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Appartient au dossier : Le génocide rwandais, vingt ans de publications

Témoigner du génocide

Une littérature de témoignage abondante accompagne les études universitaires et les enquêtes journalistiques dans la compréhension des faits génocidaires.
Elle mélange les récits écrits directement par les rescapés tutsi et les témoignages recueillis par les observateurs étrangers. Elle éclaire aussi différents points de vue: celui des victimes, et celui des bourreaux.
Riche de mots, d’expériences et de tragédies, cette littérature raconte l’indicible et évoque, avec âpreté et humanité, l’horreur que fut ce “génocide des voisins”. 

Sommaire
Paroles de rescapés Paroles de bourreaux L’impuissance des témoinsCeux qui n’ont pas tuéCeux qui ont résistéFocus sur… des ressources multimédias 

Paroles de rescapés

Prendre la parole pour dire l’expérience de l’extermination : ces ouvrages aspirent à l’impossible. Souvent insoutenables, ces récits d’hommes, de femmes ou d’enfants rescapés disent toute la souffrance de ceux qu’on appellent parfois “les morts qui marchent”, ces morts dont la mort n’a pas voulu… Corps souillés, coupés à la machette, fugitifs tapis parfois plusieurs semaines dans les marais, témoins du massacre de leur famille, traqués par ces extrémistes hutu qui partageaient leur vie… Ces livres mettent des mots sur l’abjection. Ils libèrent la parole de rescapés après, souvent, plusieurs années de silence. En filigrane, ils disent aussi la culpabilité des survivants.
Aujourd’hui, on estime que les trois quarts de la population tutsi rwandaise ont été décimées. 

nu de la vie

Dans le nu de la vie : récits des marais rwandais.
Jean Hatzfeld. Photographies de Raymond Depardon.
Seuil, Paris, 2000
Sur les collines de Nyamata, un petite ville du Rwanda, Jean Hatzfeld tisse des liens d’amitié et de confiance avec des rescapés tutsi. Avec leurs mots, ils racontent ce qu’ils ont vécu. Ces témoignages d’enfants, de femmes et d’hommes, souvent seuls survivants de leur famille, atteignent une portée universelle.
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) HAT

antilopes

La stratégie des antilopes : récits
Jean Hatzfeld.
Seuil, Paris, 2007
De retour à Nyamata, Jean Hatzfeld fait le récit de la libération de milliers de hutus, sortis de prison en vue du procès en réconciliation. Aborde la question du pardon et de la coexistence des victimes avec leurs bourreaux, hantées par leurs mémoires mais poussées par la nécessité de continuer à vivre malgré tout. 
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) HAT

survivantes

Survivantes : Rwanda, dix ans après le génocide.
Esther Mujawayo.
Editions de l’Aube, La Tour-d’Aigues, 2004
Esther, tutsi, sociologue de 44 ans, mère de trois filles, a échappé à la tuerie avec ses enfants alors que sa famille et son mari ont été massacrés. Après avoir repris des études, elle poursuit sa mission de thérapeute spécialisée dans les traumatismes psychiques d’après génocide et raconte son parcours.
À la Bpi, niveau 2. 309 (673) MUJ

blessures du silence

Les blessures du silence. 
Yolande Mukagasana. Photographies Alain Kazinierakis. 
Actes Sud, Arles, 2001.
Yolande Mukagasana, rescapée, a perdu son mari et tous ses enfants. Avec le photographe Alain Kazinierakis, elle sillonne les collines du Rwanda à la recherche des survivants. Elle visite aussi des prisons pour y rencontrer des tueurs. Un livre qui évoque les blessures intérieures des survivants, mais aussi celles des prisonniers qui plaident coupable.
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) MUK

inyenzi

Inyenzi ou les Cafards
Scholastique Mukasonga.
Gallimard, Paris, 2006
Un récit autobiographique sur le Rwanda postcolonial, où prédomine le remords des survivants. La culpabilité de la narratrice se traduit par des multiples cauchemars.
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) MUK

