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Appartient au dossier : IA, le grand bluff

IA, espoir ou menace environnementale ?

L’essor des intelligences artificielles (IA) pose la question de leur compatibilité avec les impératifs environnementaux. D’une part, les promesses d’une technologie susceptible d’accélérer la transition écologique font florès : optimisation des ressources, modélisations climatiques, réduction des gaspillages… De l’autre, les coûts écologiques et énergétiques de l’IA croissent exponentiellement, sans que cette empreinte soit, pour l’heure, compensée.

Une opportunité pour l’environnement

L’intelligence artificielle est un outil prometteur dans la lutte contre le dérèglement climatique, prétendent ses promoteur·rices. Un rapport, commandé en 2023 par Google au cabinet d’expertise et de stratégie Boston Consulting Group affirme, par exemple, que l’IA fait émerger des solutions permettant « d’atténuer de 5 à 10 % les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici à 2030 ». Les domaines d’intervention sont multiples : soutien à la recherche fondamentale sur l’environnement, assistance aux nations dans l’élaboration de leur stratégie climatique, prédiction d’événements climatiques, aide à la résolution de crises majeures comme des inondations ou des incendies, assistance aux entreprises pour optimiser leur stratégie bas carbone… Mais ces services immatériels nécessitent des infrastructures, des équipements bien matériels et toujours plus d’énergie pour fonctionner.

Des limites bien matérielles

La part du numérique dans l’empreinte environnementale mondiale augmente de 5 % par an, alors que le secteur s’est engagé à la réduire de 45 % d’ici 2030, par rapport à 2020. La démocratisation de l’IA et sa montée en puissance nécessitent, en outre, la construction de nombreux centres de données (data centers) et entraînent une consommation accrue d’électricité et d’eau. En matière d’électricité, les data centers d’Île-de-France consommeront ainsi l’équivalent d’une ville de 4 millions d’habitant·es en 2030. Les GAFAM (Google, Amazon, Facebook/Meta, Apple, Microsoft) s’intéressent donc au nucléaire pour assurer le fonctionnement de leurs centres sans émission de gaz à effet de serre. En attendant, le bilan écologique du numérique s’alourdit et les besoins en eau et en énergie entrent en concurrence avec les usages locaux. Le renouvellement du matériel informatique, rendu obsolète avec l’arrivée de l’IA, accroît les tensions sur les ressources énergétiques, hydriques, mais aussi sur les métaux et terres rares, qui sont des ressources critiques. Les gains écologiques que l’IA pourrait provoquer sont pour l’instant effacés par le changement de comportements qu’induit cette technologie. C’est l’effet rebond, aussi appelé paradoxe de Jevons.

Une nécessaire sobriété

Alors que les géants de la tech renoncent à leurs engagements climatiques, trois institutions, l’Ademe, l’Inria et l’Arcep, ont uni leur voix au Sommet de l’IA de Paris en 2025 pour appeler l’Europe à s’engager en faveur d’une approche durable de l’IA. Quelques solutions se dessinent : revoir la conception de l’IA pour la rendre compatible avec les objectifs climatiques et ne plus privilégier le volume, imposer des normes strictes sur la consommation énergétique et l’efficience des centres de données, sensibiliser et former les citoyen·nes à la sobriété numérique. Aujourd’hui, explique Luc Julia, l’inventeur de Siri, l’assistant d’Apple : « si on faisait autant de requêtes ChatGPT que sur Google, il n’y aurait pas assez d’électricité dans le monde. »

Quelques chiffres

L'empreinte écologique du numérique, nationale ou mondiale, ainsi que la part de l'IA. Pour les détails, voir le pdf de la retranscription.

Infographie : Fabienne Charraire, Bpi
Sources : Ademe, Agence France-Presse, blogdumoderateur.com, Conseil économique, social et environnemental, Courrier international, Green IT, Novethic, Simbios, Statista.

Publié le 19/05/2025 - CC BY-SA 4.0

Pour aller plus loin

« Quels impacts de l'intelligence artificielle sur l'environnement ? » Séance plénière en direct, 24/09/2024 | Le Conseil économique social et environnemental

Elle existe depuis des décennies, mais a fait une entrée fracassante dans notre vie quotidienne. L’intelligence artificielle (IA) est à présent partout autour de nous : dans nos smartphones et assistants intelligents, sur les réseaux sociaux, mais aussi dans des secteurs entiers comme l’industrie, le transport, le marketing… Cette omniprésence nous amène aujourd’hui à questionner son impact sur le changement climatique. Certains dénoncent une menace et un impact déjà effectif pour l’environnement. D’autres soulignent son potentiel d’outil indispensable à la transition écologique. Qui croire ?

L’insoutenable coût écologique du boom de l’IA

L’intelligence artificielle est très gourmande en énergie et en matières premières. Sans remettre en cause leur activité, ses promoteur·rices s’en remettent à une version améliorée de l’IA, supposément plus « verte » et plus « sobre ».

« Big data, IA et environnement : l’union des sciences face à l’urgence », 12 décembre 2024 | Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria)

« Dans leur laboratoire à la croisée des chemins entre sciences du numérique et sciences environnementales, informaticien·nes, écologues, paléo-écologues, agronomes et climatologues unissent forces et compétences pour que les solutions de demain soient guidées par les révélations du big data d’aujourd’hui. »

« Impact environnemental du numérique : l’inquiétant boom à venir », 6 février 2025 | The Conversation

De nouveaux chiffres de l’Ademe mettent en lumière l’impact environnemental croissant du secteur numérique, en constante progression. Le poids des équipements, toujours majoritaires dans l’empreinte carbone du secteur, est peu à peu concurrencé par celui des usages, qui connaissent un essor grandissant. La vague de l’IA générative devrait contribuer à les faire encore grimper.

« C’est quoi l’IA (partie 3) ? L'impact environnemental : Vers une IA durable et frugale », avril 2025 | le catalogue interministériel des Pros du Numérique (SPOTE)

L’intelligence artificielle (IA) offre de nombreuses possibilités, mais son développement soulève également des préoccupations majeures en matière d’impact environnemental. Les géants de la technologie, comme Microsoft et Google, ont reconnu que les besoins en calculs informatiques de l’IA compliquent leurs engagements de durabilité. Cet article explore l’impact environnemental de l’IA à travers divers projets et initiatives ministérielles visant à créer une IA plus frugale et durable.

AVIS de l'Ademe : Numérique & environnement : entre opportunités et nécessaire sobriété, janvier 2025 (à télécharger)

Introduction du document : « Depuis quelques décennies, le numérique se développe et a un impact important sur nos modes de vie, sur les modèles d’affaire des entreprises ou sur les modalités d’action de l’État. Il a été depuis longtemps perçu comme intrinsèquement vertueux d’un point de vue environnemental (« dématérialisation », « virtuel »…). Est-ce toujours le cas ? Si certaines applications du numérique ont un impact positif sur l’environnement, l’impact environnemental du secteur numérique est déjà significatif et en forte croissance. »

Par ailleurs, l’Ademe produit des chiffres sur l’empreinte environnementale du numérique en France : Numérique : quel impact environnemental en 2022 ? | ADEME Infos.

Impacts environnementaux du numérique dans le monde, février 2025 (pdf à télécharger) | Greenit

Une étude sur les impacts environnementaux du numérique à l’échelle mondiale.

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