La littérature, en France, est soumise à la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, qui concerne les discours, imprimés, dessins, affiches, « ou tout autre support de l’écrit, de la parole ou de l’image vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans des lieux ou réunions publics […] et tout autre moyen de communication au public par voie électronique ». La même loi s’applique donc à un article de journal, à une publication sur un réseau social ou à un roman.
La liberté de création existe depuis peu dans le droit français. La loi du 7 juillet 2016 reconnaît dans son article premier que « la création est libre ». Affirmation aussitôt modérée par l’article 2, qui précise que la création artistique doit s’exercer « dans le respect des principes encadrant la liberté d’expression. »
La liberté de création se trouve en conflit avec les « droits de la personnalité », plus particulièrement le respect de la vie privée. Emmanuel Pierrat est spécialiste en droit de la propriété intellectuelle et avocat, entre autres, des écrivains Michel Houellebecq, Édouard Louis et Yann Moix. Il précise, dans sa chronique hebdomadaire sur le site de Livres Hebdo, que la vie privée recouvre, « dans son acception jurisprudentielle française, l’identité de la personne (son patronyme réel, son adresse…), l’identité sexuelle (cas de transsexualisme), l’intimité corporelle (nudité), la santé, la vie sentimentale et conjugale (et sexuelle, bien entendu), la maternité, les souvenirs personnels, les convictions et pratiques religieuses, la rémunération, le patrimoine. »
Les juristes ont régulièrement recours au concept de « distance narrative ». Une manière de prouver la valeur fictionnelle d’un récit en fonction de la distance introduite entre l’auteur et son écrit mais un critère difficile à mesurer objectivement. Entre la liberté de création et les droits de la personnalité, en l’absence d’une loi claire et univoque, c’est à la jurisprudence de trancher, au cas par cas.
Pour aller plus loin
Agnès Tricoire
La Découverte, 2011
Avant que la liberté de création ne soit encadrée par la loi en 2016, Agnès Tricoire, avocate spécialisée dans le droit de la propriété intellectuelle, analyse le déficit juridique en la matière, alors que les œuvres et les artistes se retrouvent régulièrement devant des tribunaux de plus en plus répressifs. Qui doit juger les œuvres, et sur quels critères ? sont quelques-unes des questions qu’elle pose dans cet ouvrage analytique et synthétique.
Version électronique consultable sur cairn.info.
Agnès Tricoire
M Médias, 2020
Créé en 2002 sous l’égide de la Ligue des droits de l’homme, l’Observatoire de la liberté de création regroupe une quinzaine d’associations et de collectifs issus du monde de la culture, solidaires face à la censure. Ce guide, paru en 2020, analyse treize cas emblématiques de ces vingt dernières années, dans tous les domaines artistiques (littérature, arts plastiques, cinéma, théâtre…) et tous les motifs de censure (blasphème, diffamation, protection de l’enfance, lutte contre le racisme…).
À la Bpi, niveau 3, 7.8 OEU
Emmanuel Pierrat
Flammarion, 2015
Emmanuel Pierrat, écrivain et avocat spécialisé en droit de la propriété intellectuelle (il a notamment été l’avocat de Michel Houellebecq, Claude Levi-Strauss, Yann Moix, Édouard Louis ou encore Gabriel Matzneff), livre dans cet ouvrage son analyse de la liberté d’expression en France après les attentats de 2015. Il explique comment ce principe, né de la philosophie des Lumières, s’est complexifié au fil des lois et des amendements, à plus forte raison avec l’arrivée d’internet, jusqu’à devenir illisible.
À la Bpi, niveau 2, 321.3 PIE
Les champs signalés avec une étoile (*) sont obligatoires