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Appartient au dossier : Press Start 2023 : coup d’envoi pour l’esport !

L’esport, un sport olympique ?

Le Comité international olympique a sélectionné neuf jeux vidéo pour concourir dans la catégorie esport des Jeux olympiques. Balises vous les présente, tandis que le festival Press Start de la Bpi met à l’honneur la compétition dans le jeu vidéo à l’automne 2023.

un vélo face à un écran de jeu vidéo pour pratiquer de jeu de cyclisme virtuel Zwift
Entraînement avec Zwift, par Marco Verch Professional, [CC BY 2.0] via Flickr

Jeux vidéo de sport, jeux sportifs ?

Les jeux vidéo de sport sont des simulations ou des interprétations vidéoludiques de sports existants : football, basketball, tennis, course automobile, hockey… Les premières simulations sportives remontent aux années 1970, avec notamment le célèbre jeu de tennis Pong, dans lequel deux joueur·ses se renvoyaient une balle en déplaçant verticalement une barre figurant la raquette. L’imagination et l’habileté étaient alors largement sollicitées. De nos jours, les concepteurs de jeux travaillent le graphisme aussi bien que les techniques de jeux et la fluidité des déplacement des balles, des véhicules ou de la pluie, pour plus de réalisme. Ils permettent aussi aux joueur·ses de choisir leur matériel ou de composer des équipes dans les jeux de management sportif. Presque tous les sports ont été déclinés en jeux vidéo.

Contrairement aux idées reçues, la pratique du jeu vidéo peut aussi être synonyme d’exercices physiques. Cela nécessite souvent un équipement particulier (casque de réalité virtuelle, capteurs…) mais, seul·e ou à plusieurs, il est possible d’entretenir sa forme physique grâce à son PC ou sa console avec des jeux qui engagent le corps comme Ring Fit Adventure, Beat Saber, Fitness Boxing, Mario Golf: Super Rush, Just Dance, ARMS, Wii Sports

Les jeux vidéo en compétition

Le jeu vidéo en compétition, communément appelé esport ou e-sport, comporte de nombreux points communs avec la compétition sportive traditionnelle. L’esport est une pratique sportive rigoureuse reposant sur un entraînement intense au sein d’une équipe et un véritable suivi par des coachs, des préparateur·ices physiques et des diététicien·nes, car le mental comme le physique sont soumis à rude épreuve. Les revenus des joueur·ses sont assurés par des sponsors. Les grands tournois officiels sont mis en place par l’eSports World Convention (ESWC), la Major League Gaming (MLG), la Cyberathlete Professional League (CPL) ou encore l’Evolution Championship Series (EVO) et accueillent le public dans des arènes de plus en plus imposantes. Les rencontres sont également diffusées et suivies sur les réseaux sociaux.

Parmi les grands jeux faisant le succès des compétitions d’esport, on retrouve surtout des jeux de tir à la première personne (ou FPS), comme Counter Strike: Global Offensive, Valorant, Fortnite ou PUBG: Battelground, le jeu de sport motorisé Rocket League, des arènes de bataille en ligne (ou MOBA) comme League of Legends et Dota 2, ou encore des jeux de combat (ou VS fighting) comme Street Fighter 6.

La France compte plusieurs champion·nes d’esport. La team Vitality, équipe parisienne d’esport, a remporté en 2023, devant 12 000 spectateur·ices, le premier Major de Counter Strike organisé en France. L’un de ses membres, Alexis « Zen » Bernier, 16 ans, est l’un des plus jeunes joueur·ses professionnel·les sur Rocket League. Le 13 août 2023, il est sacré champion du monde sur ce jeu avec son équipe. En avril 2023, lors des finales tricolores du Red Bull Solo Q, Victor, alias Kallesyn, un étudiant de 20 ans de l’équipe occitane Antic ESC, est devenu champion de France sur League of Legends, se qualifiant ainsi pour les finales mondiales. Un autre Français, Wawa (de son vrai nom Marwan Berthe), a été sacré champion du monde de Dragon Ball Fighter Z en 2022 à Las Vegas.

