Questions/Réponses

Appartient au dossier : Handicaps : vers une société inclusive ?

Quel rôle et quelles protections pour l’aidant·e d’une personne en situation d’handicap ?

Une utilisatrice d’Eurêkoi, service de réponses et recommandations à distance assuré par des bibliothécaires, s’interroge sur le rôle des aidant·es de personnes en situation de handicap. Ont-iels un statut juridique ? Sont-iels soutenu·es et soulagé·es ? Les bibliothécaires de la Cité de la santé lui fournissent des éléments de définition et de réflexion sur ces bénévoles de l’« aidance », alors que se déroule à la Bpi le cycle de rencontre « Handicaps : une vie à part ? ».

main d'un aidant serrant celle d'une personne en fauteuil
Photo : Melpomene, via Depositphotos, DR

En France, près de 11 millions de personnes, parfois très jeunes, prennent chaque jour soin d’un·e proche âgé·e, malade ou handicapé·e, indique l’ouvrage Aidants, ces invisibles (2019) d’Hélène Rossinot. Mais qui sont ces « aidant·es » ? Font-iels l’objet d’une reconnaissance officielle, juridique en particulier, qui leur accorde un statut, un accès à des moyens ou un aménagement de leur propre vie ? Voici quelques éléments de définition, de législation, mais aussi des témoignages et dispositifs de soutien existants, pour mieux appréhender ce champ si vaste, si complexe et si fondamental aujourd’hui de l’« aidance ».

Des appellations diverses pour des impacts juridiques différents

« Le terme d’“aidants” est parfois associé à différents adjectifs qui contextualisent l’aide apportée : “familiaux”, “naturels”, “proches”, “informels”, “non professionnels”. […] Ces définitions ont en commun de souligner le caractère non professionnel de l’aide, sa régularité, et son origine dans une situation de manque ou de perte d’autonomie d’un proche.
Les aidants sont le plus souvent des membres de la famille, ce qui implique une dimension affective très forte de leur engagement à l’égard de leur proche. S’agissant des personnes âgées de 60 ans ou plus vivant à domicile, les conjoints et enfants représentent 80 % des aidants. Lorsque la personne vit seule à domicile, près de 10 % des aidants peuvent également être des amis ou des voisins.
S’agissant des personnes bénéficiaires de l’allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) ou de la prestation de compensation du handicap (PCH) âgées entre 20 et 59 ans et vivant à domicile, il s’agit pour plus de la moitié d’entre eux de leur conjoint, parent(s), enfant(s) ou frère(s) et sœur(s).
Les amis ou voisins sont une aide dans au moins 11 % des situations.
Enfin, en 2015, 37 % des proches aidants étaient en emploi et 5 % en recherche d’emploi. Les aidants en emploi représentent ainsi 15 % de la population active. »

« Répit des aidants », note de cadrage de la Haute autorité de santé (HAS), validée le 5 juillet 2022.

D’autres sources précisent et hiérarchisent certains de ces termes.

Le·a proche aidant·e

« Le terme de “proche aidant” s’est aujourd’hui imposé dans le débat public pour désigner les personnes qui apportent de l’aide à une personne de leur entourage en raison de son état de santé, d’un handicap ou de son âge. Les proches aidants sont donc ceux qui ne sont ni aidants professionnels, ni bénévoles présents aux côtés de la personne aidée via une association. Le terme de “proches aidants“ est plus large que celui d’“aidants familiaux”, puisqu’il ne suppose pas de lien familial entre aidant et aidé. »

« Qui sont les proches aidants et les aidés ? », dans le dossier « Les proches aidants ou des solidarités en action », Actualité et dossier en santé publique (ADSP) n°109, décembre 2019.

L’aidant·e familial·le

« L’aidant familial est “la personne non professionnelle qui vient en aide à titre principal, pour partie ou totalement, à une personne dépendante de son entourage, pour les activités de la vie quotidienne. Cette aide régulière peut être prodiguée de façon permanente ou non et peut prendre plusieurs formes, notamment : nursing, soins, accompagnement à l’éducation et à la vie sociale, démarches administratives, coordination, vigilance permanente, soutien psychologique, communication, activités domestiques…” ».

Charte européenne de l’aidant familial, avec le soutien de la Confédération des organisations familiales de l’Union européenne (Coface).

Une distinction affirmée entre aidant·e professionnel·le et proche aidant·e 

Le site d’information officiel pour les personnes en situation de handicap et leurs aidant·es, monparcourshandicap.gouv.fr, définit l’aidant·e dans son glossaire, insistant sur le caractère non professionnel de cette « aidance ».

