhumé pour traduire l’engagement accru de la Chine sur la scène internationale, présenté comme inclusif, notamment avec ses « nouvelles routes de la soie » ou ses Instituts Confucius. La Chine met ainsi en avant sa civilisation riche et plurimillénaire pour justifier son statut de grande puissance, et son patrimoine s’ajoute ainsi à l’idéologie et l’économie.

Homme déchargeant des briques et des parpaings
Reconstruction d’un quartier dans un style « traditionnel » Crédits : @Barthélémy Courmont

Publié le 27/09/2021 - CC BY-SA 4.0

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