Article

Appartient au dossier : Les intelligences artificielles aujourd’hui

L’intelligence artificielle dans les bibliothèques

L’intelligence artificielle (IA) est de plus en plus présente dans nos vies et recouvre des domaines d’application en nombre toujours croissant. Elle se retrouve dans un ensemble d’outils que nous utilisons au quotidien : moteurs de recherche, réseaux sociaux, algorithmes de recommandations, et depuis peu outils de rédaction ou de création d’images. Balises vous explique le rôle crucial des bibliothèques dans l’accompagnement des publics à ces nouveaux usages, à l’occasion de la journée d’étude « Les bibliothèques sont-elles prêtes pour l’IA ? » organisée par la Bpi le 7 novembre 2023.

La présence constante de l’IA est bien souvent méconnue des utilisateur·rices et s’accompagne d’une aura de mystère, de fascination mais aussi de méfiance face à l’émergence d’une intelligence dite « forte ». L’intelligence artificielle forte désigne une intelligence comparable ou même supérieure à celle d’un être humain dans tous les domaines cognitifs. L’IA actuelle est capable d’exceller dans des tâches spécifiques, mais elle est généralement limitée à des domaines définis et n’est donc pas en rivalité avec l’intelligence humaine dans tous ses aspects. Cependant, les outils évoluent très vite…

Un robot devant une table et une étagère de livres.
Photo de FDATA ROBOT sur Unsplash – Robot qui peut évoluer de façon autonome dans les espaces intérieurs et interragir avec les humains

Les IA en bibliothèque

Les bibliothèques sont, depuis les débuts de l’informatique, impliquées dans la mise en place d’innovations qui permettent d’améliorer le référencement des documents, leur classement et leur mise à disposition. Elles se sont intéressées très tôt au web sémantique, qui permet d’identifier les termes en lien avec un sujet ou un·e auteur·ice, et qui a largement augmenté le nombre et la qualité des données. Les données nourrissent ainsi les outils d’intelligence artificielle, et ces derniers permettent en retour de mieux les explorer.

Depuis quelques années, le lien entre IA et bibliothèques se fait plus présent. L’utilisation de l’intelligence artificielle en bibliothèque offre de nombreuses opportunités pour améliorer l’accès aux ressources, l’efficacité des services et l’expérience des utilisateur·rices au cours de leurs recherches. Les IA facilitent l’exploitation de corpus qui peuvent être gigantesques et difficiles à explorer par la seule intelligence humaine. Elles sont notamment capables d’analyser rapidement des images, qui seraient complexes à décrire avec les moyens humains limités dont disposent les bibliothèques. Des fonds inexploités émergent ainsi des collections, et s’offrent au public et aux chercheur·ses.

Les IA peuvent aussi rendre certains contenus plus accessibles. Elles sont par exemple couplées aux outils de reconnaissance optique de caractères (OCR) pour améliorer la retranscription automatique des documents. Elles permettent aussi de transformer en texte des documents audios, tels que les archives sonores ou les conférences et les entretiens qui se déroulent dans les bibliothèques. Tout cela est particulièrement utile aux personnes malvoyantes ou malentendantes, mais facilite aussi les recherches au-delà des seules descriptions catalographiques.

Les IA proposent ainsi au public des fouilles dans le texte même des documents numérisés, et font apparaître des citations ou des références invisibles dans le catalogue. Le catalogue de la BNF s’appuie sur l’IA pour proposer des résultats pertinents qui dépassent la stricte requête formulée par l’utilisateur·rice.

L’IA générative peut enfin offrir une aide à la production des contenus textuels ou visuels qui sont proposés par les bibliothèques sur leurs sites web ou leurs brochures et revues. Sans se substituer à l’expertise des rédacteur·rices bibliothécaires bibliothécaires, les IA peuvent aider à améliorer la mise en forme d’un texte, corriger l’orthographe et la grammaire ou synthétiser un contenu. Certaines IA génèrent des images originales qui permettent d’illustrer des productions éditoriales en bibliothèque. 

Éduquer aux médias et à l’information

Les bibliothèques jouent également un rôle crucial en matière d’éducation aux médias et à l’information (EMI). Elles sont des ressources essentielles pour aider les individus à développer des compétences critiques dans la recherche et l’évaluation des informations, en particulier dans un monde de plus en plus complexe et numérique.

À ce titre, les bibliothèques présentent les IA génératives et expliquent leur fonctionnement et leurs applications mais aussi leurs limites. En atelier, par exemple, des utilisateur·ices, accompagné·es par des bibliothécaires, peuvent interroger ces outils pour créer des contenus, tels que des articles, des vidéos et des images. Mais cela peut aussi conduire à faire le constat de rendus encore souvent aléatoires ou superficiels, et à questionner la pertinence et l’exactitude de ces productions automatiques.

Par ailleurs, les services EMI ont toujours eu pour mission d’expliquer aux utilisateur·rices comment identifier la désinformation. Or, les IA ont permis la création d’outils pour détecter les fausses nouvelles, une tâche complexe qui nécessite souvent l’utilisation de logiciels et de méthodes spécifiques. Les IA, capables d’analyser rapidement de grandes quantités de données, savent reconnaître les informations incorrectes. FactCheck et d’autres sites de fact-checking (vérification des faits) utilisent des outils basés sur l’IA pour analyser rapidement les déclarations en ligne. De même, la  plateforme Media Bias s’en sert  pour évaluer la partialité politique des médias et analyser des sources, tandis que Snopesou NewsGuardcherchent  à vérifier les rumeurs.

Enfin, l’introduction de l’IA dans nos sociétés soulève des questions éthiques importantes, telles que la protection de la vie privée, la manipulation de l’information et la prise de décision automatisée. Autant de domaines mal connus, peu pris en compte par les règlements et les lois, qui nécessitent un maximum de vigilance individuelle. Les bibliothèques doivent donc informer et former le grand public sur les usages bénéfiques ou néfastes qui peuvent être faits de l’IA. 

Publié le 09/10/2023 - CC BY-SA 4.0

Pour aller plus loin

Dossier « L'intelligence artificielle à la BnF » | Chroniques, le magazine de la BnF, janvier-mars 2022

Engagée depuis plusieurs décennies dans l’informatisation et la dématérialisation d’une partie de ses collections et services, la Bibliothèque nationale de France est impliquée dans de nombreux projets utilisant des technologies d’intelligence artificielle (IA) et envisage de faire évoluer sa politique scientifique pour pleinement les y intégrer. Chroniques revient sur les enjeux de leur déploiement à la BnF.

À la Bpi, niveau 2, 02(0) BNF ou en ligne

Journée d'étude « Tous bibl-IA-thécaires ? L’intelligence artificielle, vers un nouveau service public » | Association des directeurs et personnels de direction des bibliothèques universitaires et de la documentation (ADBU) , 17 septembre 2019

Parce qu’elles produisent, signalent ou gèrent de nombreuses données structurées et indexées, les bibliothèques ont a priori de nombreux atouts en main pour se saisir des opportunités ouvertes par l’intelligence artificielle. Au sein des universités, bibliothécaires et professionnel·les de l’information sont naturellement au cœur de ce que pourrait être une intelligence artificielle fiable, privilégiant l’exactitude et la véracité des informations. Données bibliographiques, données usagers, corpus numérisés, renseignement en ligne : le potentiel d’application des technologies d’intelligence artificielle aux activités portées par les bibliothèques reste encore largement à explorer.

Rédiger un commentaire

Les champs signalés avec une étoile (*) sont obligatoires

Réagissez sur le sujet