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Appartient au dossier : La Chine, sur la voie de la puissance

Classement de Shanghai : un outil d’influence ?

Depuis sa création en 2003 par l’université de Jia-Tong, le classement de Shanghai réalisé désormais par la société ShanghaiRanking s’est imposé dans l’enseignement supérieur. Bien que souvent controversé, il permet à la Chine de rayonner sur le monde académique international. Jean Charroin, directeur général de l’ESSCA, une grande école de commerce française, répond aux questions de Balises.

En quoi le classement de Shanghai est-il un outil d’influence pour la Chine ? 

Comme tout pays, la Chine choisit ses combats en fonction de ses intérêts. Ce classement peut être considéré comme l’un des outils de sa diplomatie d’influence (soft power) en affirmant sa puissance académique. Les universités chinoises ont, d’une manière générale, progressé très significativement et certaines d’entre elles sont même devenues des références internationales dans des champs tels que la physique des matériaux, le transport ou l’énergie. Quant à l’Europe, si les résultats de ses pays membres étaient fusionnés, elle pourrait rivaliser avec les puissances chinoise et étasunienne. Cependant, comme dans d’autres domaines, nous pensons souvent davantage en termes de pays que de zone continentale.

Comment le classement de Shanghai s’est-il fait une place prédominante dans le monde académique international ?

Au début, il s’agissait pour la Chine de positionner ses grandes universités dans le concert international de l’enseignement supérieur et de la recherche. Par rapport aux anciens classements, la structuration de celui de Shanghai s’appuie sur des éléments quantitatifs très facilement appréhendables. L’inconvénient de cette approche est que seuls certains critères sont retenus ce qui réduit la complexité du système de l’enseignement supérieur. Les informations récoltées n’ont pas forcément de lien avec la qualité pédagogique ou la professionnalisation des institutions, alors que ces éléments mériteraient d’être étudiés. 

En quoi ce classement favorise-t-il la montée en puissance de la Chine ?

Dans le cadre d’une stratégie de long terme, l’approche quantitative ne peut que servir le rayonnement du cadre académique chinois. En effet, la quantité de publications est liée aux effectifs de chercheurs, particulièrement nombreux en Chine. En prenant en compte ce critère dans le classement, elle parvient inévitablement à se hisser parmi les meilleurs.

Chantier du campus Paris Sarclay
Des grandes écoles rejoignent l’université Paris-Sarclay sur le site du quartier de Moulon, Gif-sur-Yvette.
© EPA Paris-Saclay / Alticlic

De quelle manière le classement de Shanghai a-t-il façonné le monde académique français ? 

C’est en 2004, soit un an après sa création, que les médias et la classe politique, en particulier Nicolas Sarkozy, se sont intéressés au classement de Shanghai. À ce moment-là, les faiblesses de l’enseignement supérieur français étaient discutées à l’aune de ce classement, d’où l’émergence des pôles de recherche et d’enseignement supérieur (PRES). La compétition a donc agi comme un levier du mouvement de fusion des universités françaises. 

Publié le 06/12/2021 - CC BY-SA 4.0

Pour aller plus loin

Shanghai Ranking

Le site du classement des universités.

L’université Paris-Sarclay

L’université Paris-Sarclay se classe dans le Top-20 mondial. Sylvie Retailleau, la présidente de l’université déclare :

« Ce classement n’est pas une fin en soi, il ne change pas nos objectifs. Mais il permet de porter un nouveau regard sur l’enseignement supérieur français, et c’est ainsi un levier pour attirer de nouveaux talents, mettre en valeur nos équipes académiques tout comme nos partenaires socio-économiques engagés à nos côtés, et encourager toutes les forces vives qui voudraient contribuer avec nous à la qualité de l’enseignement et de la recherche de notre pays. Cette position dans le top 20 mondial nous renforce aussi dans la conviction de la pertinence de notre trajectoire institutionnelle collective ».

Premier bilan des fusions d'universités réalisées entre 2009 et 2017 | Ministère de l'Éducation nationale, de la Jeunesse et des Sports

La France a engagé depuis 2009 une vague importante de fusions universitaires. Ce mouvement s’inscrit dans un contexte de politiques nationales incitatives qui, depuis une vingtaine d’années, visent à réorganiser l’enseignement supérieur pour constituer des pôles d’enseignement. Un premier bilan a été dressé en mars 2019 par Philippe Bézagu, Guillaume Bordry, Jean‐Luc Rossignol, avec la collaboration de Philippe Perrey, inspection générale de l’éducation nationale, inspection générale de l’administration de l’éducation nationale et de la recherche.

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