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Appartient au dossier : C’est quoi, être jeune ?

Qui sont les jeunes ruraux ?

La situation des jeunes qui vivent à la campagne est peu connue, et n’échappe aux clichés. Issus majoritairement de milieux populaires, les jeunes ruraux sont très vite confrontés à un choix : partir ou rester.

Dans le sens commun et aussi dans la recherche, les jeunes ruraux sont encore souvent considérés comme des « paysans ». Mais en réalité, les effectifs agricoles ne représentent que 5,5 % de la population active dans les campagnes, et encore moins chez les jeunes. Si certains territoires ruraux sont à dominante agricole, d’autres, où se concentrent les difficultés sociales, sont à dominante industrielle. En effet, l’industrie reste importante dans ces territoires en comparaison de ce que l’on connaît en milieu urbain. Les jeunes ruraux deviennent surtout des ouvriers ou des employés. Ils travaillent beaucoup dans de petites structures, voire seuls, comme c’est le cas dans le secteur de l’aide à la personne, débouché important dans les territoires vieillissants.

Quatre jeunes, skateboards, amitié
Jordan McQueen, Unsplash

Jeunes des villes, jeunes des champs

Un bon moyen de caractériser les jeunes ruraux est de les comparer avec leurs homologues des villes. Comme ils sont davantage issus des classes populaires, les ruraux ont tendance à avoir des enfants plus jeunes, à moins voyager, à limiter leurs activités culturelles à la pratique sportive ainsi qu’aux médias et musiques les plus diffusés. Enfin, ils s’engagent moins dans les études supérieures et croient moins en l’efficacité des diplômes. Pour comprendre cela, il faut avoir en tête que les ruraux ont dans leur entourage peu d’enfants des classes sociales supérieures qui, en ville, légitiment les études supérieures. De plus, ils n’ont pas d’université à côté de chez eux. Partir faire des études est donc synonyme de séparation d’avec la famille et de rupture progressive avec leur bande de copains.

« Ceux qui restent »

On constate des inégalités fortes entre « ceux qui restent » au bourg ou au village. Certains trouvent un premier travail grâce aux recommandations d’un ami des parents ou d’un copain du club de football par exemple. Intégrés, reconnus par leurs pairs (avec du capital d’autochtonie), ils accèdent à la propriété très tôt et sont stabilisés sur les marchés professionnel et matrimonial. Ils valorisent le fait de vivre à la campagne, alors que les jeunes sans emploi ou précaires critiquent un « coin paumé » et se disent souvent « grillés » parce qu’ils n’ont pas les ressources sociales pour partir et sont « mal vus » pour être embauchés.

Benoît Coquard, sociologue
Article paru initialement dans le numéro 20 du magazine de ligne en ligne

Publié le 10/12/2018 - CC BY-NC-SA 4.0

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