Appartient au dossier : Serge Gainsbourg, le temps d’une chanson La Chambre d’Écho(s)
La Chambre d’Écho(s) #8 : Serge Gainsbourg, Histoire de Melody Nelson (1971)
Chansons de travers
Certains albums semblent de véritables astres autour desquels gravitent la vie et la carrière de leurs auteurs. Ils ont en commun l’attrait risqué des expériences hors normes, et d’y avoir entraîné la postérité, élargissant le spectre de la réception ordinaire d’un disque pop. La Chambre d’Écho(s) revient sur ce grand disque bref (28 minutes) qu’est Histoire de Melody Nelson.
La chanson : un « art mineur », parfois difficile…
Échec commercial programmé à sa sortie (30 000 exemplaires vendus), devenu le classique pop le plus influent de la chanson française, revendiqué par des artistes comme Beck, Air ou De la Soul, les 28 minutes de cet album-concept concentrent également toutes les contradictions de son auteur : « disque difficile », avouera-t-il notamment lors d’une de ses sorties sur la chanson comme « art mineur ».
Audaces et introspection
Disque difficile, donc ambitieux, avec ses durées insolites (les 7 minutes de Melody et Cargo Culte, dictées par la symbolique du chiffre sept), ses grooves tendus comme des élastiques, son talk-over (parlé-chanté) au scalpel, à l’innombrable descendance, ses volutes orchestrales arrangées par Jean-Claude Vannier (auteur en 1972 de L’Enfant assassin des mouches, ovni discographique annonçant La Planète sauvage de René Laloux, Roland Topor et du complice des premières années de Gainsbourg Alain Goraguer).
Disque personnel et introspectif, d’amour et de mort, où Gainsbourg met en scène sa rencontre avec Jane Birkin, dont chaque apparition vocale fait vaciller le narrateur et sa musique.
« Symphonie de poche » à la manière anglo-saxonne (Beach Boys, Zombies) ; Lolita androgyne (le roman éponyme de Nabokov faisant explicitement partie des références de Gainsbourg) promise à un destin funeste parsemé d’accidents, l’un heureux (à vélo !), l’autre fatal (en avion…), en passant par les cascades hilares d’En Melody.
Album-charnière dans la carrière de Serge Gainsbourg, succédant aux florissants hits sixties (Bonnie & Clyde, Initials B.B., Je t’aime moi non plus), premier d’une trilogie aventureuse avec L’Homme à tête de chou (1976), et Aux armes et cætera (1979), Histoire de Melody Nelson respire aussi le son d’une époque, celle de l’après-1968, où la chanson à texte à la française troque ses lettres de noblesse pour l’air que font souffler jazz, folk, rock et poésie libres : des années « où l’on a envie de ne rien faire », selon la devise de Salvador Dalí reprise par Saravah, l’enseigne créée par Pierre Barouh en 1966.
Publié le 04/10/2016 - CC BY-SA 3.0 FR
Sélection de références
Histoire de Melody Nelson
Serge Gainsbourg
Warner Chappell music ; Ed. Sidonie, 1971
Partition chant et piano.
En 1971, Melody Nelson donne son nom à la société éponyme.
À la Bpi, niveau 3, 782.6 GAIN 3
Les Manuscrits de Serge Gainsbourg. Brouillons, dessins et inédits
Laurent Balandras
Textuel, 2011
Les manuscrits de Serge Gainsbourg permettent de découvrir la genèse de ses chansons, des titres inédits, des aphorismes, des dessins, des brouillons, des extraits de scenarii, de partitions et même des recettes de cuisine.
À la Bpi, niveau 3, 782.6 GAIN 1
L'Intégrale et cætera. Les Paroles, 1950-1991
Serge Vincendet et Yves-Ferdinand Bouvier (dir.)
Bartillat, 2009
Cette version augmentée de « Dernières Nouvelles des étoiles » contient plus de 600 textes, connus et méconnus et, pour certains, inédits : « A celle qui louche » ou « J’ai bouffé du hérisson ». Ca commence en 1950 et s’achève quarante et un ans plus tard avec les titres de travail d’un futur album qui ne verra jamais le jour : « Moi m’aime Bwana ».
À la Bpi, niveau 3, 782.6 GAIN 1
Mon propre rôle. Les Chansons de Serge Gainsbourg
Serge Gainsbourg, préface d'Alain Coelho
Gallimard, 2009
Les textes de Serge Gainsbourg rassemblés en deux volumes.
À la Bpi, niveau 3, 782.6 GAIN 1 1 et 782.6 GAIN 1 2
782.6 GAIN 1 2
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