Les compétitions olympiques d’esport

L’esport est reconnu comme discipline sportive par le Comité international olympique (CIO) en 2017. Néanmoins, le choix des jeux est sujet à discussion, car le CIO souhaite promouvoir des jeux qui respectent l’esprit olympique et encouragent l’activité physique. Finalement, le Comité décide de retenir ceux qui simulent des sports et de les rattacher à la fédération internationale du sport en question. Une compétition olympique d’esport est testée à Tokyo, les Olympic Virtual Series, en 2021. Elle rassemble 250 000 participant·es en provenance d’une centaine de pays et propose cinq compétitions de jeu vidéo en lien avec des sports.

En 2023, le CIO présente une liste officielle de neuf titres de jeu vidéo, version vidéoludique de sports traditionnels : le tir à l’arc (Tic Tac Bow), le baseball (WBSC eBASEBALL™: Power Pros), les échecs (Chess.com), le cyclisme (Zwift), la danse sportive (Just Dance), le sport automobile (Gran Turismo), la voile (Virtual Regatta), le taekwondo (Virtual Taekwondo) et le tennis (Tennis Clash). De nombreux médias relaient la déception des fans d’esport et critiquent la sélection officielle, estimant qu’elle passe totalement à côté de la pratique et des attentes des joueur·ses de jeu vidéo en ignorant les grands titres et les grandes compétitions d’esport existantes. Les compétitions olympiques d’esport représentent un défi pour les champion·nes vidéoludiques car les conditions de concours – la version du jeu pratiquée, le matériel utilisé ou les règles adoptées – peuvent être très différentes de celles des tournois officiels du jeu.

Pour la première Semaine olympique d’esports (OEW) organisée à Singapour en juin 2023, un dixième titre de jeu est ajouté : le populaire Fortnite pour représenter le tir. Mais les adeptes de Fortnite découvrent une version édulcorée du jeu, conçue en collaboration avec la fédération internationale de tir pour ressembler à un tournoi classique et intitulé Défi de l’ISSF sur Fortnite. Sept esportif·ves français·es sont revenu·es médaillé·es de ces JO esport 2023, dont cinq en première place. L’édition 2024 de la Semaine olympique d’esport pourrait se tenir à Paris – mais en marge de Paris 2024, car le CIO a annoncé que les compétitions esportives ne devraient pas intégrer les Jeux olympiques avant 2028.

Publié le 14/09/2023 - CC BY-SA 4.0

Les séries d'esports olympiques

Just Dance, pour la danse sportive

Just Dance est un jeu de rythme basé sur la danse, développé et édité par Ubisoft. Le premier épisode est publié en novembre 2009 sur la console Wii, une des premières consoles de salon « portables ». Dans ce jeu, l’activité n’a rien de virtuel : vous devez bouger votre corps en rythme sur les chorégraphies proposées. Les points sont comptés à l’aide de la détection de mouvements. Le jeu est accessible à tous·tes, mais nécessite d’être en forme pour enchaîner les chorégraphies. Les amateur·rices de Just Dance sont en général jeunes et très au fait des derniers hits. La sélection musicale de chaque nouvelle édition du jeu est attendue avec impatience par les fans.

Les parties se jouent seul·e ou jusqu’à six joueur·ses, en local et en ligne, mais la finale olympique se joue sur le mode « One Song Challenge ». Huit candidat·es s’affrontaient aux finales olympiques de 2023 et c’est la Française Amandine Morisset, alias TheFairyDina, trois fois championne de France et vice-championne du monde de Just Dance, qui a remporté la compétition.

Virtual Regatta, pour la voile

Virtual Regatta est un jeu développé en France en 2006, sur une idée du skippeur professionnel français Philippe Guigné, que l’on peut présenter comme un jeu massivement multijoueur (MMO) simulant une course de bateaux ou régate. Lors de l’édition 2020 du Vendée Globe, plus d’un million de skippeur·ses virtuel·les se sont lancé·es dans l’aventure. En tant que simulation, Virtual Regatta suit les règles officielles de la voile et recrée les conditions techniques et météorologiques rencontrées par les professionnel·les lors des grandes courses type Vendée Globe ou Route du Rhum. Une bonne connaissance de la voile et une expertise météorologique sont donc nécessaires pour entreprendre cette régate virtuelle.

