Sélection

La Russie postsoviétique en livres

Depuis 1989 et l’effondrement du système soviétique, la Russie a connu des bouleversements nombreux et profonds. De nombreux livres s’en sont fait l’écho : en voici une sélection, à l’occasion de la rencontre « Trente ans après la chute de l’URSS : l’espace postsoviétique revisité ».

Le Kremlin de Moscou, l’ancienne résidence officielle du gouvernement de l’Union soviétique. Wikipédia – CC0

Publié le 11/10/2021 - CC BY-SA 4.0

Romans

Limonov

Emmanuel Carrère
POL, 2011

Héros ou salaud, Limonov ? Chacun reconnaîtra au moins qu’il a traversé son époque d’une façon singulière et vécu plusieurs vies. Poète marginal, à la fin de l’ère communiste, il choisit l’exil vers les États-Unis, où il connaît la pauvreté et les petits boulots. Il s’en échappe par l’écriture et rencontre le succès à Paris. Mais il n’a pas coupé les ponts avec la Russie, et il suit avec passion la période de Perestroïka, qui inaugure la dissolution de l’URSS. Limonov choisit ensuite de s’engager auprès des troupes serbes tandis qu’éclate l’ex-Yougoslavie, et enfin rejoint la Russie. Il y fonde le parti National-bolchévique, opposé à Poutine, ce qui lui vaudra deux années de prison…

À travers ce personnage, Carrère retrace un morceau d’histoire de la Russie, et fait le tableau d’une époque qui, après l’enfermement soviétique, voit renaître la Russie convertie au capitalisme. Amoureux de son pays, nationaliste et mégalomane, Limonov a embrassé plusieurs causes, toujours avec excès. Ce qui fait de lui un héros ambigu, critiquable, mais fidèle au moins à une certaine « âme russe », et à un destin qui ressemble à celui de son pays. 

À la Bpi, niveau 3, 840″19″ CARR.E 4 LI

Le pingouin

Andrej Kurkov
Liana Levi, 2000

Au zoo de Kiev en faillite, Victor Zolotarev a adopté un pingouin qui déambule désormais dans son appartement. Pour subvenir à ses besoins et à ceux de son compagnon, Victor, écrivain sans succès, accepte un travail pour un grand quotidien : rédiger les notices nécrologiques de personnalités encore en vie. Sauf que celles-ci se mettent bientôt à décéder à un rythme inquiétant…

Le roman policier se double du tableau de l’Ukraine pendant la période qui suit immédiatement l’ère soviétique. Tous les anciens repères ont disparu et le pays semble livré aux entrepreneurs, aux mafieux et aux politiciens corrompus. Le héros solitaire assiste à cet effondrement, et son pingouin devient la métaphore de ce dépaysement radical, ce sentiment de n’être plus du tout à sa place. 

À la Bpi, niveau 3, 882 KOUR 4 SM

Essais

La Fin de l'homme rouge : ou le temps du désenchantement

Svetlana Alexievitch
Actes Sud, 2013

Après La Supplication en 1998, sur la catastrophe nucléaire de Tchernobyl, Svetlana Alexievitch publie en 2013 La Fin de l’homme rouge, exceptionnel recueil de témoignages d’anciens citoyens soviétiques, récompensé du Prix Nobel de littérature en 2015.

La journaliste et écrivaine biélorusse y exerce son art de transformer les expériences individuelles en littérature et retrace l’histoire de la chute de l’URSS dans les années quatre-vingt-dix et ses conséquences jusqu’aux années deux-mille, du point de vue des vies minuscules. Si, selon l’autrice, « seul un Soviétique peut comprendre un Soviétique », on approche au plus près l’expérience de la peur, de la faim, de l’espoir du début des années quatre-vingt-dix et de la désillusion qui lui a succédé. Sans jamais porter de jugement sur les personnes qu’elle interroge et leur histoire, elle se fait chambre d’enregistrement de la mémoire collective et nous aide à mieux la comprendre.

À la Bpi, niveau 3, 882 ALEX.S 2

Douloureuse Russie : journal d'une femme en colère

Anna Politkovskaia
Buchet Chastel, 2006

Dans ce journal, tenu par Anna Politkovskaïa de 2003 à 2005, elle relate au quotidien la dérive de la Russie vers un système de plus en plus autoritaire. Elle suit la mise au pas de son pays par un Vladimir Poutine de plus en plus sûr de lui, au fur et à mesure que les élections, peu démocratiques, lui donnent davantage de pouvoir. La population apeurée reste soumise à des politiciens aux ordres et à une bureaucratie corrompue, tandis que la Tchétchénie sombre dans le chaos. 

Anna Politovskaïa, journaliste pour la Novaïa Gazeta, un des rares journaux d’opposition russe, a suivi l’évolution de la Russie postsoviétique depuis l’arrivée au pouvoir de Vladimir Poutine en 1999. Elle s’est vite dressée contre le régime cynique et violent que le président a mis progressivement en place, en tournant systématiquement le dos à la démocratie. Saluée dans le monde pour son courage et son indépendance, Anna Politovskaïa a été assassinée en 2006.

À la Bpi, niveau 3, 328(47) POL

 

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