Le terme d’« aidant·e », employé seul, est également réservé aux aidant·es non professionnel·les dans « Les aidants : définitions et éléments de contexte », annexe 1 du rapport Soutenir les aidants en levant les freins au développement de solutions de répit, d’Émilie Fauchier-Magnan, Bertrand Fenoll et Olivier Toche, de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), 2022-032r, décembre 2022.
Selon ce même texte, les « aidant·es professionnel·les » interviennent « dans le cadre d’une relation contractuelle : emploi direct ou fourniture d’une prestation délivrée notamment par un service d’aide à domicile ». Le rapport s’appuie sur la définition des aidant·es apportée par la Haute autorité de santé (HAS) :

« Les aidants dits naturels ou informels sont les personnes non professionnelles qui viennent en aide à titre principal, pour partie ou totalement, à une personne dépendante de leur entourage pour les activités de la vie quotidienne. Cette aide régulière peut être prodiguée de façon permanente ou non et peut prendre plusieurs formes, notamment le nursing, les soins, l’accompagnement à la vie sociale et au maintien de l’autonomie, les démarches administratives, la coordination, la vigilance permanente, le soutien psychologique, la communication, les activités domestiques, etc. »

Recommandations de bonnes pratiques. Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : suivi médical des aidants naturels, HAS, 2010.

Un document de 2014, émis par l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et des services sociaux et médico-sociaux (ANESM) résume quelles sont les personnes pouvant être considérées comme aidant·es :

« Les aidants peuvent être des membres de la famille restreinte ou élargie (parent, conjoint(e), frère/sœur, tante/oncle, nièce/neveu, etc.), du cercle amical et/ou de l’entourage (voisin, gardien d’immeuble, etc.). En outre, les aidants sont aussi bien considérés dans leur filiation à la personne aidée (“fille de”, “père de”, “mère de”, “frère de”, etc.) que dans leur statut social (homme/femme, citoyen/militant, membre de la famille/ami, etc.). »

Enfin, d’après la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), près de 20 % des proches aidant·es ne sont pas des membres de la famille mais des ami·es, des voisin·es ou d’autres proches qui entretiennent des liens étroits et stables avec la personne aidée. La DREES propose également une infographie sur les aidant·es.

Les droits du ou de la proche aidant·e

Une reconnaissance juridique de l’aidant·e familial·le…

« Est considéré comme un aidant familial, pour l’application de l’article L. 245-12, le conjoint, le concubin, la personne avec laquelle la personne handicapée a conclu un pacte civil de solidarité, l’ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu’au quatrième degré de la personne handicapée, ou l’ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu’au quatrième degré de l’autre membre du couple qui apporte l’aide humaine définie en application des dispositions de l’article L. 245-3 du présent code et qui n’est pas salarié pour cette aide. Lorsque la prestation est accordée au titre du 1° du III de l’article L. 245-1, est également considéré comme aidant familial, dès lors qu’il remplit les conditions mentionnées à l’alinéa précédent, le conjoint, le concubin ou la personne avec laquelle un parent de l’enfant handicapé a conclu un pacte civil de solidarité ainsi que toute personne qui réside avec la personne handicapée et qui entretient des liens étroits et stables avec elle. »

Code de l’action sociale et des familles (CASF), article R245-7, version en vigueur depuis le 12 mai 2008.

… mais non-reconnaissance du ou de la proche aidant·e

Dans la partie consacrée aux définitions juridiques, l’article « Qui sont les proches aidants et les aidés ? », du dossier « Les proches aidants ou des solidarités en action », Actualité et dossier en santé publique (ADSP) n°109, décembre 2019 souligne une distinction existante entre proches aidant·es.

« Pour les personnes handicapées, par contre, la notion de “proche aidant” n’est pas reconnue par les textes. Le Code de l’action sociale et des familles (CASF) comporte uniquement une définition d’“aidant familial”, dans le cadre de la prestation de compensation du handicap (PCH). »

Il précise que l’article 51 de la loi 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement (loi ASV) a introduit dans le CASF une définition de ce qu’est un “proche aidant” auprès d’une personne âgée :

« Selon l’article issu de la loi ASV, l’aide doit donc être “régulière et fréquente” et apportée “à titre non professionnel.” On notera que cela n’exclut pas que le proche aidant soit rémunéré pour l’aide qu’il apporte. C’est par exemple possible au sein du dispositif de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), comme pour l’aidant familial au sein de la prestation de compensation du handicap (PCH). »

Les dispositifs de soutien

Des mesures institutionnelles 

Le site du Ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées liste des actions pour soutenir les aidant·es, mises en place depuis 2020 par le gouvernement français, en lien avec Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) :

« – La création du congé proche-aidant, entré en vigueur le 1er octobre 2020, qui permet aux aidants salariés du secteur privé, aux fonctionnaires, aux indépendants et aux demandeurs d’emplois de bénéficier de congés pour accompagner leurs proches et de bénéficier d’une allocation journalière de proche aidant (AJPA) (plus d’informations sur le site service-public.fr) ;
– L’élargissement et la revalorisation de ce congé proche aidants et de l’allocation journalière du proche aidant ;
– La publication d’un guide à l’attention des entreprises sur les actions en faveur des aidants salariés ;
– Le déploiement du numéro 0 800 360 360 et des communautés 360, à destination des personnes handicapées et de leurs aidants ;
– Une mission confiée à France Stratégie afin d’encourager les entreprises à davantage soutenir leurs salariés aidants à travers des actions de sensibilisation, de formation et d’adaptation du temps de travail au titre de la responsabilité sociale d’entreprise (RSE) ;
– Le développement, sur tout le territoire, de solutions de répit et de vacances pour les proches aidants avec aujourd’hui 252 nouveaux lieux ;
– Un renforcement du financement des offres de soutien psychologique et de formation à destination des aidants, en lien avec la CNSA ;
– Le déploiement du label Cap’Handéo, valorisant les entreprises engagées auprès des salariés aidants ;
– La création du guide Besoin de répit : 17 fiches-repère pour les aidants, présentant les principales solutions de répit proposées à l’échelle nationale et dans les territoires ;
– L’expérimentation d’actions de sensibilisation des professionnels de l’Éducation nationale aux problématiques des jeunes aidants, en Île-de-France et en Occitanie. »