Deux épreuves sont organisées pour la compétition olympique : une course offshore autour du monde de 30 jours et des régates inshore. Le Français Tim Carpentier, alias UOL Pepitō, a remporté l’épreuve de course inshore qui réunissait 11 eskippeur·ses et trois Français·es ont monté les marches du podium de l’épreuve de voile au large, au terme d’un mois de jeu : Baptiste Renaut (Baptiste_REP – PVe), Xavier Coquiard (Koky – PVe) et Aurélie Martin (BlackPanther BSP).

Tennis Clash, pour le tennis

Le jeu de tennis multijoueur en ligne Tennis Clash de Wildlife Studios, sorti en 2020, est un simulateur à commande tactile qui se joue sur appareils Android ou iOS. Premier jeu sur mobile officiel de Roland-Garros, il héberge les Roland-Garros eSeries by BNP Paribas, la plus grande compétition virtuelle de tennis du monde.

Le jeu se prend facilement en main, voire dans la paume de la main puisqu’il se joue sur téléphone et autres appareils tactiles. Les joueur·ses ne sont pas essoufflé·es ou meurtri·es de courbatures car seul leur doigt est amené à parcourir le terrain. Il s’agit d’un choix étonnant, car non seulement c’est un jeu mobile, mais c’est également un pay to win, pratique critiquée par la communauté des joueur·ses, car elle favorise celleux qui ont les moyens d’investir dans les jeux par des microtransactions. Le Français Anass Benghaz, alias Anteo, deuxième de l’eSeries de Roland-Garros 2022, remporte l’or aux JO esport 2023. Le tentrenaire est avant tout un fan de tennis.

Tic Tac Bow, pour le tir à l'arc

Tic Tac Bow est un nouveau jeu mobile disponible au téléchargement sur Android et iOS, développé par la société singapourienne Refract Technologies, partenaire de la Fédération internationale de tir à l’arc, pour donner l’opportunité aux joueur·ses du monde entier de devenir le ou la premier·ère champion·ne olympique d’esport de tir à l’arc aux JO esport 2023.

Une dimension stratégique et ludique a été ajoutée au sport traditionnel en mélangeant la précision du tir à un jeu de morpion classique : en effet, le ou la joueur·se doit atteindre trois cibles sur une même ligne mais son adversaire peut lui voler sa place en réalisant un score plus élevé sur une cible. Tic Tac Bow nécessite sang froid et patience.

Des réserves ont été émises à propos de ce jeu : trop récent, une communauté de joueur·ses très petite. Des suspicions de bugs et possibilités de triche ont persisté jusqu’en mars 2023, un mois avant les premières qualifications. L’Américain Jared Montgomery, alias MontyDey, est sacré premier champion de cet esport olympique.

Zwift, pour le cyclisme

Zwift est un programme d’entraînement physique en ligne multijoueur pour le cyclisme et la course à pied qui permet aux utilisateur·rices de se déhancher sur des pistes et routes virtuelles. Créé en 2014 et décliné en jeu en 2015, il est utilisé en 2016 pour détecter les jeunes talents. La ligue esport de Zwift est créée en 2019.

Le jeu nécessite de s’équiper d’appareils d’entraînements stationnaires à coupler à une machine, reliée elle-même à Internet. Conçu comme un programme d’entraînement ludique, le jeu est physique et exigeant et simule l’expérience des circuits. Il nécessite une bonne condition physique car les efforts à fournir s’adaptent à la difficulté de la route empruntée. On peut rouler en solo comme en groupe sur Zwift. 

Ce choix pour les JO a suscité moins de critiques que les autres, en raison de l’engagement physique du corps dans le jeu, même si les cyclistes professionnel·les le pratiquant relèvent de grandes différences dans les sensations et dans l’effort à fournir, ainsi que des possibilités de triche. La Suédoise Marlene Bjärehed, de la Team Fuego, remporte l’or de l’édition 2023 des JO d’esport sur Zwift.

Gran Turismo, pour le sport automobile

Série extrêmement populaire de jeux vidéo de course automobile, Gran Turismo est conçu par le studio Polyphony Digital et produit par Sony Computer, et se joue sur les consoles de la gamme PlayStation. Le premier Gran Turismo sort en 1997, et devient rapidement un des titres les plus vendus et les plus populaires grâce à la qualité des graphismes et au rendu des sensations de pilotage.

