Sélection

Joyce Carol Oates, l’Amérique au scalpel

Auteure d’une centaine de romans, poétesse, dramaturge et nouvelliste, Joyce Carol Oates fait partie des auteures américaines les plus prolifiques de notre époque.

Mariant un savoir-faire romanesque hors-pair à un regard sans concessions sur une Amérique malade, Joyce Carol Oates est parvenue à construire une œuvre extrêmement populaire tout en conservant les faveurs de la critique, sensible à sa constante exigence.

Pour toutes ces raisons, il peut être difficile de savoir par quel versant aborder son œuvre. A l’occasion de l’entrée de Joyce Carol Oates dans la collection des Cahiers de l’Herne, nous vous proposons une sélection de références comme autant de points d’entrée dans son univers.

Publié le 07/06/2017 - CC BY-SA 3.0 FR

Sélection de références

France Inter - Joyce Carol Oates

France Inter - Joyce Carol Oates

Joyce Carol Oates reçoit, dans sa maison du New Jersey, Laure Adler et fait le bilan de sa carrière littéraire depuis ses premiers écrits, tapés sur la machine à écrire que lui offrit sa grand-mère à 14 ans. Dans cet entretien fouillé réalisé en 2016, elle évoque sa routine de travail – forcément stakhanoviste -, les différentes formes que prend son écriture, ce que représente pour elle le point de vue féminin en littérature et les figures dont elle se sent proche, de Virginia Woolf à John Updike en passant par Marilyn Monroe.

Blonde

Blonde

Joyce Carol Oates
Le Livre de poche, 2002

« On déteste Marilyn Monroe… mais on l’admire. Eblouissante, brillante ! Sexy, séduisante ! (…) Si les chutes du Niagara sont une des sept merveilles du monde, Marilyn Monroe est la huitième. »

Voir Joyce Carol Oates s’emparer du destin de Marilyn Monroe dans Blonde apparaît comme une évidence : son histoire contient tous les grands thèmes de la romancière. Des dysfonctionnements de la machine hollywoodienne, qui en fit une star avant de la laisser se détruire, aux représentations du corps des femmes, cette vie tragique est une invitation à passer de l’autre côté du miroir aux alouettes qu’est le rêve américain.
Roman monstrueux, foisonnant et magnétique, Blonde dit l’impossibilité à saisir le personnage sans cesse réinventé de Marilyn et donne à voir son inéluctable disparition, dans la chronique d’une mort annoncée. Sommet emblématique de l’œuvre d’Oates, cette bio-fiction est une démonstration exemplaire de l’acuité de son regard et de son inventivité narrative. Incontournable !

A la Bpi, niveau 3, 821 OATE 4 BL

Fille noire, fille blanche

Joyce Carol Oates
P. Rey, 2009

« Une fille noire qui se fichait à peu près d’être noire, et totalement de l’intérêt que vous lui portiez. »

Il est des personnages qui disent un pays tout entier, de ses contradictions à ses tensions humaines, politiques et raciales. Pour Joyce Carol Oates, ce sont deux jeunes étudiantes, qui partagent une chambre dans une prestigieuse université américaine au milieu des années 1970. Genna est blanche, bourgeoise, intellectuelle et militante. Minette est noire, pauvre, renfermée et malmenée. Oscillant sans cesse entre amitié et rejet, leur relation complexe dessine une société dans l’impasse, dont les utopies ne suffisent plus à panser les blessures originelles. Un sommet d’inconfort romanesque, qui laisse le lecteur juge de sa vérité.

