Un diagnostic pour 8 % des projets
La loi de 2001 sur l’archéologie préventive vise à l’équilibre des rapports entre la protection du patrimoine archéologique et le nécessaire aménagement du territoire. Dans chaque collectivité, le service régional d’archéologie (SRA), en charge du respect du Code du patrimoine, examine les projets de constructions déposés par les aménageurs. Il s’appuie notamment sur la carte d’archéologie nationale, un inventaire informatisé des vestiges archéologiques découverts, et sur la programmation nationale de la recherche archéologique élaborée à partir des orientations du Conseil national de la recherche archéologique (CNRA).
En cas de forte présomption de vestiges archéologiques présents sous la surface concernée, le service d’architecture peut demander une modification du projet de construction afin de laisser la zone intacte et préserver ainsi la donnée archéologique. Il peut également demander un diagnostic en vue de fouilles. Seulement 8 % des projets font l’objet d’un diagnostic. L’Inrap ou un service de collectivité territoriale agréé procède par sondages sur 5 à 10 % de la surface concernée et rédige un rapport, adressé au SRA de la région pour l’éclairer sur les suites à donner. Les projets d’aménagement différés pour fouilles représentent 2 % des surfaces à aménager. Plus rarement, l’obligation d’intégrer les vestiges archéologiques dans le projet final est prononcée.
Un nouveau rapport à l’archéologie
Jusque dans les années quatre-vingt, il était possible de réaliser de grands projets sans se soucier de la préservation d’un passé national souvent jugé insuffisamment remarquable. Avec la loi de 2001, l’archéologie dite de sauvegarde change d’échelle. Elle devient préventive et son financement incombe aux aménageurs. La collecte de nombreux d’objets, y compris les plus humbles, qu’elle a permise, constitue une richesse documentaire fondamentale pour une analyse fine du passé.
D’autre part, l’archéologie préventive repose sur la présomption d’intérêt contrairement à l’archéologie programmée qui travaille sur des lieux et des types de vestiges identifiés. Les fouilles préventives peuvent donc déboucher sur des découvertes archéologiques inattendues, de nature à apporter un nouvel éclairage sur les connaissances du passé des civilisations ou du paysage.
L’archéologie préventive a modifié le rapport au patrimoine archéologique : le site étant voué à la destruction pour rendre possible l’aménagement à terme, la richesse documentaire prime sur les objets ou l’architecture. Quand aux objets extraits du site d’origine, ils intègrent souvent les collections des musées régionaux pour incarner l’histoire du territoire et faire patrimoine. De plus, l’augmentation du nombre de sites fouillés a permis à l’archéologie préventive d’élargir le champ d’études à des temps moins anciens, en explorant des sites datant de la Seconde Guerre mondiale par exemple.
L’Inrap, en charge de la valorisation scientifique de ces découvertes, publie ses études mais organise également des visites des chantiers, des conférences, des expositions dans la France entière. En 2020, 628 048 visiteurs ont bénéficié d’actions de valorisation qui leur ont permis de se confronter à leur passé. Les médiations autour des découvertes archéologiques participent à la construction d’un savoir local et d’une identité nationale.
Pour aller plus loin
La Fabrique de la France. 20 ans d'archéologie préventive
Dominique Garcia (dir)
Flammarion - Inrap, 2021
Présentation d’une sélection de découvertes en archéologie préventive sur ces vingt dernières années qui permettent d’écrire l’histoire de France en construction. La confrontation entre le passé et le présent éclaire bon nombre de questions contemporaines.
Depuis 2001, des milliers de chantiers de fouilles d’archéologie préventive dessinent une histoire de France, de la préhistoire aux périodes les plus contemporaines. Une émission à l’occasion des vingt ans de l’Inrap avec Dominique Garcia, président de l’Inrap, Mathias Dupuis, conservateur du patrimoine et directeur de l’archéologie de l’agglomération Chartres Métropole, et Gwénaëlle Marchet-Legendre, conservatrice régionale adjointe de l’archéologie sur le site de Poitiers pour la DRAC Nouvelle-Aquitaine.
« Que le lecteur, au-delà des données administratives et financières que regroupe ce document, s’attarde donc sur quelques découvertes réalisées dans nos territoires. Il y percevra sans peine la pleine efficience du dispositif d’archéologie préventive et une expertise scientifique unique de son service public dont l’action ne s’arrête pas à la production de données mais vise quotidiennement au partage de la connaissance. »
Avant-propos par Dominique Garcia, président de l’Inrap
Ces vingt dernières années, 50 000 sites archéologiques ont été expertisés en France et plusieurs milliers fouillés, étudiés et valorisés. L’archéologie ne cherche pas de chefs-d’œuvre ou de monuments remarquables. Elle vise à connaître les territoires et les sociétés passées, à travers les signes conservés par le sol, depuis les premières traces de présence humaine au Paléolithique (au moins 500 000 ans avant notre ère), jusqu’à nos jours. Loin du roman national d’un espace figé, providentiellement bordé de frontières naturelles, les découvertes archéologiques reconstruisent le récit de la « fabrique » de la France. Celle de ses paysages, de son réseau d’habitats, de ses productions matérielles, de ses identités, de ses pratiques funéraires ou cultuelles.
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