La course automobile requiert une concentration et une préparation physique irréprochable que l’on peut rapprocher des qualités d’un·e joueur·se d’esport. Un pratiquant du jeu, Jann Mardenborough, gagnant d’une édition du concours GT Academy qui regroupe les meilleur·es joueur·es du monde, est d’ailleurs devenu pilote automobile chez Nissan.

Pour les joueur·ses, le grand plaisir du jeu repose sur sa fidélité à la réalité – représentation des circuits, sensations de pilotage, spécificités des véhicules –, rendue possible grâce à un partenariat entre tous les acteur·ices du domaine.

Le Français Kylian Drumont, étudiant de 19 ans, remporte le titre de champion olympique d’esport sur Gran Turismo, après un titre de champion du monde. Il joue depuis 2020 et bénéficie de l’aide d’un coach et d’une équipe.

Virtual Taekwondo, pour le Taekwondo

Autre création récente de la société singapourienne Refract Technologies, en partenariat avec la Fédération internationale de taekwondo, Virtual Taekwondo est le seul sport de combat de la liste des esports olympiques. Le taekwondo est un art martial d’origine sud-coréenne inscrit aux Jeux olympiques depuis 2000.

Dans sa version virtuelle, le ou la joueur·se se sert de son corps comme d’une manette de jeu, grâce aux capteurs fixés sur son corps, pour garder son adversaire à distance. Physiquement exigeant, le jeu nécessite de bouger comme pour une véritable compétition, sans cependant risquer de prendre des coups car l’adversaire est virtuel·le et le combat sans contact. Face à son écran, le ou la joueur·se exécute les mouvements inhérents à ce sport, mais dans le cadre d’un combat, ce qui pimente la démonstration. Les champion·nes de ce sport ont participé aux démonstrations du jeu en 2022. Les champion·nes des JO esport 2023 sont les Singapourien·nes Nigel Tan et Natalie Tor et le chinois Wu Jingyu.

Chess.com, pour les échecs

Serveur, forum internet et réseau social autour des échecs, créé en mai 2007, le site Chess.com propose aussi une application mobile. En 2023, le site est considéré comme le serveur d’échecs le plus important en terme de trafic et organise tournois, parties rapides et blitz (parties en temps limité) auxquels sont convié·es les meilleur·ses joueur·ses du monde. Hormis l’absence du plateau et des pièces de jeu, le jeu d’échecs est ici proposé dans sa forme la plus épurée. Chess.com propose un grand choix de modes de jeu que ce soit contre des adversaires réel·les ou face à l’ordinateur, qui joue en fonction des choix du joueur·se.

Sur plateau ou sur écran, le jeu d’échec reste le jeu d’échec et sa pratique nécessite entraînement, discipline, connaissance de l’échiquier, de ses pièces et l’étude des grandes parties jouées par les maîtres si l’on prétend glaner une médaille olympique. Malgré plusieurs tentatives pour être inscrits comme sport olympique,  les échecs n’ont obtenu le statut de sport auprès du CIO qu’en 1999, et n’ont été présentés qu’en démonstration. Désormais, les échecs seront également classés dans la section esport et ont un champion olympique : le Serbe Aleksei Sarana.

WBSC eBASEBALL™ : POWER PROS, pour le Baseball

Jeu vidéo japonais créé par Konami, WBSC eBASEBALL™ : POWER PROS est une simulation de baseball sur console. Le jeu propose les modes « tournoi » et « jeu rapide ». Les joueur·ses peuvent choisir parmi une liste de plus de 300 personnages de l’univers Power Pros pour constituer leurs propres équipes. Jouable en solo et jusqu’à quatre joueur·ses sur le même écran, WBSC eBASEBALL™ : POWER PROS est aussi jouable en mode sans fil et même en ligne, en un contre un.

Le physique n’est évidemment pas aussi sollicité que sur le terrain, mais le principe reste le même : frapper, lancer et défendre.  Pour le plaisir des spectateur·ices, il est possible de revivre les plus belles actions de jeu par des animations spectaculaires de double jeu, arrêts de plongée, réception de homerun en plein vol, etc. C’est la deuxième fois que les ejoueur·ses de baseball s’affrontent aux JO esport et l’édition 2023 est remportée par le Japonais Mori Shoma.

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