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Appartient au dossier : Voir Vénus : du point lumineux au sol de la planète

Voir Vénus  #1 : le zodiaque de Dendérah

Confrontés à l’immensité de la voûte céleste et ses mystères, les premiers observateurs du ciel y cherchent des signes connus, issus de leur quotidien et de leur religion. Sur le zodiaque de Dendérah qui ornait le plafond du temple d’Hator, des rondes de personnages traduisent l’organisation du ciel établie en Égypte ancienne.
Balises vous propose d’observer l’évolution des connaissances astronomiques au travers de représentations de la planète Vénus, pour accompagner le cycle de conférences « Espace, frontière de l’infini » qui se déroule à la Bpi à l’automne 2022.

Carte du ciel scuptée. Des Dieux et des animaux représentent les corps célestres.
Zodiaque de Dendérah, exposé au Musée du Louvre. Photographié par Gary Tod, Flickr [CC0]

Un zodiaque est une représentation de la voûte céleste d’un point de vue terrien. Celui de Dendérah est un bas-relief qui ornait la chapelle d’Osiris dans le temple dédié à la déesse Hathor à Dendérah, au sud du Caire. Il est très connu des astronomes car sa datation et son interprétation ont longtemps été controversées. Les chercheurs finissent par s’accorder sur la date de 50 avant notre ère en identifiant deux éclipses solaires représentées sur le Zodiaque. Les cinq planètes connues des Égyptiens y apparaissent, personnifiées, comme sur d’autres plafonds astronomiques de l’Égypte Antique (-3150 à – 30). Vénus avait déjà été mentionnée, par exemple sur la tablette d’Ammisaduqa (Babylone, -1581), qui consigne 21 années d’observations de la planète. C’est cependant sur le zodiaque de Dendérah que la planète est clairement identifiable pour la première fois.

Une carte du ciel symbolique

Cette carte du ciel sous forme de disque est portée par douze personnages comme les douze mois de l’année : quatre déesses représentant les points cardinaux et huit dieux à tête de faucon, symbole d’éternité. Les personnages de la couronne extérieure incarnent les trente-six décans traditionnels, correspondant chacun à une semaine égyptienne de dix jours. On retrouve les constellations d’origine babylonienne, reprises par les Grecs, et d’autres égyptiennes. Les cinq planètes connues à cette époque sont représentées sous les traits de dieux égyptiens. Vénus possède deux visages, en référence au fait qu’on la distingue le matin et le soir et porte le nom de « le-dieu-du-matin », d’après les experts du musée du Louvre, à Paris, où le zodiaque de Dendérah est désormais exposé. Sur cette carte, certaines indications sont exactes, d’autres fantaisistes, comme la position de Vénus et Mercure. Le célèbre égyptologue Jean-François Champollion rappelait en 1822 qu’il ne faut pas confondre cet objet de culte symbolique avec un objet astronomique.

Les débuts de l’astronomie

Les égyptologues ont démontré que les architectes égyptiens connaissaient la position des astres et intégraient ces connaissances pour créer des scénographies religieuses. Par exemple, les ouvertures des pyramides étaient conçues de manière à faire apparaître un corps céleste.

De plus, ce zodiaque a été réalisé durant la dynastie ptolémaïque, qui marque un tournant dans l’astronomie égyptienne. En effet, le savant d’Alexandrie Claude Ptolémée publie vers – 150 un traité d’astronomie, l’Almageste, qui reprend les travaux d’astronomie du Grec Hipparque et les complète avec de nouvelles étoiles et des modèles mathématiques pour prévoir les mouvements des planètes. Dans Hypothèses planétaires, il livre le résultat de son calcul des distances entre la Terre et les planètes, dans un modèle de l’Univers géocentrique qui ne sera remis en cause qu’au 16e siècle, notamment par l’étude à la lunette des phases de Vénus. Les créateurs du Zodiaque disposaient de ces connaissances astronomiques et ont pourtant laissé des informations erronées mais sans doute symboliques. Les connaissances astronomiques furent longtemps au service des croyances et des cultes, ou utilisées pour les prédictions. L’astronomie a souffert de ces amalgames pour évoluer et s’imposer comme science.

De nouvelles découvertes

Depuis quelques années, les archéoastronomes recherchent des usages astronomiques dans les vestiges de civilisations ou tentent de donner du sens à certaines observations astronomiques passées en s’appuyant sur les connaissances actuelles. Ainsi, l’archéoastronome Michael Rappenglueck, en 2004, identifie dans la Salle des taureaux de la grotte de Lascaux une représentation par un chaman de trois étoiles dans le ciel d’une nuit d’été, il y a environ 14 000 ans. L’étude de sites ou de documents anciens sous cet angle pourrait donc apporter un éclairage nouveau sur les connaissances astronomiques de l’Antiquité et du Moyen Âge. Elle permettrait aussi d’affiner les calculs d’aujourd’hui en prenant en compte des phénomènes observés aux débuts de l’astronomie.

Publié le 03/10/2022 - CC BY-SA 4.0

Pour aller plus loin

Une histoire du ciel : une histoire illustrée de l'astronomie, cartes, mythes et découvertes de l'univers

Edward Brooke-Hitching
Delachaux et Niestlé, 2021

Ce livre propose une histoire visuelle du ciel. Il explore le temps, les histoires, les mythes et les théories scientifiques. C’est surtout l’histoire d’un genre : la cartographie céleste. Les illustrations sont splendides. Elles reflètent la fascination de l’humanité pour le ciel et ses mystères.

À la Bpi, niveau 2, 52(091) BRO

« La date de conception du zodiaque du temple d’Hathor à Dendera », par Éric Aubourg | Bulletin de l'institut français d'archéologie orientale, 1995

La description et l’identification des planètes et des constellations représentées sur le zodiaque du temple d’Hathor par Éric Aubourg, astronome et égyptologue passionné.

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