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Paroles de bourreaux 

En la matière, les témoignages recueillis par Jean Hatzfeld évoquent la « banalité du mal » qui caractérise ce génocide entre voisins.
Souvent sans remords et d’un calme à toute épreuve, les tueurs, ces hommes ordinaires de Nyamata, évoquent les massacres à la machette, les viols, les nourrissons découpés et les traques dans les marais comme un « boulot » qui pouvait « égayer leur journée« , car « tuer était moins échinant que cultiver« . Ils aimaient à l’occasion boire une « Primus » ou jouer au football avec leurs voisins tutsi, avant qu’ils ne les tuent. L’amitié ou la camaraderie n’a que très rarement empêché les massacres; de même que le niveau d’instruction : notable, instituteur ou paysan, ils ont tous tué. 
Jean Hatzfeld évoque également l’organisation mise en place par les autorités locales ou militaires: dans chaque village, il y avait les « encadreurs » et les « exécutants », plus ou moins zélés. Sans cette hiérarchie et la pression engendrée par la « communauté des tueurs” (qui promettait la mort à quiconque n’obéissait pas), ce génocide des voisins n’aurait pas été si fulgurant ni si meurtrier.   
Au cœur de cette barbarie apparaît, furtivement, la figure de quelques justes : celui qui a sauvé son épouse, ou celui qui a caché un bébé.

une saison de machettes

Une saison de machettes 
Jean Hatzfeld, Seuil, Paris, 2003
Le livre met en scène une bande de dix amis, génocidaires hutu. Jean Hatzfeld met en évidence les mécanismes qui transforment les hommes en bourreaux sans conscience.  
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) HAT

Pour aller plus loin, vous pouvez consulter l’article de Claudine Vidal  « Grands tueurs et petits tueurs: la question de l’obéissance dans le génocide des Rwandais tutsis », in Obéir, désobéir, La Découverte, 2008
Disponible à la Bpi, base de données CAIRN. Postes multimédias.

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L’impuissance des témoins 

Qu’ils soient travailleurs humanitaires, journalistes ou officiers de l’Onu, ces observateurs étrangers écrivent pour témoigner, hantés depuis leur retour par ces massacres qu’ils n’ont pu empêcher.

romeo dallaire

J’ai serré la main du diable : la faillite de l’humanité au Rwanda. 
Roméo Dallaire. Avec la participation du Major Brent Beardsley. 
Libre Expression, Montréal, 2004
C’est avec le poids du génocide que le général Dallaire, responsable de la mission des Nations Unies au Rwanda en 1994, doit vivre. Brisé, il décrit l’enfer de sa mission, son impuissance à arrêter le génocide et la faillite de la communauté internationale, coupable d’indifférence malgré les appels à l’aide répétés de son représentant sur place.
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) DAL

gourevitch

Nous avons le plaisir de vous informer que, demain, nous serons tués avec nos familles : chroniques rwandaises.
Philip Gourevitch.
Gallimard, Paris, 2002
Les milliers de témoignages recueillis par ce reporter du New Yorker donnent une indéniable profondeur à cet ouvrage, qui allie enquêtes journalistiques, récits de survivants et interviews de génocidaires rencontrés dans un camps de réfugiés au Zaïre. Un compte-rendu détaillé est sur le site « Africultures ».
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) GOU