A la Bpi, 821 OATE 4 BL

Carthage

Joyce Carol Oates
P. Rey, 2015

« Maintenant c’était trop tard. Il avait été tué mais n’était pas mort – pas tout à fait. »

On pourrait dire que Carthage recèle tout l’art de Joyce Carol Oates – cette manière si particulière, envoûtante et dérangeante, de mêler la psyché de ses héros à celle de l’Amérique contemporaine.
En 2005, la jeune Cressida Mayfield disparaît. Après de longues recherches, l’ancien fiancé de sa sœur, Brett Kincaid, vétéran d’Irak revenu déboussolé de la guerre, avoue le meurtre de la jeune fille. Mais, sept ans plus tard, en 2012, une toute autre vérité se fait jour, qui trouve ses racines dans la relation douloureuse et ambiguë entre les deux sœurs Mayfield… A partir d’un drame provincial ordinaire, Joyce Carol Oates dissèque les maux brûlants de l’Amérique post-11 septembre, entre souffrance intime et culpabilité collective. On n’en sort pas indemne.

A la Bpi, niveau 3, 821 OATE 4 CA

Sexy

Joyce Carol Oates
Gallimard Jeunesse, 2007

« Certains de ceux qui le regardaient, fixant des yeux affamés sur lui, n’étaient ni des filles, ni des jeunes femmes, mais des hommes. »

Bon élève, beau garçon, membre émérite de l’équipe de plongeon… Darren, 16 ans, a tout pour lui et s’attire la sympathie de tous, même de son professeur d’anglais. Alors, quand celui-ci se voit accusé à tort de pédophilie, c’est toute une partie de l’univers de Darren qui s’effondre. Révélant l’hypocrisie de la bonne société et son homophobie à peine déguisée, Sexy évoque aussi bien les ravages du harcèlement scolaire que la découverte, toujours semée d’embûches, de la sexualité. Adaptant son écriture à un lectorat dit « jeune adulte », Joyce Carol Oates ne renonce pas pour autant à ses sujets de prédilection, ni à leur noirceur… Et signe encore un grand roman, à mettre entre toutes les mains !

Masque de sang

Masque de sang

Lauren Kelly
A. Michel, 2011

« Quand j’ai envoyé le premier Rosamond Smith à l’éditeur new-yorkais Simon and Schuster, celui-ci a accepté le manuscrit sans savoir que c’était moi. C’était très excitant. »

Le secret est maintenant éventé, mais Joyce Carol Oates a signé onze thrillers sous pseudonymes. Dans le dernier roman signé Lauren Kelly, Masque de sang, Oates investit le domaine de l’art contemporain et imagine l’enlèvement de l’organisatrice d’une exposition sulfureuse… Au programme : tension psychologique, personnages ambigus, secrets familiaux et commentaire sociologique. Aucun doute : les romans sous pseudo d’Oates portent bien sa patte, et méritent autant d’attention que ceux qu’elle signe de son nom !

Foxfire, confession d'un gang de filles

Foxfire, confession d'un gang de filles

Laurent Cantet
, 2013

Pour sa première expérience américaine, le cinéaste Laurent Cantet s’empare du Gang de filles de Joyce Carol Oates. Situé dans l’Amérique des années 1950, le film raconte la révolte d’un groupe d’adolescentes, qui ont décidé d’en finir avec le conservatisme et le patriarcat. Si l’émancipation a toujours un coût chez Joyce Carol Oates, elle n’en demeure pas moins une quête profondément actuelle. Engagées, fragiles, brutales, ces jeunes rebelles nous rappellent que la bataille du féminisme et de la liberté est loin d’être gagnée.

Les revenants

Laura Kasischke
C. Bourgois, 2011

Avec cinquante ans de carrière, rien d’étonnant à ce que Joyce Carol Oates ait influencé certains auteurs contemporains… La plus emblématique de ses héritières est sans nul doute Laura Kasischke, qui manifeste le même sens de la tension romanesque.

Dans Les revenants, variation sur le classique roman de campus qui emprunte les chemins du thriller et du fantastique, elle nous emmène sur les traces de Nicole, élève brillante et populaire dont la mort violente sert de révélateur à un glaçant jeu de dupes. L’enquête est ici aussi bien policière que sociologique, et permet à Kasischke de débusquer tous les faux-semblants du petit monde universitaire… Avec une acuité et une férocité qui n’ont rien à envier à Joyce Carol Oates.

A la Bpi, niveau 3, 821 KASI 4 RA

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