Le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), « Soutenir les aidants en levant les freins au développement de solutions de répit » (décembre 2022), propose un panorama détaillé des solutions de répit proposées, mais souligne « l’absence d’un financement pérenne » pour ces initiatives.

Une offre de soutien par les associations

Le Groupe de réflexion et réseau pour l’accueil temporaire des personnes en situation de handicap (GRATH) association créée en 1997 par des professionnel·les et des parent·es pour développer les solutions d’accueil temporaire pour soulager les aidant·es, propose aussi une rubrique « Aider les aidants » sur son Portail de l’accueil temporaire et des relais aux aidants.

Une permanence téléphonique Allo-aidants de la Maison des aidants (membre du conseil d’administration de l’association La journée nationale des aidants et du collectif Je t’aide) apporte soutien et écoute aux aidant·es.

Depuis 2021, le collectif Je t’aide propose également un kit pour informer et trouver les meilleures solutions pour les aidant·es comme pour les aidé·es. Créé en 2015 et composé de 26 structures membres, le collectif répond à trois objectifs principaux : faire avancer les droits des aidant·es, les rendre plus visibles et transformer la société afin qu’elle agisse auprès des aidant·es.

Des témoignages de proches aidant·es

L’Association nationale Jeunes AiDants Ensemble (Jade) propose quelques témoignages sur son site, comme celui de Martin :

« On vit tous au rythme de mon père. (…) Je l’aide tant que je peux. Indirectement, c’est ma mère que je soutiens. Elle ne fait jamais rien pour elle, mon père occupe tout son temps. Si elle s’écroule, c’est catastrophique. (…) Je suis un peu l’aidant de l’aidante.
Martin, 15 ans, dont le père est en situation de handicap suite à un accident ».

Anne-Sophie Tricard, maman d’une grande prématurée ayant de nombreuses séquelles physiques, raconte son quotidien sur Enfant-différent (un des projets de l’association Une souris verte)

Le site Entre-Aidants propose des témoignages en vidéo de parent·es d’enfants handicapé·es, qui abordent différents thèmes : le rôle des associations, les interventions des professionnel·les, les besoins d’un·e aidant·e, mais aussi comment rebondir, trouver de l’aide.

Plusieurs aidant·es s’expriment sur leur rôle auprès d’un·e proche âgé·e sur le Portail national d’information pour les personnes âgées et leurs proches.

Les aidants ces proches indispensables du quotidien de Claudie Kulak (Nouvelle Cité, 2021), est un ouvrage de témoignages, accompagnés de conseils.

Eurêkoi, Bibliothèque de la Cité des sciences et de l’industrie – BSI, Questions santé

Publié le 27/03/2023 - CC BY-SA 4.0

Pour aller plus loin

Une sélection de sites sur la thématique « Autonomie et handicaps », par la Cité de la santé | cite-sciences.fr, décembre 2022

Une sélection de sites Internet sur les handicaps sensoriels, moteurs, psychiques et mentaux, le polyhandicap… et les aidant·es.

Des livres à la bibliothèque de la Cité de la Santé

Guide de survie des proches aidants : conseils pratiques pour soutenir sans s'épuiser

Michelle Arcand et Lorraine Brissette
Éditions de l'Homme, 2022

Les autrices examinent toutes les facettes du rôle d’aidant·e : des étapes inéluctables, les attentes, mais aussi les façons de se ménager, de préserver la vie de famille, de l’articuler avec les soins extérieurs…

Aider les aidants : faire vivre un lieu de répit

Arlette Loher-Goupil
Chronique Sociale, 2021

L’autrice propose des repères pour mieux vivre la relation avec la personne aidée, en particulier grâce aux lieux de répit, un service qui tend à se répandre sur l’ensemble des territoires. Des éléments concrets sont présentés pour s’investir dans l’animation d’un tel espace. © Électre, 2021

Également à la Bpi, niveau 3, 365.7(076) LOH

Aider les aidants : prévenir les risques physiques des aidants, assurer la sécurité et le confort des aidés

Marc Ventura
Grancher, 2020

L’auteur décrit la gestuelle adaptée et les aides techniques adéquates dans diverses situations d’aidance. 200 dessins aident à la compréhension.

Également à la Bpi, niveau 3, 615.4(076) VEN

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