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Ceux qui n’ont pas tué

Notre regard sur le génocide rwandais a longtemps été biaisé, réduisant les massacres de masse commis à l’encontre des tutsi à une guerre tribale à laquelle l’ensemble des hommes hutu auraient participé. 
Pour démentir cette idée, Claudine Vidal cite dans son article sur les tueurs l’étude du chercheur Scott Straus, qui a étudié « les caractéristiques de l’ensemble des participants au génocide. Voici les principaux résultats de cette étude. Il propose une estimation du nombre des participants située entre 175 000 et 210 000, ce qui représente 14 à 17 % de la population masculine hutue (et 7 à 8 % de la population active, âgée de 18 à 54 ans, selon les critères du recensement de 1991) C’est donc une minorité, mais une minorité importante qui a trempé dans les massacres. » 
De plus, résister à l’acte de tuer était risqué: « il y avait des amendes pour les récalcitrants, leurs maisons furent pillées et détruites, ceux qui furent pris à tenter de protéger des tutsis furent abattus« .
De nombreux hutu sont pourtant restés à l’écart des tueries. Certains ont payé des amendes aux interahamwe pour y échapper. D’autres sauvèrent des voisins, mais aussi des tutsi traqués qu’ils ne connaissaient pas, au péril de leur vie.

Giti

Giti et le génocide rwandais.
Léonard Nduwayo.
L’Harmattan, Paris, 2002
La commune de Giti est la seule ville rwandaise où aucun tutsi n’a été tué pendant le génocide. Léonard Nduwayo analyse les raisons historiques et politiques qui ont permis aux tutsi de Giti d’être épargnés: de nombreux mariages mixtes, des autorités locales pacificatrices. Malgré tout, ses habitants hutu y ont été massacrés au retour du FPR. L’auteur, originaire de ce village, évoque ces faits.
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) NDU

Un compte-rendu du livre, par Jean-Pierre Chrétien et Marcel Kabanda , a été publié dans « La revue des livres », Politique africaine, 2004 (N° 93).

Et pour aller plus loin, lire la contribution de Scott Straus : « L ‘échec de l’opposition locale au génocide rwandais », in La résistance aux génocides, Presses de Sciences Po , 2008

Consultable à la Bpi, base de données CAIRN, sur les postes multimédias.

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Ceux qui ont résisté

A travers tout le Rwanda, de nombreux tutsi et hutu modérés luttèrent pour leur vie et résistèrent à la violence génocidaire. 
Lieu symbolique de la résistance, la commune de Bisesero reflète les stratégies mises en place pour échapper aux interahamwe. Quelques 50 000 assiégés se réfugièrent ensemble au coeur des collines escarpées qui entouraient la ville. Ils désignèrent des chefs pour diriger des opérations de combats, développer des tactiques d’offensive militaire et dérouter l’ennemi, malgré la faiblesse de leurs armes (bâtons, pierres). 
Malgré ces actes héroïques et des luttes incessantes, les tueurs arrivèrent le 13 mai et massacrèrent près de 30 000 personnes en deux jours. A l’arrivée du FPR en juillet, il ne restait qu’un peu moins d’un millier de personnes.
Dans son ouvrage L’inavouable, la France au Rwanda, le journaliste Patrick de Saint-Exupéry évoque la tragédie de Bisesero. Ses collines furent le symbole de la résistance, mais aussi le  point d’ancrage de la polémique entourant les agissements de l’opération Turquoise au Rwanda. 

inavouable

L’Inavouable : la France au Rwanda. 
Patrick de Saint-Exupéry.
Les Arènes, Paris, 2004.
Patrick de Saint-Exupéry, journaliste au Figaro, se trouve au Rwanda en 1994. Témoin du génocide tutsi, il aborde dans cet ouvrage le rôle de la France et les ambigüités militaires et humanitaires de l’opération Turquoise.
À la Bpi, niveau 2. 328 (673) SAI

Pour aller plus loin, lire l’article « Bisesero » d’Émilie Martz-Kuhn, sur le site « Génocides et politiques mémorielles » hébergé par l’Université Paris 1.

moisson de cranes

Moisson de crânes. Textes pour le Rwanda. 
Abdourahman Ali Waberi. 
Le serpent à plumes, La Madeleine-de-Nonencourt , 2000
L’écrivain tchadien Nocky Djedanoum organise chaque année le festival Fest’Africa. Il a initié le projet collectif  « Rwanda : écrire par devoir de mémoire ». Dix écrivains y proposent une nouvelle, un essai, un reportage, en hommage aux victimes du génocide. 
Un compte-rendu détaillé est sur le site « Africultures ».
À la Bpi, niveau 3. 846.3 WABE 4 MO 

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Focus sur… des ressources multimédias 

Un site internet :

africultures

Le site « Africultures« : dédié aux cultures et aux arts africains. Met en valeur l’actualité culturelle du continent noir. 
Les articles sur les parutions liées au Rwanda sont ici.

Des bibliographies sélectives sur : 

Des films documentaires, à visionner sur les postes multimédias de la Bpi : 

mon voisin

Mon voisin, mon tueur.
Anne Aghion.
Gacaca productions, 2009.
Quinze ans après le génocide se mettent en place les tribunaux « Gacaca », qui visent à « réconcilier » les rescapés et les tueurs. Le film suit deux femmes dont les familles ont été décimées. Elles doivent affronter leurs bourreaux, sortis de prison. Les récits poignants et dignes des unes font face à la lâcheté des autres.

Et, de la même réalisatrice:

Gacaca, revivre ensemble au Rwanda.
Anne Aghion.
Gacaca productions, 2002.

Au Rwanda… On dit, la famille qui ne parle pas meurt.
Anne Aghion.
Gacaca productions, 2004.

À Ntongwe, 16 000 prisonniers, anciens génocidaires hutu en attente de jugement, sont relâchés. La réalisatrice suit l’un d’entre eux, qui retourne dans son village. Il côtoie chaque jour, parmi ses voisins tutsi, ceux qui l’ont accusé. Parviendront-ils à surmonter leur haine et leurs blessures profondes?

un cri 2

Rwanda, un cri d’un silence inouï.
Anne Lainé.
Palindromes, France 5, Little Bear, 2003.

Le film alterne la parole de rescapés et des entretiens avec des médecins psychiatres. Les témoignages, précis, détaillés, filmés sobrement, disent le désarroi des survivants du génocide. 

Des émissions de radio:

france inter

En 2004, l’émission de reportages « Là bas si j’y suis » proposait une série de onze émissions sur le génocide rwandais.

Parmi elles, « Valentine » : En mai 1994 à Nyarubuyé, près de la frontière tanzanienne, le journaliste Daniel Mermet et son équipe découvrent par miracle, dans un charnier, une jeune tutsi de 13 ans, Valentine. Elle se cache des tueurs depuis 40 jours.  Après le récit de son calvaire et de son sauvetage, nous suivons son lent retour à la vie.

La même émission consacrait deux heures au témoignage du général Roméo Dallaire, commandant de la Minuar pendant le génocide.

france culture

« Quand la littérature devient expression de mémoire« 
Une rencontre avec l’écrivaine rwandaise Scholastique Mukasonga
sur France Culture.

rfi

« Romans et histoires au Rwanda » 
Une rencontre proposée par l’émission « Mémoire d’un continent« ,
sur RFI, autour des écrivains rwandais qui ont raconté le génocide.

Des vidéos : 

  • Une interview de la chercheuse Hélène Dumas, invitée par France 24 à l’occasion de la sortie en librairie de son ouvrage : Le génocide au village: le massacre des Tutsi au Rwanda, Editions du Seuil, Paris, 2014.
  • Un reportage diffusé sur Arte: Rwanda, les enfants du génocide

La bande dessinée raconte aussi le génocide :


Si le génocide a inspiré de nombreuses oeuvres littéraires et cinématographiques, quelques bédéistes ont également abordé le sujet. 
Le site « africultures » propose un état des lieux de la production africaine et européenne.

stassen

Le belge Jean Philippe Stassen lui a consacré une trilogie : 

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Publié le 05/05/2014 - CC BY-SA 4.0